La question sociale pose le problème du statut des travailleurs par rapport à la puissance du capital. Face à la question sociale, la spécificité des objecteurs de croissance est de vouloir mettre l’accent sur la lutte contre la misère et contre la richesse, plutôt que contre la pauvreté. Ce souci reflète parfaitement les idées d’auto-limitation volontaire des besoins et de partage des richesses contenues dans la notion de décroissance conviviale ou solidaire, et résumées par le mot d’ordre de Gandhi, devenu l’une des phrases-fétiches des objecteurs de croissance : "vivre simplement pour que les autres puissent simplement vivre".
En effet, pour les objecteurs de croissance, la richesse est mauvaise en soi (parce qu’elle présente un caractère pathologique), mais elle est aussi nécessairement source de misère sociale et de destruction écologique accrues : la richesse d’une minorité est la cause de la pauvreté d’une majorité, et de la condamnation d’une part importante de la population mondiale à la misère sociale et écologique. Dans un monde qui n’a jamais été aussi riche, 800 millions de gens ne mangent pas à leur faim, et ce chiffre est en constante augmentation. De plus, ces miséreux habitent souvent les zones les plus polluées de la planète et sont les premières victimes des désastres environnementaux.
Pour permettre à ces gens d’échapper à la misère, les objecteurs de croissance proposent de réduire le train de vie des riches en les incitant à choisir la "sobriété" ou la "simplicité" plutôt que de poursuivre leur course folle à la richesse. S’il n’y a plus de riches, alors il n’y a plus de pauvre, et des ressources sont libérées pour enfin satisfaire les besoins fondamentaux des miséreux. Dans un monde où les ressources naturelles sont limitées et où la course à la richesse est entretenue par les plus riches (dont le mode de vie est donné comme exemple à imiter et comme modèle de réussite sociale), la question écologique et la question sociale sont intimement liées. La notion de décroissance conviviale impose de les penser ensemble.