D’une autre façon que dans les monarchies absolues, dans les démocraties le trône est presque inaccessible. Celui qui y prétend doit suivre des détours, notamment l’élection et la montée dans la hiérarchie du parti, que l’attention aux moyens finit par lui faire oublier les fins qui étaient la raison d’être de son engagement politique. La dureté de la concurrence sélectionne les plus doués, ceux qui ont le sens de la manipulation des masses. Cette forme d’intelligence peut être le fruit d’un esprit borné qui ne s’interroge pas sur la valeur des stéréotypes et des moyens nécessaires à son succès : si tel slogan se révèle efficace, il sera le premier à y croire. En politique, comme dans d’autres domaines, la sélection se fait à l’envers : l’individu ayant un minimum d’exigence intellectuelle se détourne de la « politique » en la laissant aux mains de médiocrités incapables de tout autre talent.
L’engagement politique a toujours mélangé de façon ambiguë le désir de servir Dieu, le bien public ou le peuple, et la volupté de se hisser à la direction des affaires et au commandement des hommes. Trop souvent qui dévoue sa personne au peuple dévoue le peuple à sa personne et l’y sacrifie.
On croirait un portrait craché de Sarkozy, il s’agit en fait d’une analyse écrite en 1980 par Bernard Charbonneau (in Le Feu vert). Et son message reste d’actualité : « Reste le mouvement écologique. Mettant en cause la totalité du monde industriel au nom de la préservation de la nature et de la liberté, il peut redonner contenu et sens à la politique. »