Tout savoir sur le débat démographique actuel
Selon les dernières projections de l’Organisation des Nations unies, la population mondiale devrait atteindre un pic dans les années 2080, avec environ 10,4 milliards d’habitants et se maintenir à ce niveau jusqu’en 2100. Les uns s’inquiètent et parlent de surpopulation, d’autres considèrent au contraire qu’il faut faire encore plus d’enfants.
Elsa Conesa : « Moins de naissances, c’est moins de travail et moins de consommation, c’est un affaiblissement économique, un déclin, considère Bruno Retailleau, chef de file des Républicains au Sénat.
« En dehors de l’équilibre des régimes de retraite, la démographie n’est pas une variable essentielle au bon fonctionnement d’une économie capitaliste, explique au contraire l’économiste Jean Pisani-Ferry. « Il y a eu beaucoup d’études réalisées sur la relation entre croissance économique et croissance démographique, et on n’a jamais pu mettre en évidence la moindre causalité, expliquait récemment le démographe Hervé Le Bras. L’Allemagne en fournit la preuve : le pays a mieux réussi économiquement que la France en ayant une fécondité, pendant près de cinquante ans, d’un demi-enfant de moins qu’en France. Le cas du Japon illustre bien qu’un pays peut être en récession démographique sans que cela induise de catastrophe économique. A l’inverse, les pays dont la démographie explose ne sont en effet pas nécessairement les plus prospères. »
Pour Sandrine Rousseau, députée Nupes, les perspectives démographiques qui projettent une population de plus de 10 milliards d’êtres humains sur la terre en 2050 sont une « catastrophe écologique absolue ». Défendant l’idée d’une économie en « état stationnaire » plutôt qu’en « croissance infinie », elle juge qu’« il n’y a pas absolument besoin de relancer la natalité ». L’ancienne candidate à la primaire d’Europe Ecologie-Les Verts en 2022 dit observer chez les partisans de la décroissance une réhabilitation des thèses de l’économiste britannique Thomas Malthus. Celui-ci voyait les naissances multiples comme un facteur d’appauvrissement dans un monde aux ressources finies.
lemonde.fr : Le spectre du déclin démographique revient hanter les discours politiques. Le chef de file des sénateurs Les Républicains (LR), Bruno Retailleau, assume : « La question démographique est une question idéologique, car pour financer un régime par répartition, c’est soit plus d’enfants, soit plus d’immigrés. »
L’équation, validée par tous les démographes, est posée. Le débat est lancé, et il ne rencontre pour le moment qu’une réponse ténue parmi les macronistes. Au grand dam du MoDem de François Bayrou, qui dans une note du Haut-Commissariat au plan soutenait, en mai 2021, que « la démographie devient la clé même de la durabilité et de la générosité du contrat social ». La gauche, faute d’assumer un discours clair – que ce soit le recours à l’immigration, un goût affiché pour la natalité ou même un néomalthusianisme écologique –, s’aventure peu sur ce thème. La sénatrice socialiste Laurence Rossignol, ex-ministre des familles de François Hollande, se décrit quand même comme une féministe « familialiste »: « Quand un pays n’a plus envie de faire des enfants, c’est un indicateur de perte de confiance de la jeunesse dans son avenir » Pour le reste, la sénatrice fustige les immuables relents « pétainistes » du discours de la droite : « Faire des enfants pour la France, pour le régime de retraites ou pour faire des soldats, toujours la même histoire… »
La députée écologiste Sandrine Rousseau : « Ce n’est pas neutre, la démographie ! On est 9 milliards, il n’y a pas besoin de politiques publiques pour développer la natalité, il suffit d’ouvrir un peu les frontières », estime celle qui avait lancé à l’Assemblée : « Lâchez nos utérus ! »
Le démographe Hervé Le Bras. « Ce n’est pas pour la patrie qu’on fait des enfants, ni pour la planète qu’on n’en ferait pas, mesure-t-il. Et contrairement à ce qu’on fait croire à propos des retraites, explique-t-il, c’est les jeunes le problème de la nation. » C’est dans cette classe d’âge, pas chez les retraités, que le taux de pauvreté explose, ce qui explique aussi en partie le report du premier enfant. A force de tourner les politiques vers le troisième âge, ou de viser directement les ventres des femmes, on finirait par l’oublier.
Raphaëlle Besse Desmoulières : Persuadés que notre espèce est en train de disparaître, Malcom et Simone Collins, un couple en attente de son quatrième enfant, appellent depuis leur demeure cossue de Pennsylvanie à faire le plus d’enfants possible. Les époux ont des problèmes de fertilité. Ils ont eu recours à des fécondations in vitro (FIV).
Dans le sillage d’Elon Musk, ces pronatalistes admirateurs de Donald Trump prônent aussi une sélection génétique des embryons. Les Collins ne veulent pas simplement beaucoup d’enfants, ils les souhaitent les plus optimaux possible. « Nous avons des raisons de croire que beaucoup de choses sont héréditaires et nous voulons ce qu’il y a de mieux pour eux »Ils en espèrent au moins sept. Pour l’enfant que Simone attend, ils prétendent être allés plus loin encore. « A ma connaissance, il s’agit du premier bébé qui sera sélectionné pour son intelligence. »
Corine Lesnes : La plus haute juridiction américaine se penche sur le droit de prescrire la pilule abortive par télémédecine, un recours notamment pour de nombreuses femmes dont l’Etat a interdit les interruptions volontaires de grossesse.
En 2000, la Food and Drug Administration (FDA) avait approuvé la mise sur le marché de la mifépristone (aussi connue sous le nom de RU 486). En décembre 2021, elle a supprimé l’exigence selon laquelle le médicament devait être délivré lors d’une visite médicale en personne. Cette décision a facilité la commercialisation du médicament par télémédecine avec expédition par la poste, suscitant l’indignation du mouvement conservateur. Depuis la pandémie de Covid-19, l’avortement chimique, à base de deux médicaments (mifépristone et misoprostol), est devenu la procédure d’interruption de grossesse la plus courante aux Etats-Unis (63 % des procédures en 2023).
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