Armée ou défense civile non violente ?

De notre correspondant Michel Sourrouille

J’ai chez moi une brochure de 100 pages éditée par « combat non violent » n°59-60 (mars 1975)« Armée ou défense civile non violente ». Avaient participé à la rédaction de cette étude 14 personnes, civils ou militaires, entre autres Jean-François Besson, Jacques de Bollardière, Jean Lasserre, Lanza del Vasto, Jean Toulat… des personnes qui ne sont pas connus aujourd’hui, à notre époque de réarmement militaire et d’abandon des causes justes.

Une version numérique de ce livre a été réalisée dont voici le lien :

https://fr.wikibooks.org/wiki/Arm%C3%A9e_ou_d%C3%A9fense_civile_non-violente_%3F

Quelques extraits issus de ce livre qui devait être connu et commenté lors des journées dite « défense et citoyenneté », obligatoires pour tous les jeunes.

– Non seulement le système de la défense armée classique paraît inapte à protéger le territoire et la population, mais, fait plus grave encore, il accroît les risques de guerre. En effet, pour assurer son indépendance militaire, une nation doit produire, dans la mesure du possible, son propre armement. Or les armes modernes sont extrêmement coûteuses et leur production n’est rentable qu’à condition d’en vendre une grande part à l’étranger, ce qui a pour effet d’accroître la fréquence des conflits, leur violence potentielle et leur durée

– Il serait très dangereux de se laisser aller à un antimilitarisme sommaire. L’antimilitarisme en effet, s’appuie sur des bases trop diverses et trop mouvantes pour pouvoir constituer un programme d’action. Autrement dit, la remise en question de la défense armée ne peut et ne doit pas aller sans la recherche d’une autre forme de défense.

– Lutter contre un système politique (et une armée d’invasion n’est qu’un élément d’un système politique) en utilisant la violence armée, c’est d’abord renforcer ce système qui devient un bloc uni, cimenté par le nationalisme et l’exaltation militariste des uns et par l’instinct de conservation des autres.

– Contrairement à ce qui se passe dans la lutte armée où, bien souvent, « des gens qui ne se connaissent pas se tuent au profit de gens qui se connaissent bien et ne se tuent pas », la lutte non-violente permet à ceux qui, en d’autres circonstances, se seraient entretués, de mieux se connaître et affaiblit le pouvoir de ceux qui auraient bénéficié du carnage.

– L’un des fondements de la non-violence est précisément le refus de collaborer avec l’injustice. Face à une injustice, la première action qui s’impose est de la faire connaître. Ses auteurs se trouveront dans une situation d’autant plus difficile que l’injustice deviendra évidente pour toutes les catégories de l’opinion publique

– Un pouvoir, s’il ne peut subsister sans une couverture d’honorabilité, a besoin également de la collaboration active ou passive d’une large minorité au moins de la population. Il lui faut des fonctionnaires, des contribuables, des travailleurs, des consommateurs actifs, etc. Dès qu’une catégorie importante de la population refuse de coopérer, la situation du pouvoir devient difficile. Elle devient impossible si le refus se généralise. « Je vois bien, disait Gandhi, comment je peux enseigner la non-violence à un violent, mais je ne peux l’enseigner à un lâche »

– Au-delà du refus de coopérer avec les responsables de l’injustice, au-delà également de la résistance à leurs lois, la lutte non-violente doit aller dès les premières phases du combat, jusqu’à la création d’un contre-pouvoir et d’institutions parallèles.

– La prise de conscience dans le sens de la décentralisation, sur le plan économique dans le sens de l’autogestion, sur le plan écologique enfin, dans le sens de la recherche de « techniques légères » ou, selon l’expression d’Ivan Illich, d’outils « conviviaux », se trouve en parfaite convergence avec la recherche d’une défense non-violente.

Une version actualisée de la dissuasion civile existe :

https://www.irnc.org/IRNC/Textes/3103

L’ouvrage « La dissuasion civile » (épuisé) a été rédigé en 1985 par Christian Mellon, Jean-Marie Muller et Jacques Sémelin sur une commande de Charles Hernu, ministre de la Défense et publié par la Fondation pour les Études de Défense Nationale (FEDN)

La défense civile non-violente est une politique de défense contre toute tentative de déstabilisation, de contrôle ou d’occupation de notre société, conjuguant, de manière préparée et organisée, des actions non-violentes collectives de non-coopération et de confrontation avec l’adversaire, en sorte que celui-ci soit mis dans l’incapacité d’atteindre les objectifs de son agression (influence idéologique, domination politique, exploitation économique).

En d’autres termes, il s’agit de rendre la société insaisissable ou « indigérable » par un agresseur : incontrôlable politiquement, « insoumettable » idéologiquement, inexploitable économiquement. Il s’agit aussi de dissuader l’agresseur de s’attaquer à cette société, parce que les coûts qu’il risquerait de subir seraient supérieurs aux gains qu’il pourrait espérer, et parce qu’il prendrait des risques pour son propre pouvoir : c’est la dissuasion civile.

Cette résistance repose sur une bonne articulation entre la résistance des pouvoirs publics et celle de toute la société civile.

11 réflexions sur “Armée ou défense civile non violente ?”

  1. « La prise de conscience dans le sens de la décentralisation, sur le plan économique dans le sens de l’autogestion, sur le plan écologique enfin, dans le sens de la recherche de « techniques légères »  »

    Tout ça c’est bien beau mais c’est juste utopique, mais en rien réaliste ! L’autogestion ne fonctionne qu’à vraiment à toute petite échelle pour une toute petite minorité d’individus capables de se prendre en main, mais ne fonctionnera jamais à grande échelle à l’ensemble de la population !! La plupart des individus détestent réfléchir tout court ou détestent réfléchir beaucoup, un petit peu réfléchir pour certaines choses qu’ils affectionnent c’est déjà beaucoup pour eux ! Beaucoup d’individus préfèrent les coups de fouet plutôt que de réfléchir, pour beaucoup réfléchir est une torture pire que les coups de fouet !

    1. Parti d'en rire

      – « Beaucoup d’individus préfèrent les coups de fouet plutôt que de réfléchir »
      T’en es d’ailleurs le parfait exemple.

  2. michel sourrouille

    Bga80 sur ce blog : « Il y aura toujours des armées, il y en a toujours eu, il y en a encore, et il y en aura toujours ! ».

    Il n’y avait pas d’armée du temps des société premières, l’armée ne résulte que de l’institutionnalisation d’un État dans une société qui se complexifie et de l’apparition d’une élite qui envoie les gens se faire tuer à leur place. Un État peut refuser l’armée. LeCosta Rica ne possède pas de force armée, il s’agit du premier pays à avoir supprimé son armée en 1949. En 2010, une trentaine d’États souverains peuvent être considérés comme ne possédant pas d’armée. Enfin si tous les citoyens se déclaraient objecteurs de conscience, opposé à l’usage des armes, il n’y aurait plus d’armée nulle part. En matière humaine, nous sommes maître des modalités de notre organisation, on ne peut jamais dire d’une institution qu’elle existe de tous temps et existera toujours.

    1. michel sourrouille

      Bga80 sur ce blog : « La majorité des gens adorent la hiérarchie et obéir ! La plupart des individus ont besoin d’un chef ».

      Il est vrai que notre société génère des dirigeants et des dirigés, des patrons et des ouvriers, des soldats et des gradés. Mais c’est le résultat d’une socialisation tronquée, personne n’est de naissance un être passif et dominé. C’est aussi le résultat d’un type d’organisation hiérarchique. Or au niveau économique il y a des coopératives qui fonctionnent sur le mode égalitaire, au niveau politique le système démocratique donne à tout citoyen le même pouvoir, au niveau familial le père n’est plus le chef de famille, etc. Le positionnement d’un individu dans la société n’est jamais défini une fois pour toute, on peut apprendre à désobéir à l’injustice et aux petits chefs.

      1. Ben si, il y aura toujours des dominants et des dominés ! Celles et ceux qui détiennent les connaissances et les savoirs-faire pour produire quelque chose, ce quelque chose peut être un bien physique, un service, une chanson, une film ou toute autre œuvre, etc obtiennent naturellement l’autorité sur les autres. Autrement dit, une coopération s’opère pour produire quelque chose, et les ignorants ou les peu formés ou même les peu intelligents vont consentir à l’autorité de ceux qui savent faire quelque chose ! Celui qui sait n’a même pas besoin de réclamer l’autorité, le troupeau va lui offrir sur un plateau ! Bien qu’en retour les dominés souhaitent une retombée dite répartition de la production des ces biens et services ainsi que œuvres.

      2. La seule exception de ceux qui ne savent rien faire mais obtiennent autorité sur un troupeau sont les politiciens, car leurs électeurs espèrent aussi des retombées dites de répartition mais de l’argent des autres ! (allocations à gauche, subventions à droite, et les centristes qui aiment manger à tous les râteliers alors ils réclament les deux)

  3. En matière de défense… le plus important que l’École se devrait d’apprendre à nos jeunes, c’est l’autodéfense intellectuelle. Autrement dit l’esprit critique.
    Rien à voir avec cet «esprit de défense» qui n’est rien d’autre que l’esprit guerrier, de compétition, le respect de la hiérarchie, la soumission au Chef, l’amour du Drapeau, des méRdailles etc. etc.
    – Petit cours autodéfense intellectuelle (Normand Baillargeon – 2006)

    1. Il y aura toujours des armées, il y en a toujours eu, il y en a encore, et il y en aura toujours !

      Tu es enfermé dans ta bulle idéologique bisounours, et tu crois qu’il s’agit de convaincre tous les individus sans exception à adhérer à ton point de vue bisounours idéologique !

      Or la majorité des gens adorent la hiérarchie et obéir ! La plupart des individus ont besoin d’un chef assis sur une chef de tennis pour les surveiller et pour les guider à accomplir des choses ! Rare sont les individus ayant le sens de l’organisation, de l’ingéniosité, de la stratégie, de la tactique et de la créativité pour accomplir des choses concrètes ! Alors ces individus qui sont dotés d’une ou de plusieurs de ces qualités obtiennent une autorité naturelle sur le reste du troupeau…

    2. J’ai des amis plus ou moins proches, d’autres de simples copains ou de copains/amis de mes amis etc. Et une certain nombre de ces gars se sont engagés à l’armée et adorent leur métier ! Mais certains m’ont admis que c’était plus simple pour eux d’obéir; comme ça ils n’ont pas à se prendre la tête. Beaucoup n’aiment pas réfléchir ou réfléchir trop, alors exécuter les ordres c’est plus simple pour eux afin de gagner leur croûte. D’autres encore adorent l’armée pour le maniement des armées, le sens du devoir de protéger le pays, le sport, la culture de la virilité, le milieu masculin dans le cadre du travail, de dépassement de soi, l’adrénaline et l’action, etc et encore d’autres raisons, car il n’y a pas de raison unique pour adhérer à l’armée. Dans tous les cas tu ne pourras rien y changer ! Et les armées ont encore de beaux jours devant elles ! Tu ne partages pas les valeurs de ces gars, mais eux ne partagent pas tes valeurs non plus !

    3. Mais si tu n’aimes pas l’armée, ben tu ne t’engages pas et puis c’est tout. C’est une aspiration individuelle de s’engager ou pas… Mais tu n’aboliras jamais l’existence des armées, c’est un combat vain. Tu perds ton temps à te fatiguer pour rien que de lutter contre leurs existences… Mais bon, si tu as envie de te fatiguer pour rien à des combats stériles, c’est aussi ton choix individuel que d’épuiser ton énergie inutilement ou pas…

      1. Parti d’en rire

        D’abord ce n’est à moi que tu devrais raconter tout ça, mais plutôt à Biosphère. Plus exactement à Michel Sourrouille, l’auteur de ces 100 pages non-violentes.
        Juste pour voir, si t’en as une paire, si t’es un warrior ou juste une fiotte… dis-lui à lui qu’il n’est qu’un bisounours. Je parie que t’es même pas cap.
        Maintenant si la majorité des gens adorent la hiérarchie et obéir, ont besoin d’un chef assis sur une chepakoi de tennis pour les surveiller et pour les guider à accomplir des choses (sic), alors parle-nous un peu de toi. Raconte-nous combien tu sors du lot, combien t’es au-dessus de la moyenne, combien t’es moins con que tous ces bœufs qui adoooorent marcher au pas, et patati et patata.

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