Michael Crichton est mort, LeMonde du 8 novembre lui consacre deux-tiers de page. Est-ce mérité ? OUI si on en croit la vox populi mesurée par le nombre d’exemplaires vendus de ses romans comme Jurassik Park. NON si on possède un tant soit peu de rigueur intellectuelle et morale. Analysons son avant-dernier roman State of Fear (Etat d’urgence) publié en 2005.
Crichton y déblatérait à propos du changement climatique. Comme Bush junior, il pensait que le protocole de Kyoto était un mauvais choix parce que « personne ne peut en respecter les paramètres ». Mais surtout ne dites-pas de Crichton qu’il a écrit son livre pour soutenir la politique que Bush. Il n’a fait qu’obéir à une simple suggestion d’amis biologistes qu’il n’avait pas vu depuis trente ans. Grâce à eux, il s’est convaincu de sa lâcheté « à ne pas dire sa vérité ». Sa conclusion implicite : pas la peine d’agir contre l’effet de serre !!! Crichton se contentait de ce diagnostic fantaisiste : « Si l’activité humaine n’était responsable que d’un degré de plus, faudrait-il que la planète entière renonce, dès demain, au pétrole et au charbon ? ». Il est vrai que Bush junior, celui dont l’histoire dira qu’il a mené une politique criminelle, l’a complètement conforté dans son analyse : « Nous sommes d’accord, les rapports des scientifiques ne sont pas toujours très solides. Mais comment en convaincre les gens ? » Ces deux lascars se voulaient donc beaucoup plus fort que les centaines de scientifiques qui ont participé au GIEC (groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat). La communauté scientifique converge pour annoncer un réchauffement moyen de la planète compris entre 1,5 et 4° d’ici 2100, Crichton se moque : « Si un gouvernement osait publier des projections budgétaires pour le siècle à venir, tout le monde rigolerait ».
Contre cette accumulation d’inepties, LeMonde se contente de cette phrase neutre : « Crichton conteste l’existence du réchauffement climatique avec force courbes et graphiques ». Encore une fois LeMonde a failli à son devoir de formation des lecteurs. Ce n’est pas parce qu’une personne est morte qu’elle doit échapper à la critique.
Je me permets de vous signaler le titre de votre article qui est : « Crichton est mort, enfin ! ». C’est ce à quoi je faisais allusion en parlant de « mériter la mort », car vous parlez de la mort de ce brave écrivain comme d’une sorte de soulagement personnel. C’est assez choquant, quelles que soient vos divergences avec l’auteur en question.
Ce que je voulais dire sur les américains, c’est qu’il est arrivé souvent dans l’histoire qu’ils ne signent pas un traité mais qu’ils ne le respectent pas plus ou moins que ceux qui le signent. Vaut-il mieux signer un traité en projetant de ne le respecter qu’à moitié ou ne pas le signer et… le respecter à moitié. Qu’est-ce qui vous semble le plus honnête ? Le plus rationnel ? Les habitants du Qatar (qui a ratifié) produisent trois fois plus de dioxyde de carbone par tête que les américains (qui s’y sont refusé). Quels sont les pays qui réduisent le plus vite leurs émissions de gaz à effet de serre ? Est-ce proportionnel à la signature ? Quand vous apprenez que l’Iran et la Lybie sont les premiers à signer tout texte sur les droits de l’homme et que les US s’y refusent, déduisez-vous que les américains respectent moins les droits de l’homme que les dictatures moyen-orientales ? Les américains sont légalistes, c’est une mentalité spéciale, avec ses vertus et sa perversité (quand on envoie des prisonniers sur une île non américaine pour pouvoir pratiquer la torture…). Très différent de chez nous en tout cas.
Obama ne fera pas de miracles, on peut difficilement prendre des mesures anti-voiture quand une boite aussi symbolique que General Motors coule.
« Ce n’est pas parce qu’une personne est morte qu’elle doit échapper à la critique » ne veut certainement pas dire « Donc une opinion qui ne bêle pas avec la doxa mérite la mort ». La déformation des propos est un obstace à un véritable échange constructif.
Quant au protocole de Kyoto, qui est un minimum de ce qu’il faudrait faire contre les GES, le fait qu’il ne soit pas appliqué est causé par le manque de volonté humaine, pas par la fatalité. Quand les Américians veulent mener la guerre partout dans le monde, ils le peuvent. Si Obama décidait d’interdire les 4×4 et de brider les moteurs, il pourrait le faire.
Donc une opinion qui ne bêle pas avec la doxa mérite la mort ? Bigre ! Si l’écologie devient une question mystique, religieuse, c’est à dire fermée à tout échange, tout dialogue, toute réfutation, alors je me demande en quoi c’est mieux que d’autres religions.
Je n’ai pas lu le livre de Crichton sur l’effet de serre, mais pour moi ce phénomène difficile à obserer a été monté en épingle par l’industrie automobile et pétrolière pour faire oublier à chacun l’essentiel : les particules qui nous empoisonnent. Enfin c’est une hypothèse (je ne suis pas environnementaliste je ne peux pas le prouver).
Une chose quand même : Crichton a absolument raison s’il dit qu’il est absurde de voter des textes inapplicables. C’est la mentalité américaine (sans question de couleur politique) pour qui un traité signé devient une loi. Si les pires dictatures du monde signent les yeux fermés des textes sur les droits de l’homme que les US se refusent à parapher c’est parce que, pour eux, c’est sérieux, ça implique des choses à tous les niveaux de l’état. Simple question de comm’ donc, on a un pays qui se refuse à voter ce qu’il n’appliquera pas, d’autres qui le font avec plaisir, mais le résultat reste le même : personne ne fera rien.