le Heartland Institute et les lanceurs d’alerte

La démocratie dans un système complexe comme le nôtre repose sur la transparence totale de ceux qui agissent sur l’opinion publique. Le Heartland Institute devrait révéler ses sources de financement (grandes entreprises, fondations, etc.), les noms des « experts » et des blogueurs qu’il rémunère pour propager la parole climato-sceptique, ainsi que ses projets pour asseoir auprès des enseignants et des élèves américains l’idée fausse que le changement climatique est « incertain » et scientifiquement « controversé ». Il ne l’a pas fait, nous n’avons connu ces éléments d’information utile à la démocratie uniquement parce qu’un éminent hydrologue Peter Gleick, a reconnu avoir obtenu ces documents internes au Heartland Institute de façon non conventionnelle.

Mais au lieu de se féliciter que les noirs dessins du Heartland Institute soient connus de tous, Gleick estime qu’en ayant vérifié la validité des informations qu’on lui avait transmises anonymement, il a commis « une grave faute vis-à-vis de lui-même et de son éthique ». Il présente ses « excuses personnelles » à « ceux qui ont été affectés » par son geste. Il devrait au contraire se féliciter de son action contre des personnages qui utilisent  l’argent, le mensonge et la désinformation pour affecter le  climat et infecter l’opinion publique. Peter Gleick est un lanceur d’alerte, il devrait même être protégé contre toute menace de rétorsion. Peter Gleick est d’autant plus clean que le Heartland Institute – qui proteste aujourd’hui avec virulence contre la publication des documents qui lui ont été dérobés –, avait été l’une des principales caisses de résonance, en novembre 2009, de l’affaire dite du Climategate. Ils avaient alors utilisé les courriels piratés de climatologues*.

Corinne Lepage avait rendu en 2008 un rapport sur l’information environnementale, l’expertise et la responsabilité. L’information du public y est considérée comme un devoir, ce qui implique un « devoir d’alerte », accompagné de la création d’un « délit de rétention d’information quand le risque est avéré ». Merci Peter Gleick.

* LEMONDE.FR | 21.02.12 | L’origine de la fuite des documents du Heartland Institute a été révélée