Les végétariens nous ont racontés des salades

Lierre Keith est née en 1964. Son livre « Le mythe végétarien »* est paru initialement sous le titre The Vegetarian Myth : Food, Justice, and Sustainability. Elle a été végétalienne (vegan en anglais) pendant 20 ans, ce qui donne une force particulière à sa critique du végétarisme. En résumé : Pas d’animaux sans végétaux mais les végétaux ont aussi besoin des animaux, et les herbivores ont besoin des carnivores. Il n’y a pas de hiérarchie, nous prenons notre tour dans les cycles de matière et d’énergie. Les humains ont évolué pendant 200 000 ans au moins comme chasseurs-cueilleurs. Leur nourriture à base de fruits, de noix et de viande a été déterminante pour leur physiologie. Les Eskimos, réputés pour leur très faible taux de maladies cardio-vasculaires ne connaissent pas le cancer alors que leur régime comprend 80 % de graisse animale. Le début de l’agriculture (la révolution néolithique) est perceptible pour le paléoanthropologue par son impact sur les ossements (infections et insuffisances osseuses, tuberculose, rachitisme, caries dentaires, petite taille adulte…). Avec l’agriculture, pour laquelle nos corps n’étaient pas préparés, sont apparus l’arthrite, le diabète, l’hypertension, les maladies cardiaques, la dépression, la schizophrénie et le cancer ainsi qu’une série de maladies auto-immunes et inflammatoires. Toutes ces maladies sont communes chez les civilisés et rarissimes chez les chasseurs-cueilleurs. Le cerveau est très gourmand en nourriture. Quand nos ancêtres habitaient les arbres, ils avaient déjà un régime varié avec des fruits, des feuilles, des insectes. Les chimpanzés restés arboricoles sont friands de sources de protéines animales. Quand les primates se sont adaptés à la savane ils ont commencé à manger de gros herbivores, ainsi que l’atteste la composition et l’usure des dents des australopithèques. Notre cerveau est devenu plus gros et notre tube digestif 60 % plus petit. Les gorilles, qui sont strictement végétariens, ont le plus petit cerveau et le plus gros tube digestif de tous les primates.

Les végétariens sont animés du désir (estimable) de protéger la vie, mais semblent ignorer ou censurer une notion importante : la vie n’est pas possible sans la mort. Quoi que vous mangiez, un être vivant a dû mourir pour vous nourrir. Cette loi de la nature est aussi valable pour les végétaux, les champignons, ou les bactéries. Les animaux que veulent protéger les végétariens occidentaux sont des mammifères, des oiseaux, au mieux d’autres vertébrés mais cette hiérarchisation du vivant résulte d’un anthropocentrisme primaire. L’agriculture avec ses monocultures annuelles et son labour détruit le sol et la biodiversité, c’est le biocide systématique. Dans certaines régions au climat favorable comme l’Europe et le Japon, avec des pluies suffisamment étalées au cours de l’année, la rotation des cultures de céréales avec les pâtures a permis de maintenir le sol mais cela implique des animaux domestiques. Une agriculture végétalienne, sans animaux, résulte en un saccage écologique. Pourtant fertiliser avec du fumier n’est pas moralement acceptable par les végétariens éthiques qui considèrent la domestication comme une exploitation, ni par les végétariens politiques qui pensent que toute la terre cultivable doit être dédiée à la culture de céréales annuelles. De nature, les humains et les ruminants ne sont pas en compétition pour le même repas, contrairement au discours des végétariens politiques. C’est la logique industrielle qui a installé la compétition. Les végétariens politiques ignorent les méthodes d’élevage autres que les méthodes industrielles, ils ne semblent pas savoir que les vaches mangent de l’herbe et que le sol mange les bouses des vaches. Quelle que soit la noblesse de leurs intentions, ils projettent un régime alimentaire planétaire en complète ignorance de l’origine de la nourriture. Lorsque les végétariens prétendent, par exemple que la Grande-Bretagne pourrait nourrir 250 millions d’individus suivant un régime totalement végétarien, ils se basent sur les chiffres d’une production qui n’est possible que par l’usage d’engrais issus de combustibles fossiles. Les méfaits du soja sont multiples. A part l’aide apportée aux moines orientaux pour leur faciliter l’abstinence sexuelle, le soja, une source de protéines végétales, n’a que très peu d’avantages. Il se défend contre les prédateurs en inhibant leur trypsine et en freinant leur reproduction. Ses effets sur le cerveau sont dramatiques.

Selon l’association britannique Vegfam, une ferme de 4 ha peut nourrir 60 personnes qui cultivent le soja, 24 personnes qui cultivent le blé, 10 personnes cultivant le maïs et seulement 2 élevant des bovins. Ce calcul fait l’impasse sur la destruction du sol. Un des leaders de la consommation locale et de l’agriculture durable, Joel Salatin, sur 4 ha en Virginie, produit : 3000 oeufs, 1000 poulets, 80 poules, 900 kg de boeuf, 1500 kg de porc, 45 dindes, 50 lapins et ajoute plusieurs cm de sol vivant. C’est suffisant pour nourrir au moins 9 personnes et les maintenir en bonne santé.

Ghislain Nicaise (résumé de son article)

* Le Mythe végétarien de Lierre Keith, aux éditions pilule Rouge (2013)

4 réflexions sur “Les végétariens nous ont racontés des salades”

  1. de la part d’un correspondant : Depuis ces dernières années, je suis passé de flexitarien à presque végane et je planche surtout sur l’antispécisme. Eh bien sachez qu’il est difficile de rencontrer un antispéciste qui accepte d’intégrer l’écologie dénataliste dans sa pensée. Les deux (le végétalisme et la surpopulation par l’occupation des niches des autres espèces) faisant (pour moi) la paire, n’est-ce pas tout dire ? À l’inverse, qui continue, au sein des dénatalistes pur jus, de suivre le régime omni, pour le moins inutile, nocif, irrespectueux et d’une empreinte écologique que l’on sait désastreuse ?

  2. J’imagine que cet article les fera bondir.
    C’est vrai que ces gens-là ne manquent pas de paradoxes. Nous en avons tous certes, mais quand même ! Ils vous parlent d’agriculture alors qu’ils n’en connaissent généralement pas grand chose. Les chenilles et autres ravageurs ailés passe encore, mais quant on leur parle des taupes et des mulots, là ils sont bien embêtés. Qu’ils nous montre comment faire pousser des salades en étant gentil avec les limaces. Et quand on leur parle du reste ce n’est pas mieux. Les végés n’ont pas banni la sacro-sainte bagnole pour autant ; comme tout le monde ils percutent des papillons, des oiseaux, écrasent des grenouilles et des hérissons . Ils ne refusent pas non plus de prendre l’avion, et tant pis pour les pauvres oiseaux qui passent dans les réacteurs, toute cette faune qui a péri sous les bulldozers qui ont saccagé la nature pour construire les aéroports, etc. etc .
    Ceci dit, il est évident que nous mangeons trop de viande. Et surtout que nous mangeons trop de junk-food et finalement pas assez de qualité.

  3. Il est impératif que le production d’aliments animaux diminue fortement.

    Il est également impératif de réduire fortement le pesticides tueurs d’insectes et abîmant énormément les sols et la biosphère.

  4. Il est impératif que le production d’aliments animaux diminue fortement.

    Il est également impératif de réduire fortement le pesticides tueurs d’insectes et abîmant énormément les sols et la biosphère.

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