Ph. Saint Marc

Le site biosphere répertorie un grand nombre de livre dans sa rubrique « Bibliothèque de la Biosphère ». La plupart sont résumés, on peut y accéder en cliquant sur le titre d’un livre dans http://biosphere.ouvaton.org/index.php?option=com_content&view=section&layout=blog&id=6&Itemid=54.

Voici par exemple la quintessence d’un livre de Philippe Saint Marc, publié en 1971, qui montre que les prophètes ne sont jamais écoutés !

« Voici maintenant rompue la vieille alliance de la Genèse entre l’homme et la création et surgit, toute proche, la menace de l’Apocalypse. La crise de civilisation est désormais ouverte par la dilapidation des richesses naturelles. C’est une étape nouvelle – et sans doute la dernière – dans les relations de l’Humanité avec la Nature. Nous sommes maintenant entrés dans l’âge de la Nature, nouvelle époque où la rareté et la fragilité de l’espace naturel deviennent un problème dramatique pour l’avenir de l’homme et sa survie. C’est un tournant historique dans les relations d’affrontement entre ces deux systèmes vivants : le monde de l’homme et celui de la Nature. Il ne s’agit plus aujourd’hui de protéger l’homme contre la Nature mais la Nature contre l’homme, contre le débordement de puissance et de vitalité de l’espèce humaine, afin qu’elle n’en vienne pas, en détruisant la Nature, à se détruire elle-même.

Ce serait une étrange erreur que penser conserver la Nature en maintenant inchangé le système économique qui la détruit. Matérialisme, libéralisme, urbanisation aggravent en effet considérablement la pénurie de Nature résultat de l’encombrement de l’espace par la croissance démographique et économique. Tant que notre civilisation matérialiste donnera au milieu naturel une grande valeur lorsqu’il est détruit, une valeur faible ou nulle lorsqu’il est sauvegardé, comment s’étonner qu’il disparaisse ? La seule réponse, la clef de voûte de cette construction nouvelle est la socialisation de la Nature. Ce serait reconnaître qu’elle est le bien commun universel, qu’elle doit être ouverte à tous et que son maintien est une mission de service public. D’où la nécessité d’affecter une forte part du Revenu National à un « budget de la Nature » et d’en faire supporter le poids principal aux responsables des nuisances : les pollueurs doivent être les payeurs. Cette civilisation nouvelle devra donner la primauté aux biens immatériels sur les biens matériels, au socialisme sur le libéralisme, à la ruralisation sur l’urbanisation. 

L’indépendance des Etats est bien souvent un masque derrière lequel s’abritent les compagnies industrielles, commerciales, financières qui les ont colonisés. Nous sommes citoyens du monde. L’espace est un, commune est notre Terre. Vents, courants marins, nappes phréatiques, bassins fluviaux ignorent les frontières et tissent une solidarité écologique des territoires nationaux. Au-delà des nationalismes qui traînent leur bric-à-brac de ferraille guerrière et de haines sanglantes, sauver l’homme en sauvant la Nature est une entreprise qui peut rassembler dans une communauté d’action les hommes de toutes les races et de toutes les idéologies. Rétablir l’amitié de l’homme avec la Nature et par là même ouvrir la voie à une amitié nouvelle entre les peuples, n’est-ce pas la source d’une fraternité universelle par un idéal commun ? Aussi noble que concret, ce but  rapproche les savants autant que les industriels, les artistes autant que les juristes. »

 La socialisation de la nature (éditions Stock)