Sur le blog éco(lo) d’Audrey Garric : « L’étendue des glaces de l’Arctique, l’un des éléments clés du thermostat de la planète, vient de battre un triste record : son plus bas niveau depuis le début des observations par satellite en 1972… Selon les deux équipes de scientifiques, la fonte de la glace de mer prouve l’importance de l’impact des activités humaines sur le climat au cours des dernières décennies. » Comme il était prévisible, les très méchants qu’on appelle climatosceptiques ou « négationnistes du climat » se déchaînent sur le monde.fr :
« Vous comprenez pourquoi on est sceptique ? C’est parce qu’il n’existe pas de preuve et qu’en face on nous explique que manger deux fois de la viande par jour fait monter la température du climat et déborder les océans. Je ne sais pas si ce n’est pas bien de manger souvent de la viande, mais je suis sûr que cela est moins important sur le climat que l’effet du soleil… Pourquoi on ne compare pas cela avec les cycle du soleil qui en ce moment est à son paroxysme d’activité… S’il est vrai que les surfaces englacées sont en recul, on ne peut pas dire que ce soit neuf ni dramatique… Oui, il y a un réchauffement climatique. Est-ce que celui-ci est lié à l’homme ? Cela n’est pas démontré. Etc. »
Nous constatons que ces négationnistes veulent ignorer les travaux du groupe international d’experts sur le climat (GIEC) qui, bien entendu, a comparé causes solaires (entre autres) et cause anthropique du réchauffement climatique. Mais plus que la mauvaise foi, ce qui nous choque c’est ce genre de points de vue : « Faire culpabiliser les terriens c’est pas bien… On a assez de soucis dans notre temps présent pour se soucier d’un hypothétique futur… Votre discours sur les générations à venir n’est que du blabla… POURQUOI SE SOUCIER DU CLIMAT POUR LES GENERATIONS FUTURES ? Celles d’avant la nôtre n’en avait cure et ils avaient bien raison. Les choses viennent en leur temps. »
D’abord il ne s’agit pas de culpabiliser, mais juste d’ouvrir les yeux ! Il nous paraît normal que l’enfant qui fasse une faute culpabilise pour intérioriser le fait qu’il lui faut agir différemment ; ainsi il n’a pas besoin du panpan culcul ! Il manque aux climato-sceptiques une bonne fessée. Ensuite le mépris total manifesté par certains à l’égard des enfants de nos enfants est certes possible, mais désespérant. Oui, la génération actuelle qui possède une voiture et manipule des écrans est choyée grâce à l’énergie fossile qui lui procure pour l’immédiat son bien-être matériel. Est- ce cela vivre ? Le passé, le présent et le futur sont des concepts qui n’existent pas l’un sans l’autre. Notre intelligence humaine peut comprendre que le passé façonne notre présent et que le présent conditionne notre futur. Or nous savons déjà que chaque combustion d’une énergie fossile entraîne une planète de moins en moins vivable pour les humains et pour les ours polaires. Est-ce cela que les climatosceptiques désirent ?
La presse anglo-saxonne, principal porte-voix des climatosceptiques
Dans le combat que mènent une poignée de climato-sceptiques pour nier l’évidence partagée par des milliers de scientifiques – le réchauffement anthropique -, l’attention que leur accordent ou non les médias est cruciale. L’Institut Reuters pour l’étude du journalisme a examiné plus de 3 000 articles publiés dans six pays : Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Inde et Brésil. Pour chacun d’entre eux, ils ont pris soin de sélectionner deux journaux de positionnement opposé, l’un plutôt à gauche, l’autre à droite. Dans le cas de la France, Le Monde et Le Figaro ont été retenus. Ils ont par ailleurs concentré leur enquête sur deux périodes très sensibles : la première, entre février et avril 2007, correspond à la publication du quatrième rapport du GIEC. La seconde, entre novembre 2009 et février 2010, chevauche la conférence des Nations unies sur le climat de Copenhague.
« Dans plus de 80 % des cas où la voix des sceptiques est citée, il s’agit d’un journal anglais ou américain », souligne l’étude. Et elle l’est d’autant plus, toujours pour ces deux pays, que le média est proche des mouvements conservateurs. Ce lien n’est pas observé en France, où Le Figaro et Le Monde ont accordé une place assez comparable aux climatosceptiques (moins de 10 %). En France, le nombre d’articles citant le point de vue climatosceptique a baissé entre 2007 et 2010, passant de 8 % à 5 %, alors qu’il a doublé aux Etats-Unis (de 17 % à 35 %). La présence à l’intérieur de la droite américaine d’un courant climatosceptique organisé est une des différences avec d’autres pays comme la France ou le Brésil.
Article paru dans l’édition du MONDE 12.11.2011
Le réchauffement confirmé grâce à l’argent du pétrole
Charles Koch, patron de Koch Industries – gigantesque conglomérat pétrochimique américain -, n’en a pas eu pour son argent. Voilà quelque dix-huit mois, celui qui est l’un des principaux soutiens financiers des organisations climato-sceptiques américaines accordait une bourse de recherche à un groupe de chercheurs réunis autour de Richard Müller, physicien à l’université de Californie à Berkeley. Si Richard Müller ne s’est jamais réellement rangé dans la catégorie des climato-sceptiques, il a souvent entretenu l’ambiguïté dans ses déclarations ou ses articles de vulgarisation. Ambiguïté sans laquelle, de toute évidence, il n’aurait jamais obtenu le moindre dollar de Charles Koch.
Attendus avec fébrilité, les résultats viennent d’être rendus publics ; ils sont extraordinairement « décevants ». Ils montrent que, depuis cinquante ans, la température moyenne de la basse atmosphère s’est bel et bien réchauffée de 0,9 °C au-dessus des terres émergées. La courbe reconstruite par M. Müller et ses coauteurs épouse ainsi à plus de 95 %, les trois autres, établies indépendamment par le Goddard Institute for Space Studies, le National Climatic Data Center américain et par le Hadley Centre de l’université d’East Anglia (Royaume-Uni). Richard Müller et ses coauteurs ont ainsi travaillé d’arrache-pied pendant de longs mois pour… confirmer les travaux de trois autres laboratoires.
Le plus cocasse est que, loin de montrer que les précédentes analyses étaient alarmistes, les résultats du Berkeley Earth Surface Temperature suggèrent qu’elles sont, au contraire, trop « conservatrices ». En regardant les courbes à la loupe, on observe en effet que la nouvelle est souvent très légèrement au-dessus des trois autres…
Stéphane Foucart
Article LE MONDE paru dans l’édition du 26.10.11