Le livre de Philippe Annaba percute : Pourquoi mettre au monde dans un monde qui se fout du monde ? Voici un résumé de son livre par l’auteur, avec son aimable autorisation.
« Jacques-Yves Cousteau et Albert Jacquard regrettaient que la société humaine ne se soit pas stabilisée à sept cents millions d’habitants. De Georgescu-Roegen Nicholas à Bernard Charbonneau (Le jardin de Babylone), de nombreux objecteurs de croissance ont noté que la croissance démographique incontrôlée participait à la destruction des équilibres naturels. De l’extrême droite à l’extrême gauche et même au sein des « décroissants », c’est le tabou le plus absolu parmi toutes les incohérences que l’humanité multiplie depuis la seconde guerre mondiale. L’on ne peut rien attendre d’un système économique mondial productiviste et libre échangiste, dont l’objectif est le profit sans fin, ne pouvant résulter que d’une croissance perpétuelle, dans un monde fini, aux limites pourtant si évidentes. L’humanité est donc plongée dans une schizophrénie de plus en plus délétère. On subventionne le remplacement des énergies fossiles par l’électricité ainsi que les travaux permettant des économies d’énergie, mais en même temps on promet de réduire le nucléaire sans une politique efficace de recours aux énergies renouvelables. Or tout un chacun sait que ces dernières ne pourront jamais compenser à la fois le nucléaire, le pétrole et le gaz. Chacun devrait également savoir que pour une population sans cesse en augmentation, ces énergies renouvelables exigent une extraction de métaux rares que le sous-sol ne renferme pas. En fait, toute la politique de transition énergétique permet surtout de faire gagner un demi-point de croissance, en multipliant les normes aussi contraignantes qu’inefficaces, et en ponctionnant fiscalement toujours plus la classe moyenne. Pendant ce temps, l’Internet, le numérique, ses algorithme, ses « Data-center » et les futures « Smart-City » si chéries des élus, seront de plus en plus énergivores, dépassant l’aviation civile. Pas un mot non plus sur le boom que connaissent l’Europe et les pays émergents, après les États-Unis, en ce qui concerne la climatisation également très énergivore. En fait, chaque année révèle une augmentation notable de la consommation d’énergie, et pour très longtemps encore.
Les découvertes de la pénicilline (par hasard), puis des antibiotiques, ont quasiment éradiqué, dans le monde, la mortalité infantile et celle des femmes en couche. Pourtant, hormis en Chine durant une cinquantaine d’années, aucun pays n’a mis en œuvre une politique de limitation des naissances. Et le développement des méthodes de contraception n’ont en rien enrayé la croissance continue de la population mondiale. Si les religions avaient besoin de nombreux fidèles, l’agriculture et l’industrie de nombreux bras, aujourd’hui le tabou de la surpopulation paraît sans objet, la religion ne faisant plus recette, du moins en Occident, et l’industrie préférant l’automation. Quel anachronisme aujourd’hui, cette injonction divine : « Croissez et multipliez, remplissez la terre, assujettissez-la, et dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre… » (Genèse 1, 28). En fait, depuis Hégésias (IIIè siècle av. J.-C.), dont les œuvres furent brûlées sous Ptolémée 1er, un certain nombre de nos meilleurs penseurs, de Diogène de Sinope à E. L. Cioran, en passant par Arthur Schopenhauer, ont écrit de belles sentences sur ce sujet, mais toujours consciencieusement cachées et oubliées. Il n’y a donc aucun débat public sur la première question que devrait se poser la philosophie : Naître ou ne pas naître ?
Alors que la problématique de la naissance peut enfin se poser aujourd’hui dans tous ses aspects, il est sans doute bien trop tard. Hans Jonas en avait déjà exposé les prémices dans Le Principe Responsabilité (1979 !). Cet essai montre crûment et sans état d’âme, l’irresponsabilité de la quasi-totalité des parents (chapitres Naissances par inadvertance et Naissances sans discernement).
Cette frénésie de mettre au monde fait d’homo sapiens un oxymore, et révèle la profonde bêtise de cet animal dénaturé qu’est l’homme. Les animaux semblent bien plus sages, tout en étant ses premières victimes (chapitre Le rocher de Sisyphe, la punition de naître ?). Enfin, mettre un enfant au monde, quelle prétention, alors que l’observation de la nature nous montre que le monde vivant ne perdure que par la confrontation des dominants et des dominés, que la vie se nourrit de la mort, et que sa fin n’est le plus souvent que déchéance ! Mettre un enfant au monde c’est oublier un peu trop facilement, par égoïsme, les souffrances et les tourments inéluctables que sa progéniture devra endurer. Enfin, à la différence des générations précédentes, où les sociétés changeaient lentement, qui peut imaginer aujourd’hui, dans quel monde va échouer cet enfant ? Personne. Que va devenir l’homme à l’heure de la physique quantique, et où les propagandistes du transhumanisme investissent des sommes faramineuses dans l’allongement de la vie et l’Intelligence artificielle ? Pour qui ? Pour dix ou quinze milliards d’individus ? Qui est assez sot pour le croire ? Il faut avoir été rendu aveugle et sourd par l’endoctrinement médiatique et les mensonges d’État, pour ne pas voit venir l’avènement d’une élite de démiurges arrogants régnant sur une masse de sous-hommes. »
Mon dieu quelle élégance !
Quand je pense que dans « Décadence » Onfray nous dit : « le bateau coule, il nous reste à sombrer avec élégance ».
On verra bien sur ce coup, si la modération sait elle aussi ce qu’est l’élégance 😉
Et bien sûr, mon pauvre petit marcel, pour pouvoir pisser à la raie de tous ces bisounounours qui vous dérangent autant, j’imagine qu’il faut en avoir une bien grosse.
La modération du blog @ Michel C.
ce genre de langage dénature le contenu de ce blog alors que vous avez déjà prouvé par le passé que vous pouvez raison garder…
Il est faux de dire que « le monde vivant ne perdure que par la confrontation des dominants et des dominés », autrement dit que le monde du vivant se résume à la fameuse « loi de la jungle ». Plus exactement cette affirmation est incomplète. En effet c’est ne pas savoir ou oublier de dire que le monde du vivant perdure aussi par la solidarité entre espèces différentes. Lire le petit livre de Jean-Marie Pelt (La Raison du plus faible).
Ceci dit notre principal problème réside justement dans ces rapports dominants-dominés. C’est toujours à celui qui aura la plus grosse !
« Tant qu’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent et tant que l’on n’aura pas dit que jusqu’ici que cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chance qu’il y ait quoi que ce soit qui change. » (Henri Laborit)
Mais on préfère ressasser ce que tout le monde sait désormais, comme si la prise de cons-cience n’était pas faite. Prendre conscience qu’on est soi-même un petit-bourgeois est une chose, l’accepter comme une réalité en est une autre. Ainsi biosphère préfère nous rabâcher que nous sommes trop nombreux. Ce qui sera traduit par beaucoup trop de crétins : « ILS sont trop nombreux ! »