LeMonde du 29 avril consacre un supplément à un forum, Réinventer la démocratie. Selon Dominique Bourg, à « une population mondiale de 9 milliards d’individus au milieu du siècle s’opposera une planète exsangue. La démocratie moderne est inséparable des possibilités en apparence infinies de la puissance des technologies et du marché. La démocratie à venir devra en revanche accorder cette même puissance à un monde fini, bondé et fragile. Il va nous falloir apprendre à borner le pouvoir des individus par un autre pouvoir. Il serait possible d’imaginer une forme de bicamérisme avec une chambre haute destinée à légiférer exclusivement au sujet des grands enjeux de la biopolitique. Il serait également imaginable de jouer sur la dualité de la tête de l’exécutif pour transformer le président de la République en garant du long terme. »
Je ne crois pas aux vertus du bicamérisme qui entraîne lenteurs et contradictions dans les décisions alors que les enjeux du long terme comme le pétrole ou le climat exigent des décisions immédiates. Je ne crois pas à la soudaine volonté bio-politique d’un président français ou américain car il ne pourrait pas être élu avec un programme de limitation de notre pouvoir. Je crois davantage aux invisibles de la représentation.
Pour Loïc Blondiaux dans le même supplément, il s’agit seulement des jeunes, ouvriers ou chômeurs « presque aussi nombreux à s’abstenir qu’à voter ». Pour une considération bio-politique, il s’agit de ce que la théorie appelle déjà les tiers-absents, à savoir les générations futures et les non-humains. Ces deux catégories en effet n’ont aucun droit de vote, ils ne peuvent que s’abstenir dans les choix démocratiques actuels qui sont pourtant trop souvent opérés à leur détriment. Il faudrait donc que le citoyen conscient prenne ses décisions de producteur, de consommateur, d’électeur ou d’élu en s’exprimant à la place des tiers-absents, comme un avocat s’exprime au nom de la victime. En résumé, nous devrions penser et agir en privilégiant les équilibres à long terme, que ce soit dans la société humaine ou dans nos relations avec les écosystèmes. Nous avons dorénavant très peu de temps pour modifier complètement notre conception du monde…