Le New York Times a supprimé son service Environnement en janvier*. Et en mars, le blog vert, « Green Blog ». Signe des temps ? Selon un rédacteur en chef, Dean Baquet, « les histoires environnementales relèvent à la fois de l’économie, des affaires, du national, du régional, parmi d’autres sujets. Elles sont complexes. Nous avons besoin de gens dans les différents services pouvant couvrir les différentes parties d’un sujet ». En gros, la décision découlerait de la nature transversale des sujets écologiques. Mieux vaudrait de l’écologie partout qu’un service spécialisé. Nous connaissons d’avance le résultat : dilution de l’urgence écologique puisque plus personne ne porte cette parole dans un système médiatique voué à la société de consommation et du spectacle.
Ce raisonnement est-il transposable à la vie partisane : a-t-on besoin d’un parti spécifiquement écolo puisque la préservation de la planète est global et seul digne d’un parti dit de gouvernement ? Rappelons que ce sont les associations environnementales qui ont poussé René Dumont à être candidat écolo aux présidentielles de 1974. René Dumont a accepté car il constatait l’impasse : « Ma candidature, c’est le résultat du mépris dans lequel ont été tenus les Français depuis dix ans, en ce qui concerne la gestion de leur environnement. A chaque élection, des écologistes en colère vont trouver les candidats des divers partis politiques. Ils sont reçus avec… une certaine condescendance. Voilà pourquoi le mouvement écologique devient politique. » Il fallait écologiser les politiques et politiser les écologistes. Presque quarante ans plus tard, nous avons au pouvoir un parti socialiste résolument anti-écolo ! EELV (Europe Ecologie – Les Verts) est donc toujours nécessaire, pour faire office d’aiguillon, pour montrer qu’il y a autre chose de plus en phase avec les réalités contemporaines qu’une politique social-démocrate qui cultive les aéroports…
Bien entendu cela ne suffit pas. Les fondateurs d’Europe Ecologie, JP Besset et D.Cohn-Bendit sont sceptiques : « Nous voulions dépasser la forme-parti, nous voulions ouvrir les Verts à la société civile… C’est resté un rassemblement de professionnels de la politique… Il ne s’agit plus pour Jean-Vincent Placé et ses proches d’aider à la transformation sociale ; il s’agit d’une affaire de gestion des élus et des postes… Placé sait mettre en réseau ses fidèles… Il aurait fallu une adhésion directe à Europe Écologie… Mais si on croit à la profondeur de la crise écologique, il faudra bien que quelque chose de neuf finisse par naître. »
Nous savons ce qu’EELV devrait faire : inciter ses militants et le reste de la société à la sobriété, revaloriser les liens avec les associations environnementales, tirer au sort les postes à pourvoir pour éviter les conflits, toujours garder en tête le vade-mecum de l’écologiste. Nous savons qu’EELV ne sait pas encore devenir un parti d’avenir…
* LE MONDE du 7-8 avril 2013, chronique écolo d’Hervé Kempf