Lorsque Christophe Colomb se rendit à terre avec son équipage, les Arawaks s’empressèrent de les accueillir en leur offrant eau, nourriture et présents. Colomb écrit plus tard dans son journal de bord : « Ils étaient bien charpentés, le corps solide et les traits agréables… Ils feraient d’excellents domestiques… Avec seulement cinquante homme, nous pourrions les soumettre tous et leur faire faire tout ce que nous voulons. » Par la suite, les Indiens ont été les victimes de la force brutale des Blancs. La plupart des manuels d’histoire aux USA passent rapidement sur tout cela. Si on fait un tour d’horizon des manuels scolaires des collèges et du primaire, on découvre un Jackson héros de la Frontière, soldat, démocrate, homme du peuple… Rien sur le propriétaire esclavagiste, le spéculateur foncier, l’exécuteur de soldats séditieux ou l’exterminateur d’Indiens. Les faits parlent d’eux -mêmes. Dès que Jackson devint président en 1829, le décret sur le déplacement des Indiens fut soumis au Congrès. Le déplacement des Indiens fut justifié en ces termes par Lewis Cass, secrétaire à la guerre : « Nous luttons tous, dans la longue carrière de la vie, pour acquérir abondance d’honneurs, de pouvoir ou tout autre objets dont la possession servira à la satisfaction des désirs nés de notre imagination. La somme de ces efforts garantis le progrès de la société. Il semble que rien ou presque de tout cela ne soit dans la nature de nos sauvages. » En tant que gouverneur du Michigan, Cass s’empara de centaines de milliers d’hectares appartenant aux Indiens. Il aurait souhaité que tout cela se fut accompli « au prix de sacrifices moindres et que la population indigène s’adaptât au changement inévitable de sa condition ». Mais, rajoutait-il, « cet espoir est vain. Un peuple barbare, dépendant pour sa subsistance des produits aussi chiches que précaires de la chasse, ne peut survivre au contact d’une communauté civilisée ».
Dans son livre The Disinherited, Dale Van Every résume ce que le déplacement signifiait pour les Indiens. « Dans la longue histoire des méfait de l’homme, l’exil a tiré des cris d’angoisse à bien des peuples. Néanmoins, il n’a jamais eu d’effets plus terribles que sur les Indiens de l’Est américain. L’indien était particulièrement réceptif à l’aspect sensoriel du moindre élément naturel de son environnement. Il vivait à l’air libre. Il connaissait tous les marais, toutes les clairières, tous les rochers et ruisseaux, comme seul un chasseur peut le faire. Il aimait cette terre avec une émotion plus profonde que celle de n’importe quel propriétaire. Il se considérait lui-même comme lui appartenant, sa patrie c’était la terre sacrée. Il appartenait à cette contrée battue par la pluie et à laquelle il était lié par les coutumes de ses aïeux et ses propres aspirations spirituelles. Mais il en fut expulsé vers les plaines rases et arides de l’Ouest lointain. » Chief Luther Standing écrivit en 1933 dans son autobiographie : « C’est vrai, l’homme blanc a apporté de grands progrès. Mais si les fruits de sa civilisation brillent de mille feux et sont terriblement désirables, ils n’en sont pas moins empoisonnés et mortels. Et si le rôle d’une civilisation est de mutiler, voler et s’opposer à autrui, alors où est la progrès ? Laissez-moi penser que l’homme assis sur le sol de son tipi, méditant sur la vie, acceptant la nature de toute chose et assumant son unité avec l’univers, incorporait en lui la véritable essence de la civilisation. »
Ces extraits sont tirés du livre de Howard Zinn qui retrace l’histoire populaire des Etats-Unis de 1492 à nos jours. Il montre l’histoire du capitalisme telle qu’on a voulu nous la cacher, faite de rapines et de spoliations. Un autre livre du même auteur est aussi à lire absolument, Désobéissance civile et démocratie : « Lorsqu’on se penche sur la longue et sinistre histoire de l’homme, on réalise qu’il s’est commis plus de crimes abominables au nom de l’obéissance qu’au nom de la révolte. Nos cultures ont inventé de fausses catégories telles que la race ou la nation qui nous empêchent de nous penser comme une seule et même espèce et entraînent de ce fait une certaine hostilité réciproque qui s’extériorise par la violence. Aucun animal, en dehors de l’homme, ne fait la guerre…»
Quand le chef black Hawk fut vaincu en 1832, il fit ce discours de reddition : « Les hommes blancs venaient, année après année, pour tromper les Indiens et s’emparer de leurs terres. Les indiens ne sont pas malhonnêtes. Les hommes blancs disent des mensonges sur l’Indien et les traitent avec mépris. Mais l’Indien ne ment pas et ne vole pas. Les hommes blancs sont de mauvais maître d’école. Ils apportent des livres menteurs et agissent mal. Ils se sont installés parmi nous, comme le serpent. Ils nous ont empoisonné par leur simple contact. Adieu ma nation ! Adieu à Black Hawk ! »