« Au faits, ils ont parlé de la crise écologique, à la manif ? ». C’est par ces mots qu’Hervé Kempf conclut sa chronique (LeMonde du 22-23 mars). Le syndicalisme en France est faible numériquement, et pourtant c’est le seul pays de l’Union européenne où on se mobilise autant dans la rue. C’est dire que les revendications pour le pouvoir d’achat ou contre le bouclier fiscal vont être oubliées aussitôt qu’annoncées. Vu la multiplicité effroyable des organisations syndicales, de toute façon il ne pourrait pas y avoir de mot d’ordre unitaire dans les manifestations françaises.
Hervé Kempf est donc perspicace en proposant aux syndicats un slogan social qui considèrerait aussi la composante écologique de notre niveau de vie : imposer le RMA (revenu maximal autorisé) pour lutter contre le délire consommatoire des riches qui se diffuse dans toute la société et épuise la Biosphère. Rappelons-nous ce qu’écrivait déjà Hervé dans son livre de 2007, Comment les riches détruisent la planète :
« Qui aujourd’hui, consomme le plus de produits matériels ? Les hyper riches ? Pas seulement. L’oligarchie ? Oui, cela commence à faire nombre mais ne suffit pas encore. Il y a aussi la classe moyenne mondiale, disons 500 millions de gens (il y a de fortes chances que vous en fassiez partie) qui réduiraient utilement leur consommation matérielle, leurs dépenses d’énergie, leurs déplacements automobiles et aériens. Mais nous limiterions notre gaspillage, nous chercherions à changer notre mode de vie, tandis que les gros, là-haut, continueraient à se goberger dans leurs 4×4 climatisés et leurs villas avec piscine ? Non. La seule façon que vous et moi acceptions de consommer moins de matière et d’énergie, c’est que la consommation matérielle, donc le revenu, de l’oligarchie soit sévèrement réduite. En soi pour des raisons d’équité, et plus encore, en suivant la leçon de Veblen, pour changer les standards culturels de la consommation ostentatoire. Puisque la classe de loisir établit le modèle de consommation de la société, si son niveau est abaissé, le niveau général de consommation diminuera. Nous consommerons moins, la planète ira mieux, et nous serons moins frustrés par le manque de ce que nous n’avons pas. » (p.90-91)