L’écologiste condamne fermement tous les conflits armés, dévastateurs au niveau environnemental et humain. C’est pourquoi l’article 9 de la constitution japonaise constituait un joyau inestimable : « Chapitre II. Renonciation à la guerre (Article 9). Aspirant sincèrement à une paix internationale fondée sur la justice et l’ordre, le peuple japonais renonce à jamais à la guerre en tant que droit souverain de la nation, ou à la menace, ou à l’usage de la force comme moyen de règlement des conflits internationaux. Pour atteindre le but fixé au paragraphe précédent, il ne sera jamais maintenu de forces terrestres, navales et aériennes, ou autre potentiel de guerre. Le droit de belligérance de l’État ne sera pas reconnu. » Malheureusement les dérives nationalistes et bellicistes sont encore ancrées dans les mentalités. Le 1er juillet 2014 le gouvernement japonais a modifié l’interprétation de cet article 9 en donnant au Japon le droit de participer à des systèmes de défense collective*. Il s’agirait de faire de l’archipel un pays « normal ». Comme si le pacifisme était « anormal » ! Sans vote au Parlement ni débat public, le Japon va soutenir l’interventionnisme militaire américain et donner un mauvais signal à l’ensemble du monde asiatique et particulièrement à la Corée du Sud et à la Chine. Ah, si le parti écolo était aussi pacifiste que son premier représentant à la présidentielle 1974 !
L’écologiste René Dumont a milité toute sa vie pour un « pacifisme intégral et résolument non aligné ». Le fond de doctrine était résumé par deux citations : « Aucun des maux que l’on veut éviter par la guerre n’est un mal plus grand que la guerre elle-même (Bertrand Russel) » et « On croit mourir pour la patrie ; on meurt pour des industriels (Anatole France, 1922). » Faire la moindre concession à la guerre revient pour lui à encourager son développement : « les militaires sont la plus grande source de gaspillage, ils gaspillent du travail, de l’espace, de l’énergie, des minéraux rares, ils polluent les airs et les eaux » – montrent la force de ses convictions. « Il en coûterait cinq fois moins pour protéger la planète que pour continuer à préparer sa destruction… Réduction des dépenses d’armement jusqu’à leur intégralité. » Il entame la lutte contre toutes les armées, contre toutes les guerres. Nazisme ou pas, la guerre lui apparaît comme l’ennemie numéro un. Il s’abstiendra complètement pendant la Deuxième Guerre mondiale. Lui, le militant antifasciste, se retire dès qu’il faut prendre une arme, même pour son camp. Mêmes « populaires », les guerres lui font peur parce qu’il sait que ceux qui vont mourir un fusil à la main sont ceux qui ne pourront plus manier la faux ou pousser la charrue. Quelle que soit sa « compréhension » des révoltes, l’agronome en appelle systématiquement à des stratégies non-violentes à la Gandhi.
Lors de son enterrement le 19 juin 2001, la dernière volonté de René Dumont consista à faire entendre Boris Vian chantant « Le Déserteur ». Puisse son message être entendu par les écologistes du monde entier… alors que la France va célébrer les quarante ans de l’écologie politique.
* LE MONDE du 4 juillet 2014, Tokyo révise sa Constitution et s’autorise à mener des opérations militaires à l’étranger