La réponse classique apportée à la question : « A quoi sert l’homme ? » à savoir : à rien, ou plus exactement à rien d’autre qu’à lui-même et son entreprise, est la réponse la plus destructrice qui soit pour lui-même et pour la planète. Exemple, cette histoire vraie que raconte Florent, un jeune ingénieur : « Un jour, mon chef m’a demandé de réaliser une mission d’expertise sur un cas de pollution environnementale. Deux conclusions étaient possibles après enquête : soit on arrêtait une activité quelques jours pour réparer une fuite de gaz à fort effet de serre, soit on continuait. Cette deuxième solution évitait à l’entreprise de perdre de l’argent, j’ai préconisé la première solution. On m’a donc demandé de changer ma conclusion. J’ai refusé. Mon chef l’a modifiée lui-même. J’ai refusé de signer le rapport. Je me suis retrouvé en entretien disciplinaire. Mon chef m’a alors lancé cette phrase : « Florent, il ne faut pas laisser tes valeurs personnelles interférer avec le travail. ». Pour ma hiérarchie, un travail sert avant tout à générer un revenu. Un bon travailleur doit faire preuve de loyauté envers son entreprise, qui le paie pour défendre les intérêts de l’entreprise. Pour moi, qui ai besoin d’être convaincu que mon travail contribue à rendre le monde meilleur, mes chefs étaient des mercenaires dénués de valeurs morales. »*
Tout est dit de la réalité de notre monde mercantile et destructeur. Le problème, c’est que le cas de conscience de Florent ne devrait pas être marginal. Quel est le sens de notre boulot ? Quels sont les métiers en France qui « rendent le monde meilleur » ? Suis-je véritablement utile ? Un tel questionnement devrait entraîner des démissions en chaîne. Le problème de fond, c’est que si chacun refusait de faire des boulots inutiles, c’est au moins 80 % des emplois actuels qui disparaîtraient. Déjà que le système a besoin de croissance économique pour perdurer ! En même temps les analystes envisagent sérieusement le chaos climatique et financier qui va résulter un jour ou l’autre de cette croissance… Donc en fin de compte on retrouvera alors des emplois utiles pour 20 % de personnes, mais que feront les autres ? Michel BERNARD nous donnait dans « Silence »** quelques pistes de réflexion : « Si on adoptait une politique écologiste, on arrêterait bon nombre de recherches inutiles (armement, biotechnologies, nanotechnologies, gadgets informatiques, etc.) : autant d’emplois en moins. Si l’on adoptait des mesures contre la publicité et contre l’obsolescence des objets, l’activité économique baisserait de façon très importante : on achèterait moins d’appareils ménagers et quand on en achèterait un, ce serait avec des durées de garantie plus longues. On importerait moins, on produirait moins de déchets… et globalement on baisserait de manière importante le nombre d’emplois inutiles… Le but dans la vie n’est pas de travailler. C’est pourquoi il faut soutenir les démarches qui vont vers un partage plus important du temps de travail, ce qui évitera de faire des activités industrielles se justifiant indûment par la création d’emplois. »
Finalement, à quoi sert l’homme ? Si on pose cette question à tout un chacun, il répondra spontanément « Je n’en sais rien ». En effet, il n’y a pas de réponse nécessaire. Homo sapiens/demens aux multiples facettes ne trouve de sens à son existence qu’au fur et à mesure de son vécu, imprégné par sa socialisation, conditionné par son environnement social. Dans ce monde occidentalisé, il a même oublié le sens de l’harmonie avec la biodiversité d’une planète qu’il considère comme extérieure à lui-même. Le travailleur ne sert qu’à lui-même, il est baigné dans l’anthropocentrisme des discours publicitaires. Il se sert, dans une nature taillable et corvéable jusqu’à épuisement ! Tant qu’il en sera ainsi, les humains ne trouveront pas à quoi il servent vraiment, si ce n’est en produisant et consommant de la futilité pour oublier à quoi ils pourraient servir. Le sens de notre vie, c’est de chercher l’engagement écologiste qui ait du sens… par exemple en démissionnant de tous les métiers inutiles !
* LE MONDE du 16 octobre 2018, « J’ai démissionné pour exercer un métier qui a du sens »
** De quels emplois parle le gouvernement, in mensuel Silence (novembre 2013)
Erreur de ma part, et non des moindres. Bga80 parlait du créditisme et non du crétinisme. Quel crétin que je suis ! Ceci dit, ne faut-il pas également être un sacré crétin pour se retrouver pieds et poings liés à un patron et un banquier ?
Si on supprimait tous les emplois inutiles … alors évidemment il ne resterait que les emplois utiles. C’est une lapalissade. On nous dit que les emplois inutiles représentent 80% des emplois … c’est fort possible. A ce moment là, 20% des emplois seraient réellement utiles, c’est mathématique.
Et là se pose la question : « mais que feront les autres ? » autrement dit les 80 % pour le coup réellement inutiles.
On peut tout imaginer. Déjà on peut les laisser, voire les payer, à ne rien faire. Comme on fait quand on met un salarié indésirable au placard, il comprend alors très vite qu’il ne sert à rien. FAIRE (et AVOIR) semble être aujourd’hui la seule raison de vivre. Ne rien faire devient alors synonyme de mort. Justement… il se trouve que nous sommes (ils sont) trop nombreux… Plus sérieusement, combien de ces tristes histoires ont-elles mal finies ? Combien de salariés aujourd’hui sont en souffrance, non pas seulement parce qu’ils sont débordés de boulot (burn-out), mais parce que leur boulot n’a aucun sens (bore-out) ?
Et en même temps, comme IL dit, il y a des choses réellement utiles qui aujourd’hui ne sont pas faites. Et ce n’est pas faute de bras, faute de cerveaux, mais faute de volonté politique. Déjà pour enseigner, correctement, pour qu’aucun enfant ne reste sur la touche, de combien d’instits et de profs aurions-nous besoin ? Et pour s’occuper correctement des malades, des vieux, de combien d’infirmières, etc. ?
Alors, proposition ! Comme quoi ça m’arrive de faire des propositions 😉
Je propose pour commencer que la semaine de travail soit portée à 25 h par semaine. Le temps ainsi libéré pourrait être consacré à cultiver des légumes, à étudier, réfléchir, s’occuper des uns et des autres, écrire des poèmes ou des chansons, etc. Voilà déjà de quoi occuper quelques unes des 5 millions de paires de bras actuellement inoccupées en France. Ces bras et ces cerveaux seront utilisés dans ces métiers pour lesquels il n’y a pas photo quant à leur utilité : prof, instit, infirmièr(e), aides soignant(e), paysan, maréchal-ferrant (métier d’avenir), tailleur de pierres, et bien d’autres.
Je propose ensuite de supprimer la totalité des emplois liés à cette activité parmi les plus néfastes, la publicité. Tout ce « joli » monde sera reconverti en nettoyeurs de l’environnement. Leur nouveau job consistera à ramasser toutes les ordures qui jonchent les fossés, les forêts, les berges des rivières, les plages. Ce métier ne nécessite pas une longue et coûteuse formation, il se pratique au grand air, il ne peut que séduire. Bien entendu il s’agirait là d’emplois de fonctionnaires, ces agents seraient donc payés avec nos impôts. il n’est évidemment pas question de laisser ça aux requins du Privé, nous ne savons que trop comment ils savent transformer la merde en or.
Et après la pub… on verra.
Entièrement d’accord avec Didier Barthès sur le concept de « servir à quelque chose ».
De la même manière qu’il existe une différence entre actions inutiles et actions néfastes, nous ferons une différence entre métiers inutiles et métiers néfastes. C’est bien le néfaste, le nuisible, qu’il faut repérer et combattre. Oui mais voilà, comment le combattre ?
Bga80 dit qu’il faut combattre le crétinisme… Oui, allons-y ! Et ne loupons aucune occasion ! Surtout que le crétinisme n’est pas seulement un frein à la démission des boulots inutiles ou néfastes.
De la même manière que le Libéralisme (Capitalisme) est incompatible avec l’écologie, le crétinisme est incompatible avec la liberté, notre liberté individuelle.
Alors peut-être que la Solution serait de nous enseigner ce qu’est la liberté … Et pour cela commencer par nous apprendre à réfléchir, à penser. Et ceci le plus tôt possible, autrement dit dès la maternelle.
Pour ça, y’aca mettre la philo dans les programmes scolaires ! Y’aca faire réfléchir nos gamins sur des questions toutes bêtes, mais finalement fondamentales, existentielles. Des questions du genre : à quoi sert l’homme ? à quoi sert la vie ? C’est quoi la réussite ? La Rolex à 50 balais, peut-être ? etc. etc.
Et bien sûr nous n’oublierons pas de leur enseigner aussi, et en même temps, le port du préservatif 😉
C’est tout simplement que le concept de « servir à quelque chose » ne procède que des objets fabriqués dans une intention particulière. Les êtres vivants (ni l’homme, ni les animaux, ni les plantes) ne servent pas, ils n’ont pas un rôle (même pas dans la nature) ils se sont juste faits une place et des équilibres se sont établis.
Les êtres ne servent pas, ils « sont » tout simplement, c’est là leur noblesse.
Pour rendre aux gens la liberté de pouvoir démissionner des boulots inutiles, il faut d’abord combattre le créditisme, tant qu’il y aura du crédit il y aura du boulot inutile, ça va de paire, l’un ne va pas sans l’autre.
« » »par exemple en démissionnant de tous les métiers inutiles ! » » »
Personne ne démissionnera des métiers inutiles, y compris pour vivre autrement et même tout simplement mieux vivre personne ne démissionnera. Beaucoup de gens savent qu’ils font des boulots inutiles mais ils s’y accrochent comme des moules à leurs rochers, pourquoi ? Ben le créditisme, ces gens aux boulots inutiles sont enchaînés par leurs crédits qu’ils ont souscrit, se privant ainsi de liberté, se privant même la liberté de démissionner de leurs boulots et des gens qui les exploitent, ils ont perdu la liberté de dire « merde » car ils ont besoin de leurs boulots inutiles pour rembourser leurs crédits.