Selon Alain Faujas, il faut s’en persuader, « le développement, c’est long, c’est compliqué et c’est urgent » (LeMonde du 19 février)… donc il faut aider les pays pauvres. Mais après des décennies d’aide publique ou privée au développement, après le slogan « trade, not aid », il faut se rendre à l’évidence, le développement n’est toujours pas au rendez-vous. Car le « développement » est un leurre agité par les puissances occidentales pour mondialiser leur propre système.
Cela commence avec l’article 22 du pacte de la Société des nations (1919) : « Les principes suivants s’appliquent aux colonies et territoires qui sont habités par des peuples non encore capables de se diriger eux-mêmes dans les conditions particulièrement difficiles du monde moderne. Le bien-être et le développement de ces peuples forment une mission sacrée de la civilisation. La meilleure méthode de réaliser pratiquement ce principe est de confier la tutelle des ces peuples aux nations développées. Le degré de développement… » Ce texte utilise pour la première fois dans la littérature internationale la notion de « degré de développement » pour justifier un classement des nations, tout en affirmant qu’il existe, au sommet de l’échelle, des nations « développées ». La colonisation acquiert ses lettres de noblesse !
Cela se poursuit en 1949 avec le point IV du discours d’investiture de Truman. Pour la première fois l’adjectif « sous-développé » apparaît dans un texte destiné à une pareille diffusion. Cette innovation terminologique introduit un rapport inédit entre « développement » et « sous-développement ». Jusqu’alors les relations Nord/Sud étaient largement organisées selon l’opposition colonisateurs/colonisés. A l’ancienne relation hiérarchique des colonies soumises à leur métropole se substitue un monde dans lequel tous les Etats sont égaux en droit même s’ils ne le sont pas encore en fait. Dans ces conditions, une accélération de la croissance apparaît comme la seule manière logique de combler l’écart. Non seulement on évacue les effets de la conquête, de la colonisation, de la traite, du démantèlement de l’artisanat en Inde, de la déstructuration des sociétés, etc., mais encore on fait comme si l’existence des pays industriels ne transformait pas radicalement le contexte dans lequel évoluent les candidats à l’industrialisation. Ainsi, à partir de 1949, plus de deux milliards d’habitants de la planète ne seront plus Aymaras, Bambaras, Berbères, Mongols ou Quechuas, mais simplement « sous-développés ».
L’esprit est conditionné au sous-développement lorsqu’on parvint à faire admettre aux masses que leurs besoins se définissent comme un appel aux solutions occidentales, ces solutions qui ne leur sont pas accessibles. Car en cessant d’être un processus endogène et autocentré d’évolution spécifique à chaque société, le développement ne pouvait plus être une dimension de l’histoire humaine, seulement une imposture que « l’aide au développement » permet d’enraciner dans les consciences.
(argumentaire de Gilbert Rist)
Travaillant dans le ‘développement des pays du Sud’ depuis plus de 25 ans, j’ai acquis quelques convictions :
– les sytèmes d’aide bureaucratique, notamment français avec leurs procédures (voir l’AFD…. , passent à côté des dynamiques sociales qui auraient besoin d’appui. les ‘concertations des bailleurs’, genre CGAP et autres créent des normes de ‘bonnes pratiques’ imposées par le Nord non discutées véritablement avec le Sud, qui plus est le Nord s’arroge avec les sytsèmes de ‘rating’ le droit de donner ‘des notations’ (voir ce à quoi les ‘notations’ ont servi dans le Nord. Aujourd’hui un bon ‘professionnel du développement, c’est quelqu’un/e qui connaît ‘procédures’, même plus besoin de connaître ni de travailler sur les grandes analyses sur le développement des années ’60 et ’70
– les programmes d’ajustement struturels ont torpillé des pays en construction,
– la société civile des pays du Sud sert globalement d’alibi, pas grand monde ne s’intéresse ni n’appuie vééritablement sa structuration et sa capacité de représenter des (contre) pouvoirs,
– Qui connaît les objectifs du millénaire ? On en ferait l’actualité avec la même intensité que la sécurité en France, ils seraient traités,
– qui parle des dynamiques de constitution d’instruments de financement du développement au Sud ?
– On n’a jamais autant formé de gens capables d’analyser les ‘risques-pays’, résultat, on ne prend plus risques sur le moyen terme,
– a part les belges, qui finance l’agriculture des PVD aujourd’hui ??
– le petit sarko est allé faire son beau en Haiti (4 heures… c’est quand même une de plus qu’à Bethlehem reçu par l’autorité palestinienne durant son séjour de 3 jours en 2007 en Israël. Mais que va t il vraiment sortir de son ‘séjour’ ? Le financement de la coopération n’existe plus pour son objet de base, mais existe comme instrument d’influence politique….
– bref, le Nord peut regarder le sud et se désoler, mais tant que les termes de l’échanges ne seront pas plus équitables entre Nord et Sud…
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Travaillant dans le ‘développement des pays du Sud’ depuis plus de 25 ans, j’ai acquis quelques convictions :
– les sytèmes d’aide bureaucratique, notamment français avec leurs procédures (voir l’AFD…. , passent à côté des dynamiques sociales qui auraient besoin d’appui. les ‘concertations des bailleurs’, genre CGAP et autres créent des normes de ‘bonnes pratiques’ imposées par le Nord non discutées véritablement avec le Sud, qui plus est le Nord s’arroge avec les sytsèmes de ‘rating’ le droit de donner ‘des notations’ (voir ce à quoi les ‘notations’ ont servi dans le Nord. Aujourd’hui un bon ‘professionnel du développement, c’est quelqu’un/e qui connaît ‘procédures’, même plus besoin de connaître ni de travailler sur les grandes analyses sur le développement des années ’60 et ’70
– les programmes d’ajustement struturels ont torpillé des pays en construction,
– la société civile des pays du Sud sert globalement d’alibi, pas grand monde ne s’intéresse ni n’appuie vééritablement sa structuration et sa capacité de représenter des (contre) pouvoirs,
– Qui connaît les objectifs du millénaire ? On en ferait l’actualité avec la même intensité que la sécurité en France, ils seraient traités,
– qui parle des dynamiques de constitution d’instruments de financement du développement au Sud ?
– On n’a jamais autant formé de gens capables d’analyser les ‘risques-pays’, résultat, on ne prend plus risques sur le moyen terme,
– a part les belges, qui finance l’agriculture des PVD aujourd’hui ??
– le petit sarko est allé faire son beau en Haiti (4 heures… c’est quand même une de plus qu’à Bethlehem reçu par l’autorité palestinienne durant son séjour de 3 jours en 2007 en Israël. Mais que va t il vraiment sortir de son ‘séjour’ ? Le financement de la coopération n’existe plus pour son objet de base, mais existe comme instrument d’influence politique….
– bref, le Nord peut regarder le sud et se désoler, mais tant que les termes de l’échanges ne seront pas plus équitables entre Nord et Sud…
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Il ne me parait pas idiot pour un pays pauvre de vouloir faire du développement durable (avant de devoir passer à la décroissance soutenable…) et d’espérer de se faire aider par les pays plus riches. La difficulté c’est la limite à la générosité, apparemment calquée sur le modèle de la vieille charité chrétienne, mais en fait totalement biaisée par notre propre intérêt… Si les riches aident trop les pauvres ceci vont devenir des concurrents. Il faut donc les aider assez pour qu’ils consomment et produisent les produits bas de gamme mais pas au point de leur donner les dernières technologies et les formations pointues qui vont avec. Paradoxalement la finance internationale ne raisonne plus tout à fait pareil… l’important c’est de faire tourner la machine productiviste et consommatoire. Que les plus values soient faites sur le dos des travailleurs du tiers monde ne les gênent pas ! On tient là source des tensions actuelles entre les gouvernants qui se sentent un peu liés aux peuples qui les ont choisis et les financiers pour qui l’important c’est de faire de l’argent. Sur ce sujet très délicat personne n’est très clair… aide toi et le ciel t’aidera est certainement une meilleure approche que l’aide au développement telle qu’elle est actuellement faite. On peut cependant garder au coin de son cerveau une vague utopie de solidarité mondiale…
Il ne me parait pas idiot pour un pays pauvre de vouloir faire du développement durable (avant de devoir passer à la décroissance soutenable…) et d’espérer de se faire aider par les pays plus riches. La difficulté c’est la limite à la générosité, apparemment calquée sur le modèle de la vieille charité chrétienne, mais en fait totalement biaisée par notre propre intérêt… Si les riches aident trop les pauvres ceci vont devenir des concurrents. Il faut donc les aider assez pour qu’ils consomment et produisent les produits bas de gamme mais pas au point de leur donner les dernières technologies et les formations pointues qui vont avec. Paradoxalement la finance internationale ne raisonne plus tout à fait pareil… l’important c’est de faire tourner la machine productiviste et consommatoire. Que les plus values soient faites sur le dos des travailleurs du tiers monde ne les gênent pas ! On tient là source des tensions actuelles entre les gouvernants qui se sentent un peu liés aux peuples qui les ont choisis et les financiers pour qui l’important c’est de faire de l’argent. Sur ce sujet très délicat personne n’est très clair… aide toi et le ciel t’aidera est certainement une meilleure approche que l’aide au développement telle qu’elle est actuellement faite. On peut cependant garder au coin de son cerveau une vague utopie de solidarité mondiale…
en résumé, le « développement » n’a été que la poursuite de la colonisation par d’autres moyens : aide alimentaire, aide financière, transfert de technologie, on retrouve toujours l’occidentalisation du monde. Le « développement durable », qui nous promet maintenant le « développement » pour l’éternité, participe de la même toxicité, il nous enlève toute perspective de sortie.
Il faut donc « Défaire le développement pour refaire le monde ». Tel était l’objectif d’un colloque organisé à l’UNESCO en 2002, mais nous continuons aujourd’hui à gloser sur le développement-croissance…
en résumé, le « développement » n’a été que la poursuite de la colonisation par d’autres moyens : aide alimentaire, aide financière, transfert de technologie, on retrouve toujours l’occidentalisation du monde. Le « développement durable », qui nous promet maintenant le « développement » pour l’éternité, participe de la même toxicité, il nous enlève toute perspective de sortie.
Il faut donc « Défaire le développement pour refaire le monde ». Tel était l’objectif d’un colloque organisé à l’UNESCO en 2002, mais nous continuons aujourd’hui à gloser sur le développement-croissance…