Pourquoi y-a-t-il des riches ? Parce que nous valorisons les riches. Ainsi LeMonde du 28 septembre consacre une page entière sur la vie de riche à Sao-Paulo, mais 1/6ème de page seulement à la fièvre néfaste du luxe (dans le supplément économique). Sur pleine page, nous apprenons beaucoup de choses qui n’ont aucun intérêt, sauf de donner envie de taxer le revenu ostentatoire des riches à 100 %. Que la bouteille de champagne puisse atteindre au Brésil 10 000 euros et la Bentley 450 000 affriole le badaud dans un quotidien de référence mais déshonore ceux qui peuvent se permettre ces folies. Que Sao Paulo soit la première ville au monde pour le trafic civil d’hélicoptères montre simplement qu’il ne fait pas bon marcher dans ses rues. Que la consommation Vuitton, Hermès ou Chanel cultive le dernier cri pour promouvoir la distinction montre que la France entretient le vice au Brésil. Car rien n’étanche la soif de luxe alors que l’achat compulsif pour paraître n’apporte pas le bonheur.
Le livre de Robert Frank, Luxury Fever, traduit de façon insipide par « la course au luxe », est sous-titré efficacement : l’économie de la cupidité et la psychologie du bonheur. Le luxe est relatif, il n’est qu’affaire d’écart par rapport à autrui. De même le bonheur quand on ne pratique pas la simplicité volontaire. Quand Onassis se faisait construire un yacht de 100 mètres, Niarchos commandait un bateau de 114 mètres. Ce bonheur-là n’a pas de limites. Quand le luxe pour les uns est de prendre l’avion pour les plages à l’autre bout du monde, le luxe pour d’autres est l’achat d’une machine à laver et pour la majorité d’avoir accès à l’eau potable. Qu’est-ce qui est le plus utile ? Non seulement le luxe des riches est immoral, donc taxable à merci sans bouclier fiscal, mais le mécanisme sans fin que le luxe induit par la course ostentation/imitation met à mal les ressources de la biosphère et entraîne un appauvrissement durable de tous. Fixer un revenu maximal admissible n’est pas un luxe, c’est une nécessité.
complément d’analyse : les leçons de l’histoire
La taxation confiscatoire des revenus exorbitants est non seulement possible économiquement, mais souhaitable. En 1932, quand Roosevelt arrive au pouvoir, le taux de l’impôt fédéral sur le revenu applicable aux plus riches était de 25 % aux Etats-Unis. Le nouveau président décide de le porter immédiatement à 63 %, puis 79 % en 1936, 91 % en 1941, niveau qui s’appliqua jusqu’en 1964, avant d’être réduit à 77 %, puis 70 % en 1970. Pendant près de cinquante ans, des années 30 jusqu’en 1980, jamais le taux supérieur ne descendit au-dessous de 70 %, et il fut en moyenne de plus de 80 %. Cela n’a pas tué le capitalisme et n’a pas empêché l’économie américaine de fonctionner. Pour une raison simple : ces taux ne s’appliquaient qu’à des revenus très, très élevés. En 1941, Roosevelt fixe le seuil du taux de 91 % à 200 000 dollars de l’époque, soit 1 million de dollars d’aujourd’hui (770 000 euros). Or à ces niveaux de revenus, ce ne sont pas les compétences ou le dynamisme que l’on rémunère : ce sont la rapacité, le court-termisme et des prises de risque excessives.
Appliquer le bouclier fiscal sans aucun plafond n’a aucun sens. Antoine Zacharias, patron de Vinci, a ponctionné 120 millions d’euros de rémunérations à son entreprise. Au nom de quelle folie idéologique devrait-on lui garantir qu’il conservera quoi qu’il arrive 50 % de cette somme ? Même avec un taux d’imposition de 90 %, cela lui laisserait tout de même 10 millions d’euros d’argent de poche…
Thomas Piketty
@ bigstop
La réussite des plus riches n’est possible que par l’exploitation de la crédulité ou de la valeur-travail de la communauté laborieuse. Maintenant cette réussite se fait aussi au détriment des richesses de la biosphère.
La seule façon que vous et moi acceptions de consommer moins de matière et d’énergie, c’est que la consommation matérielle, donc le revenu, de l’oligarchie soit sévèrement réduite.
@ bigstop
La réussite des plus riches n’est possible que par l’exploitation de la crédulité ou de la valeur-travail de la communauté laborieuse. Maintenant cette réussite se fait aussi au détriment des richesses de la biosphère.
La seule façon que vous et moi acceptions de consommer moins de matière et d’énergie, c’est que la consommation matérielle, donc le revenu, de l’oligarchie soit sévèrement réduite.
@ panissieres
Tu viens de gagner un point Godwin !
Le point Godwin est un mauvais point attribué à un débatteur qui aurait mêlé Staline, Mao Zé Doung, l’élimination des personnes ou toute autre idéologie extrémiste à une discussion dont ce n’est pas le sujet. Panissieres mérite son point Godwin…
Lénine,, Staline, Mao Zé Doung, Fidel castro ont non seulement taxer les riches à 100%, mais ils les ont supprimé, purement et simplement…
comme ça, tout le monde était pauvre… Sauf les membres du Parti, of course…
Lénine,, Staline, Mao Zé Doung, Fidel castro ont non seulement taxer les riches à 100%, mais ils les ont supprimé, purement et simplement…
comme ça, tout le monde était pauvre… Sauf les membres du Parti, of course…
Merci d’illustrer, avec cet article d’une grande hauteur de vue, et de manière éminemment éloquente une fois encore que l’assommoir écolo-décroissanssiste et le galimatias altermondialiste ne sont que le nouveau packaging à la mode des idéologies d’extrême gauche du passé.
Sinon, si certains français envieux passaient moins de temps à s’occuper de vouloir administrer la fortune des plus riches qu’eux pour s’occuper plutôt de leur propre réussite, il y aurait moins d’aigris et de grincheux et moins de problèmes en France !