« Greta Thunberg ou la dangereuse propagande de l’infantilisme climatique* », dixit Pascal Bruckner. Il est terrifié par une jeune fille de 16 ans qui a le culot de faire la leçon aux mâles dominants. Bruckner en reste aux temps bénits où la philosophie était reine et la hiérarchie sociale bien en place : « 315 avant J.-C., Platon met en garde contre la corruption de la démocratie qui consiste en une inversion des hiérarchies, par excès de liberté : quand le père traite son fils comme un égal, que les maîtres flattent les disciples et que les vieillards imitent la jeunesse. Nous y sommes. Quiconque a vu les manifestations de jeunes gens pour le climat ces dernières semaines en Europe, où l’on avait mobilisé jusqu’aux maternelles et jardins d’enfants, où d’adorables petites têtes brunes ou blondes récitaient pieusement les slogans que leurs parents leur avaient appris ne peut que s’inquiéter de ce véritable exercice de ventriloquie. » L’engagement des jeunes pour le climat est pour lui une « infâme propagande de la peur contre laquelle je m’élève, avec d’autres, depuis 25 ans ».
Pascal Bruckner est une incompétence faite homme, un négateur du changement civilisationnel, un cas avéré de dissonance cognitive ! Cet « intellectuel » veut pourfendre tous ceux et celles qui sont terrifiés par les bouleversements socio-écologiques alors qu’il n‘est qu’un intégriste à la solde du libéralisme économique. Son livre, Le fanatisme de l’apocalypse faisait écho à la cabale organisée avec ses copains/coquins Bruno Tertrais (L’apocalypse n’est pas pour demain) ou Jean de Kervasdoué (Les prêcheurs de l’apocalypse). Le 10 avril 2019 dans le Figaro, Bruckner vocifère contre une jeune fille que la fonte des glaces alarme alors que le Figaro raconte le même jour l’effet désastreux du choc climatique sur les glaciers. Bruckner est non seulement une insulte à la jeunesse, mais aussi un exemple frappant des dérives de l’intelligence humaine, ancrée dans un écolo-bashing stupide. Nous regrettons que le mensuel La décroissance titre en ce mois d’avril « Non aux enfants soldats du climat » et fasse par son sous-tire « L’écologie infantilisée » écho aux élucubrations de Bruckner. Le journaliste Pierre Thiesset s’en prend courageusement au physique de Greta Thunberg, « jeune fille chétive » au « visage poupon », mais sa conclusion contredit sun titre trop expéditif : « Quand une Greta Thunberg réclame dans ses discours de laisser tous les combustibles fossiles dans le sol nous ne pouvons que l’approuver. Non seulement pour lutter contre le réchauffement, mais surtout pour en finir avec le mode de vie délirant qui repose entièrement sur l’abondance énergétique, et dont la jeunesse est bien malgré elle le produit. »
Greta Thunberg est une adolescente suédoise, militante pour le climat. Elle a notamment initié la Skolstrejk för klimatet (« grève étudiante pour le climat ») et donné un discours à la conférence de Katowice de 2018 sur les changements climatiques. Elle a influencé sa famille qui a réduit sa consommation de viande, et a arrêté de prendre l’avion. C’est ainsi qu’elle se serait rendue compte de sa capacité à convaincre les autres. Elle se rend à Davos en janvier 2019, en y allant en train, ce qui a pris 32 heures depuis Stockholm. À la suite de la grève mondiale du 15 mars 2019, elle s’exprime sur Facebook pour dire : « Il nous faut une nouvelle façon de penser. Le système politique que vous, les adultes, avez créé n’est que compétition. Vous trichez dès que vous pouvez car tout ce qui compte, c’est de gagner. Nous devons coopérer et partager ce qui reste des ressources de la planète d’une façon juste. » Un tel discours, exprimé par une jeune fille de 16 ans, est efficace. Le discours de résistance de Greta est salutaire puisqu’il ne fait que répercuter la réalité d’un effondrement civilisationnel en cours. Pourtant, même sur wikipedia, on reprend énormément de critiques injustes à son égard…
L’Histoire le prouve : C’est par la jeunesse active que surviennent les grands changements de Société, pas par les vieux qui grincent.
[ les publicitaires, les boutiquiers et les militaires le savent bien… ]
» L’écologie infantilisée » : excellent article de Pierre Thiesset dans La Décroissance de ce mois-ci. La conclusion, citée par Biosphère, ne fait que résumer le long développement très bien argumenté du début à la fin. (« Dans l’après 68, Jacques Ellul se moquait déjà de la propension de notre société à glorifier la jeunesse, à lui faire peser sur ses épaules un espoir de révolution. »)
La jeunesse est bien le produit de notre société, pour moi hélas il n’y a rien à en attendre ni espérer. Sauf bien sûr ce que nous leur avons appris. Ronchonner, réclamer le beurre et l’argent du beurre, et faire du cinéma.
« Je ne veux pas que les gens meurent de la pollution de l’air ou de la montée des eaux, ni que les espèces disparaissent », affirme au micro Elsie Luna, 10 ans, devant le Parlement de Westminster le lundi 15 avril, premier jour d’une « semaine internationale de rébellion ».
Des milliers de lycéens manifestent à nouveau en France pour alerter sur l’urgence climatique (Le Monde avec AFP, 12 avril 2019). Carmen, 13 ans, dénonce « l’inaction du gouvernement et l’absence d’éducation écolo au collège » .Candice, 16 ans, un cœur vert peint sur la joue : « Les politiques nous font des promesses pour 2050, et ça, ça marche pas. C’est maintenant qu’il faut bosser parce que la bascule c’est dans les dix prochaines années. » A Lyon, à Montpellier et, à Paris jusque sous les fenêtres de l’Assemblée nationale, quelques milliers de jeunes ont de nouveau manifesté, vendredi 12 avril, pour réclamer plus d’action contre le réchauffement climatique.
« Heureusement qu’il y a ces jeunes, soulignait Mireille Solignac, 74 ans, arrêtée sur un trottoir pour les applaudir. Ils vont peut-être parvenir à réveiller les adultes face à la catastrophe que ma génération et celle de leurs parents n’ont pas vu venir ou su arrêter. »