La pression du confort est une notion décisive. Il est sous-entendu (hors discussion, sauf dans les milieux encore marginaux de la décroissance), que le confort moderne, au sens large où nous l’entendons aujourd’hui, est un acquis irréversible. Cette façon de penser est largement due au fait que les générations nées depuis les années 1970 n’ont pas connu d’autres conditions de vie et ne dispose pas d’éléments de comparaison. Un jeune des banlieues déshéritées, aujourd’hui, dispose de moyens de confort que n’avait pas le roi Louis XIV, notamment l’eau chaude au robinet, les WC et le chauffage. Cette révolution du confort est le premier moteur de la pression sur la nature entraînée par nos gestes quotidiens.
Mais il faut être né dans la France rurale de l’après-guerre pour disposer d’éléments de comparaison et comprendre ce que recouvre l’idée de la « pression de confort ». Il faut avoir connu les chambres non chauffées, les toilettes au fond du jardin, les déchets que l’on recycle intégralement, le lapin du dimanche midi, l’eau que l’on va tirer au puits, l’orange à Noël, le bain du samedi soir dans la bassine chauffée sur la cuisinière, les enfants qui se lèvent à cinq heures du matin pour venir à pied à l’école – il faut avoir connu tout cela pour comprendre la pression que nos gestes quotidiens exercent sur la nature. Assurément, dans mon enfance, notre « bilan carbone » était optimal. (in la politique de l’oxymore de Bertrand Méheust)