Nous avons besoin d’une utopie mobilisatrice pour répondre à la question qui se posera bientôt dans notre futur proche : comment vivre mieux avec moins ?
Nous avons considéré comme hypothèse probable que les années 2030 seront marquées par la réalité physique d’un krach écologique multiple (Geneviève Ferone), et donc par une prise de conscience généralisée. Les années suivantes, l’humanité sera donc obligée de changer fondamentalement de paradigme. Ce que nous prévoyons pour 2050 est déjà largement avéré au niveau des statistiques ; les moyens de réagir et les objectifs face à une crise systémique causée par le système capitaliste ont fait l’objet de propositions de nombreux analystes (cf. rapport de l’Onerc). Il n’est pas besoin de beaucoup imaginer, encore moins d’auditionner des spécialistes : il suffit de lire leurs écrits.
D’ici à 2050, la synergie des crises alimentaires, énergétiques, climatiques et démographiques va entraîner une dégradation rapide et brutale du niveau de vie à l’occidentale. Face à la catastrophe annoncée, les humains vont réagir à leur manière, selon deux modalités contradictoires. Pour une part, les violences seront exacerbées, qu’elles s’exercent entre les humains ou pour piller les dernières ressources accessibles. Nous ferons aussi appel à la raison, à la coopération, au sentiment d’interdépendance. Nous ne pouvons pas déterminer à l’avance ce qui l’emportera entre la face sombre de l’individu ou l’intelligence des situations. Des analyses comme le rapport secret du Pentagone sur le changement climatique envisagent le pire, c’est-à-dire la raison d’Etat et la survie des sociétés les plus combatives. Il y a aussi les pessimistes qui pensent que plus rien n’est possible (Bertrand Méheust). D’autres analystes misent sur la pédagogie de la catastrophe. En effet, le temps que nous avons pour réagir est très court (Jean-Marc Jancovici), mais le sentiment de la catastrophe en marche pourrait servir de pédagogie.
Un Mouvement social-écologiste, qui voudrait préparer un avenir durable, se doit d’envisager des scénarios pour accélérer l’évolution vers des comportements écologiquement vertueux d’ici à 2050. Nous sommes obligés de nous confronter aux limites de notre planète, notre volonté doit aller en ce sens : la volonté politique liée à la nécessité écologique. C’est l’objectif de l’écologie politique, c’est par exemple celui du pôle écologique du Parti socialiste. Un parti ne peut pas faire l’impasse sur l’avenir de tous les êtres vivants, sauf à admettre qu’il ne s’occupe que du bien-être actuel de la société française. Un parti doit se montrer capable d’un véritable projet alternatif pour un avenir durable.
Il s’agit de concilier le volontarisme politique et le sens de l’utopie dans un contexte actuel qui nous fait déjà penser que 2050 sera profondément différent de ce qu’a construit la société thermo-industrielle en deux siècles. Ce scénario futuriste, même s’il paraît utopique, n’est en rien de la science fiction. En 1974, Joël de Rosnay présentait un programme de « voyage en écosocialisme ». La déclaration du Congrès de l’Arche préfigurait une démarche écologique dès 1991. Aujourd’hui il est devenu encore plus évident que la limitation des ressources tirées de notre planète va bouleverser en profondeur notre économie et nos sociétés : l’écologie devient une variable dominante, ce qui est concrétisé dans la Déclaration de principes du parti socialiste en 2008.