Les chiffres du MONDE* : 51,2 millions de personnes déplacées contre leur gré fin 2013. En Syrie par exemple, sur 22 millions d’habitants 9 millions ont été déracinés par la guerre civile. François Hollande s’est engagé à ce que la France accueille 500 réfugiés syriens envoyés par le HCR (haut-commissaire aux réfugiés). 500 seulement ? L’Union européenne considère que l’accueil des réfugiés est le problème du pays d’entrée, pas de celui de l’Union. Avec 2,8 milliards d’euros alloués fin 2013, l’Europe est le plus gros donateur pour la Syrie… à condition que les errants restent en dehors de l’UE. Il n’est guère de pays exemplaire pour l’accueil des personnes déplacées ! Et les puissances (USA ou Russie) cherchent plus à accroître les conflits armés qu’à les neutraliser, en Syrie ou ailleurs.
A ces déplacés pour faits de guerre s’ajoutent les réfugiés environnementaux : entre 17 et 42 millions de personnes entre 2008 et 2012 pour ce qui est des migrations suite à des catastrophes naturelles, une cinquantaine de millions de migrants environnementaux (du fait de dégradations lentes de l’environnement) en 2010, et entre 150 et 300 millions attendus pour 2050. Un livre vient d’en parler, « Les migrations environnementales » (Christel Cournil et Benoît Mayer). Il s’attache à la responsabilité des pays industriels dans les bouleversements climatiques déclencheurs de migrations. Mais une rhétorique de défense-sécurité face à une « invasion » pourrait déboucher sur un repli défensif encore plus marqué des États par rapport aux migrations. La protection des migrants environnementaux a du mal à s’inscrire dans les textes internationaux.
Puisque nous ne nous attaquons pas aux causes des migrations, il n’y aura comme résultante que rejets et massacres. En résumé les migrations, puisque source de problèmes insolubles, poussent à la volonté d’immobilité territoriale, contrainte et forcée. Il n’y a pas de morale à mettre là-dedans : on ne peut vivre durablement que sur un territoire restreint dont on maîtrise collectivement les paramètres : potentiel alimentaire et énergétique, rapports humains de proximité et culture particulière. Les Inuits ne pensaient pas à émigrer, leur terre recouverte de son manteau neigeux huit mois sur douze leur paraissait trop précieuse. Maintenant les Inuits boivent et se suicident pour oublier la mondialisation… et les glaciers fondent. Une population humaine est semblable aux autres espèces, elle ne peut croître au-delà des possibilités que lui offre son écosystème**.
* LE MONDE du 24 juin 2014, 51 millions d’errants
** cf. le livre Moins nombreux, plus heureux (l’urgence écologique de repenser la démographie)