Alors que le système socialisant privilégiait pendant les Trente Glorieuses l’intervention de l’Etat (pratique keynésienne, Etat-Providence), au cours des années 1980 le tournant libéral privilégie les entreprises et la responsabilité individuelle. Mais au-delà de cette dichotomie apparente, chaque nation était en fait représentée par un Etat de type « national-socialiste », c’est-à-dire un système qui considère les intérêts de ses ressortissants et non l’intérêt général. Au moment des premiers choc écologiques de la première moitié du XXIe siècle, la tendance mondiale a été au renforcement du pouvoir d’Etat dans chaque nation pour faire face à la crise ultime. En effet il a fallu prendre des décisions autoritaires et provoquer une mobilisation sans précédent des citoyens : à crise systémique, réponse systémique. Le sentiment d’urgence était généralisé, les directives acceptées ; la crise économique était telle que le consensus allait de soi (écocitoyenneté). Mais les pays renforçaient aussi leurs liens réciproques. Le RES (Rapport Europe Soutenable) appliqué dans l’Union européenne a été un facteur prépondérant de l’évolution mondiale.
Pourtant un système démocratique durable est d’autant mieux préservé quand l’Etat central a programmé la mise en place d’une autonomie territoriale. Dès le début du 21e siècle, des communautés de résilience se préparaient au pic pétrolier, au changement climatique et à la crise économique afin de mieux y résister (ne pas confondre avec les survivalistes). Ce processus rend obsolète en 2050 l’existence d’un Etat central fort. La pratique de l’Etat « national-socialiste » est abandonnée. Les relations de production et de consommation se recentrent sur le territoire (relocalisation, désurbanisation, ruralisation). L’agriculture et l’artisanat ont retrouvé une place stratégique. Les études sont courtes, centrées sur l’apprentissage des techniques douces et l’expérience de la convivialité. Les individus savent maintenant que leur responsabilité personnelle passe par la prise en compte de leur responsabilité collective, ils raisonnent glocal.
En 2050, nous passons de la toute puissance étatique à l’autonomie individuelle. La philosophie des Lumières se concrétise par la maîtrise individuelle de ses gestes quotidiens. Les militants des syndicats et des partis politiques savent dorénavant qu’on doit personnellement vivre en harmonie avec les principes démocratiques et écologiques. Ainsi le pôle écologique du parti socialiste français avait adopté en 2010 le principe suivant : « Le Pôle écologique du PS invite ses membres et l’ensemble des citoyens à faire preuve le plus possible dans leur vie de sobriété énergétique et d’autolimitation pour construire ensemble une société plus conviviale et plus égalitaire. » La recherche des limites est un passage obligé pour permettre un équilibre durable entre les possibilités de la planète et l’harmonie sociale, mais la simplicité volontaire ne se décrète pas.