Il faut faire décroître le système de santé. C’est ce qu’on envisage dans le mensuel « La décroissance » de février 2021. Voici quelques extraits.
Sylvie Cognard : Quand je démontre que la plupart des maladies sont dues aux inégalités sociales, aux conditions de travail, aux problèmes environnementaux et à l’utilisation de certains traitements (Médiator, Dépakine, Distilbène), on me demande de me taire. Il est plus facile de « tout faire » pour tenter de guérir dans une débauche de moyens. Les autres combats sont bien trop vastes et dus à mener…il faudrait changer de système, alors il est préférable d’entretenir les causes. Quant à la mort, il n’est plus question de mourir de « mort naturelle ». Les vieux Inuits qui choisissent de s’éloigner de leur groupe pour aller finir leur vie sur la banquise, impensable de nos jours ! La Némésis médicale d’Ivan Illich est magnifiquement illustre par la pandémie actuelles ; bien que la mort due à la famine dans le monde soit infiniment plus tueuse, il faut combattre le virus comme si l’on été en guerre ! Le mythe de l’immortalité entretenu par la médecine occidentale fait tourner à plein la roue du hamster. La sobriété n’aurait-elle pas consisté à laisser ce virus circuler, accompagner dignement et avec empathie les malades, renforcer les capacités immunitaires des individus ? L’effondrement de la société thermo-industrielle qui s’annonce va forcer la monde à la sobriété de façon brutale, dans le domaine des soins comme dans les autres.
Alain Masquelet : Il est vain et illusoire de réclamer des moyens supplémentaires qui ne peuvent être sérieusement envisagés sans une croissance continue. Ce qui n’est pas souhaitable car la croissance ne peut être poursuivie indéfiniment. Il semble donc que nous ayons atteint un pic, du moins dans les pays occidentaux, en matière d’équipements médicaux et d’exercice médical. Par ailleurs il a été beaucoup question dans le discours politique se rapportant à la pandémie de sauver des vies. Or la vie est une notion abscons à laquelle il faudrait substituer l’idée de préserver le vivant. Des moyens pour parvenir à une médecine sobre peuvent être identifiés. Désescalade technologique, contre la robotisation des actes chirurgicaux et les bio-prothèses complexes, entretenant le mythe du dépassement des limites. Recentrage de l’activité clinique sur la parole du patient, expert de sa maladie qui permet de contextualiser le trouble. Réforme du système sanitaire, à décliner en unités géographiques fonctionnant sur une demande locale et non plus sur une offre centralisée.
Alexandra Laignel-Lavastine : Ériger la vie en souverain bien n’est pas anodin. La vie est certes un bien précieux, mais si elle était le premier d’entre eux, nous n’aurions eu ni l’appel du 18 juin, ni résistants à prendre les armes, ni dissidents sous le communisme, ni Dr Li à Wuahan pour nous alerter sur la gravité de la pandémie. La vie est l’alpha, pas l’oméga. Il existe des principes supérieurs au principe de survie, comme la liberté, le courage et l’honneur. Une vie qui n’est pas disposée à se sacrifier pour donner du sens à sa vie ne mérite pas d’être vécue.
Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere :
18 avril 2020, Covid, regardons sans ciller la mort en face
Pour ceux qui n’auront pas lu La Décroissance de ce mois-ci voici la conclusion du Dr Z. L. :
– « La décroissance (humaine) du système de santé est-elle possible ? Oui.
Est-elle souhaitable ? Non. «
Dans le mensuel « La décroissance » de février 2021 lire aussi l’interview de la philosophe Alexandra Laignel-Lavastine : «Si la vie est tout, elle n’est plus rien»
Lire aussi l’article d’Alexandra Laignel-Lavastine publié le 21/12/2020 sur valeursactuelles.com :
– «L’avenir de l’homme après la Covid, ou l’angle mort de la pandémie»
Alexandra Laignel-Lavastine pose des questions auxquelles nous ferions bien de réfléchir. Ne serait-ce que «Pour quoi serions-nous encore prêts à mourir ?» (titre de son essai paru en 2017)