Nous nous sommes plantés… depuis combien de temps ?

Aujourd’hui notre société cultive la démesure, au niveau démographique bien entendu, mais aussi dans tous les domaines, y compris au niveau des dictionnaires et de ses substituts. Nous avons un livre de référence pour chaque chose et cela ne suffit plus. Peu de jeunes ouvrent actuellement un dico pour valider ou non « l’ortograf » d’un mot. On écrit comme on parle, beaucoup, souvent ou tout le temps : tweet de moins de 140 caractères ou sms abrégé. Quand on veut approfondir, on n’ouvre plus une encyclopédie, on entre dans la cyber-poubelle grâce à un moteur de recherche. Miracle de l’hypertexte, tu peux alors tout connaître sur tout, mais à toi de te débrouiller pour retrouver l’essentiel, tâche devenue quasi-impossible. Nous sommes étouffés par la multiplication infinie des informations qu’autorise l’informatisation du monde. C’est pourquoi j’espère par ce livre* t’aider à faire le point sur les relations fondamentales qu’il peut y avoir entre notre propre vécu et les réalités complexes de la biosphère.

Dans ce livre, il faut le dire, je ne veux rien te cacher. Même pas ce qui peut te paraître trop radical et incongru. Je regrette par exemple les sociétés où on n’avait pas besoin de l’alphabet. On ne savait ni lire, ni écrire, ni compter, on se contentait de vivre, tout simplement. La première écriture officiellement reconnue est inventée par les Sumériens vers 3300 ans avant Jésus-Christ. Elle avait un but avant tout utilitaire : il s’agissait pour les citadins commerçants de gérer les entrées et les sorties de marchandises et de troupeaux. Les débuts de l’écriture répondaient à des fonctions comptables et commerciales, elles soutenaient par la même occasion un certain type de pouvoir économique. Dans des sociétés complexes et hiérarchisées, l’écrit restera par la suite l’instrument privilégié du pouvoir. Selon le cardinal de Richelieu (1585-1642), apprendre à lire, écrire et compter « remplit le pays de chicaneurs propres à ruiner les familles et troubler l’ordre public, plutôt qu’à procurer aucun bien ». Nos jeunes ont pourtant tous appris à lire, écrire ou compter à partir du XIXe siècle, mais il n’y a pas eu de révolution culturelle, seulement soumission à un autre conformisme, principalement marchand. On a vidé les campagnes de leurs paysans en les envoyant à l’école, ils se sont mis de gré ou de force au service de la révolution industrielle et de sa civilisation thermo-industrielle. Je rêve d’un retour à la civilisation orale, où on se transmet les discours essentiels de génération en génération. Je rêve d’un monde simplifié en harmonie avec la planète. Il est préférable de jouir des activités réelles plutôt que de se noyer dans l’écriture (ou la lecture), même s’il y a une véritable griserie du lecteur (de l’écrivain).

Aujourd’hui nous sommes tous, quoi qu’on fasse, plus ou moins complices du pillage de la biosphère. Ce livre correspond aussi à un arbre qu’on abat. Même un simple clic sur google émet du gaz à effet de serre, environ 7 grammes ; il y avait déjà 3,4 milliards d’internautes en 2016. De mon côté j’utilise Internet pour dire qu’il faut supprimer Internet. Oui je suis radical, mais au sens étymologique de « prendre les choses à la racine ». Il faut agir sur les causes profondes de nos malheurs, sinon on ne règle les choses que de façon superficielle et temporaire. Et j’assume mes propres contradictions en écrivant ce livre… L’utopie est le but à atteindre, mais les chemins pour y arriver sont actuellement très escarpés.

*« On ne naît pas écolo, on le devient » de Michel Sourrouille aux éditions Sang de la Terre, 192 pages, 16 €

2 réflexions sur “Nous nous sommes plantés… depuis combien de temps ?”

  1. Comme je l’ai dit il y a deux ou trois jours, aujourd’hui les bibliothèques croulent sous le poids des bouquins, et comme le dit Biosphère « Nous avons un livre de référence pour chaque chose et cela ne suffit plus » .
    En effet ça ne suffit pas puisque Michel Sourrouille se sent obligé, lui aussi, de venir en rajouter avec son bouquin à 16€. A la différence de celui de Cyril Dion le sien devrait paraît-il m’aider à « faire le point » , il devrait m’aider à « retrouver l’essentiel ». C’est vrai que je suis un peu perdu au milieu de ce fatras d’infos plus ou moins contradictoires qui m’arrivent de toutes parts. Sauf qu’en matière de boussole j’ai déjà ce qu’il faut, Platon et Sénèque fonctionnent encore très bien. Quant aux petits manuels, qu’ils soient de cuisine, de bricolage ou de résistance … là aussi, je n’ai pas besoin de plus. Dans ce registre je ne conseillerais jamais assez le « Petit cours d’autodéfense intellectuelle » de Normand Baillargeon.
    Révolution culturelle ou soumission à un autre conformisme, peu importent les mots, personnellement je rêve d’un monde de lettrés, d’un monde où les gens seraient capables de comprendre des idées complexes, vieilles pour certaines de plus de deux milles ans. Je rêve d’un monde où les gens seraient capables de penser par eux-mêmes, d’un monde géré par de véritables citoyens qui rigoleraient de nos pléonasmes actuels genre « éco-citoyen-responsable »… et en même temps… de tous nos imbéciles et de toutes nos imbécilités qui rempliraient les livres d’histoire. Je rêve d’un monde de joie de vivre et de véritables plaisirs : parties de boules et de jambes en l’air bien sûr, discours socratiques, réflexion, lecture, poésie 😉 et j’en passe.

    De mon côté moi aussi j’assume mes contradictions, je vais sur Internet pour dire à certains qu’ils nous bourrent le mou, qu’ils vont à l’encontre de la cause qu’ils prétendent défendre, et ce faisant j’apporte de l’eau à leur moulin.

  2. Ce qui est certain c’est que l’état de la planète au temps des sociétés pré-écriture était bien meilleur et que probablement, l’humanité avait devant elle un avenir plus riant. C’est un des éléments à verser au débat.

    Nous sommes sur une mauvaise pente et malheureusement, toutes ces choses a priori aussi belles et aussi riches que la culture pour tous, un niveau de vie et de confort matériel globalement supérieur (encore que…) ne sont pas garantes d’un futur plus heureux, probablement au contraire car elles sont inévitablement liées à d’autres phénomènes destructeurs comme notre pouvoir sur la nature.
    Le monde est plein de contradictions.

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