Dans lemonde.fr, plus de 60 réactions à cet article* : Pénurie de carburants : la France a frôlé la « catastrophe économique » (pendant le conflit des retraites). Nous répondons à quelques-uns de ces commentaires :
– « Borloo futur premier sous-ministre agite la peur des grévistes. Pourtant ce ne sont pas eux qui ont mis en péril l’économie mais la cupidité des spéculateurs. »
La crise financière était causée par le surendettement des ménages, pas directement par les spéculateurs. La pénurie provisoire de carburant n’était que broutille par rapport au quatrième choc pétrolier que nous connaîtrons bientôt, quand les spéculateurs se seront rendus compte qu’on a dépassé le pic pétrolier**.
– « Bon… on a évité une catastrophe économique. J’espère qu’en n’envoyant pas Mr Borloo à Matignon on en évitera d’autres : sociales, économiques, politiques. »
Cette conception est restrictive, on oublie le pilier environnemental. Les catastrophes à venir seront d’abord écologiques. Leurs répercussions se feront d’abord au niveau économique, puis social, puis politique.
– « Un frôlement de la catastrophe seulement. Dommage ! »
Sans doute le meilleur commentaire car il appelle à la réflexion. Or nous sommes dans une situation où la pédagogie de la catastrophe (annonce de l’épuisement des ressources fossiles, du réchauffement climatique, de l’extinction des espèces, etc.) est inopérante. Ce sera donc malheureusement la catastrophe qui nous servira de pédagogie.
– « Deux camps souhaiteraient la catastrophe économique: l’extrême gauche et l’extrême droite. Les premiers pour démarrer la révolution, les seconds pour avoir une excuse pour étriper et écarteler les premiers. A votre avis, qui l’emporterait ? »
A notre avis, une catastrophe inéluctable causée par la pénurie géophysique de pétrole, donc de carburants, permettrait l’arrivée au pouvoir d’un régime de type totalitaire. Or nous savons historiquement deux choses sur le totalitarisme :
1) sa version de droite et de gauche sont similaires ;
2) sa préoccupation n’est pas de résoudre les problèmes, mais de soutenir une oligarchie.
– « Les inconscients qui bloquent le port ne savent pas à quoi ils s’exposent (il faut dire également que l’Etat a mal géré cette crise, tout en respectant le droit de grève), j’aurais tous les matins fait venir des camions citernes des pompiers et bien arrosé tous ces manifestants. »
Illustration de ce qui se passera avec une pénurie croissante de carburants, l’évolution vers un système répressif qui sera soutenu par une grande partie de la population…
– « Je suis sûr qu’au bout de quelques jours le conflit était maté »
Nouvelle illustration du totalitarisme rampant de notre société thermo-industrielle !
– « La catastrophe a été évitée : tirons-en des enseignements ! Il est anormal que quelques centaines d’employés travaillant dans un secteur vital pour notre économie, aient le pouvoir de stopper toute l’activité du pays. »
Ce n’était pas une catastrophe, seulement l’obligation pendant quelques temps d’importer du pétrole pour que nos automobilistes puissent appuyer sur leur accélérateur. Mais que ferons-nous quand ce n’est pas l’action syndicale qui bloquera les dépôts de carburants, mais l’impossibilité de se procurer du pétrole sur les marchés (avec la raréfaction des ressources fossiles) ?
– « Avec certaines stations proposant le carburant à 1,70 euros le litre, un article sur les profiteurs de crise serait bienvenu. »
Nous pouvons dire sans risque de nous tromper que le baril sera bientôt à 300 dollars, ce qui fera le litre d’essence largement à plus de 2 euros. Un article sur la vision court-termiste de nos concitoyens serait le bienvenu !
– « Il est anormal que les salariés refusent d’obéir à la loi du marché. Sans loi du marché, il n’y a pas de démocratie libérale. Les salariés n’ont rien compris : qu’ils se taisent. »
Nous constatons que les marchés fonctionnent à court terme, comme nos salariés et ce commentateur. La « loi du marché », c’est le règne des myopes, ce n’est certainement pas une bonne analyse.
– « Il est temps de s’affranchir de cette servitude, voiture électrique, qui répond aux besoins de 80% de conducteurs, en plus produit français… »
Nous terminons notre analyse par cette croyance trop répandue d’une technologie qui nous éviterait les catastrophes. Nous rappelons que l’électricité n’est pas une source d’énergie, il faut la fabriquer… Avec du pétrole importé ? Ou grâce à nos déchets nucléaires ?
* lemonde.fr du 01.11.2010
** pic pétrolier, moment où les quantités de pétrole offertes commencent inexorablement à baisser étant donné les difficultés d’extraction.
Pour eux qui veulent approfondir la question pétrolière :
1979 Vivre sans pétrole de J.A. GREGOIRE
2003 Pétrole, la fête est finie d’Heinberg Richard (Résistances, 2008)
2005 La vie après le pétrole de Jean-Luc Winger
2005 Panne sèche, la fin de l’ère du pétrole de D.Goodstein
2005 Pétrole apocalypse d’Yves COCHET
2007 La faim, la bagnole, le blé et nous (une dénonciation des biocarburants) de Fabrice Nicolino
2009 la crise pétrolière (analyse des mesures d’urgence) de Bernard Durand
une source d’information actualisée : http://petrole.blog.lemonde.fr/