Jair Bolsonaro face à la presse étrangère : « L’Amazonie est au Brésil, pas à vous ! » Après deux cents jours à la tête du Brésil, Jair Bolsonaro assume : « Je suis là pour accomplir la mission de Dieu. » Et si d’aventure des maux existent dans le pays, la faute en revient en intégralité à ses prédécesseurs, de droite comme de gauche. Quand l’Institut national de recherches spatiales du Brésil publie des statistiques toujours plus effrayantes sur le niveau de déforestation, le président répond qu’il fera convoquer le directeur de l’organisme, qu’il soupçonne de travailler pour le compte d’une « ONG ». Quant aux populations autochtones, Jair Bolsonaro répond qu’ils vivent « comme des hommes préhistoriques ».Vivant dans un monde peuplé de « socialistes », de « corrompus » et de « fake news », Jair Bolsonaro reste néanmoins confiant quant à la capacité qu’a le peuple « de distinguer le vrai du faux ».
Au-delà de ce trumpiste d’Amazonie, la question de fond reste cruciale : à qui appartiennent les ressources naturelles ? Pour les intérêts globaux comme la nécessité des puits de carbone face au réchauffement climatique, il faut considérer l’Amazonie (et les autres forêts) comme des espaces à sacraliser car favorisant le bien commun planétaire. Pour le pétrole, les pays moteurs de la civivilaiton thermo-industrielle ne se sont jamais posé la question de l’appropriation. Est-ce que le pétrole de l’Arabie Saoudite appartient aux Saoudiens et Saoudiennes ? A la dynastie Saoud qui ne règne que depuis 1932 ? Au roi en exercice Salmane ben Abdelaziz ? Aux Etats-Unis qui ont protégé la dynastie des Saoud ? Aux compagnies pétrolières internationales ? Ou à Dieu puisque le Coran est partie intégrante de la constitution Wahhabite ? En fait le pétrole, offert gratuitement par mère Nature, appartient d’abord au sous-sol et secondairement à l’espèce humaine. Jamais on n’aurait du l’extraire pour le brûler, et comme on ne l’a pas fait, on se retrouve devant le problème amazonien ! Quelques réactions subsidiaires sur lemonde.fr* :
Léon : L’Amazonie est à nous ! Ben non, comme le Sahara, l’Amazonie est multinationale. Elle est partagée entre le Brésil, la Bolivie, le Pérou, l’Equateur, la Colombie, le Venezuela, la Guyana, le Surinam et … la France. Le Brésil en détient 63%. L’Amazonie n’est donc pas « brésilienne ».
Ma Tzu : L’ oxygène appartient à tout le monde !
Pierre K : Puisque Bolsonaro est, selon ses dires, si croyant, on devrait lui rétorquer que l’Amazonie, comme toutes les richesses naturelles, sont à Dieu et non au Brésil, que les hommes qui l’habitent depuis toujours, sont ses frères. Que fait le pape? Mais bon… ce christianisme n’est que façade ou instrument d’oppression comme il l’a été trop souvent.
Dmg : Voyons les choses en face. La société libérale hyper-capitaliste est une invention occidentale. Elle s’est accaparée la totalité de la planète et mène l’humanité entière à vitesse accélérée à sa destruction. Ce qui nous gène chez Bolsonaro, c’est qu’il veut piller son pays pour lui-même, pas pour nous.
jamaiscontent : Sur l’Amazonie, ce grand ami de l’humanisme et de l’environnement a apporté une réponse claire à sa façon aux béni-oui-oui européens encore persuadés que les accords de libre échange obligeront ce pays à respecter des normes en matière environnementales… Tous ceux qui nous vendent l’accord UE-Mercosur comme une possibilité de faire progresser l’accord de Paris ne pourront plus nous mentir impunément.
U. Zée : Un procès pour mise en danger de la vie d’autrui est-il envisageable contre un homme qui massacre le poumon de la planète sous prétexte qu’il lui appartient ?
Woudi Kherenc : Peu de chance de faire entendre raison à un mec persuadé qu’il est là « pour accomplir la mission de Dieu »…:
* LE MONDE du 21 juillet 2019, Jair Bolsonaro, L’Amazonie est au Brésil, pas à vous
Le chef d’Etat brésilien a lancé l’offensive contre l’Institut national de recherches spatiales (INPE) et son directeur, Ricardo Galvao, qui rendent compte chaque mois de la progression dramatique de la déforestation amazonienne. Bolsanaro a d’abord critiqué le messager, suspecté d’officier en secret pour quelque ONG. Puis il s’en est pris au message, si « alarmiste » qu’il pourrait nuire au pays. En mai, l’INPE faisait état de 739 kilomètres carrés déforestés, soit l’équivalent de deux terrains de football rasés chaque minute. En juin, le chiffre a atteint 920 kilomètres carrés. Ces chiffres sont obtenus à partir d’images satellites. Mais pour Jair Bolsonaro, l’Amazonie est avant tout une terre de richesses minières que le Brésil est en droit d’exploiter. « Les biosciences sont en danger », alerte Luiz Davidovich, le président de l’Académie brésilienne de sciences (ABC).
Chaque fois qu’on dit que quelques chose appartient à l’humanité, je me méfie, car ce concept d’appartenance à notre espèce renvoie toujours à l’idée que la nature est notre bien et qu’elle est en ce sens à notre service, que nous devons la protéger pour ce qu’elle peut nous apporter et non pour elle même, pour sa beauté et pour tous les êtres vivants qui s’y épanouissent.
Or c’est de cette conception des choses que vient tout le problème.
– « A qui appartient l’Amazonie , à qui appartiennent les ressources naturelles ? »
La question renvoie à la propriété. Qu’est-ce que la propriété ? Proudhon répond «La propriété c’est le vol».
Selon Bolsonaro les populations autochtones d’Amazonie vivent « comme des hommes préhistoriques ». Oui peut-être, et alors ?
Alors il aurait pu rajouter que ces hommes et femmes qui vivent « comme des hommes préhistoriques » pensent comme tel. Et justement il faut remonter à cette époque, au néolithique, pour comprendre ce qu’est la propriété.
Jusque là cette idée n’existait pas, la Terre était immense, les hommes peu nombreux, personne ne se posait la question de savoir à qui appartenait l’arbre à fruits, l’eau fraiche du ruisseau, le ruisseau, le mammouth bien dodu, la jolie fleur qui sent bon, la chèvre, la femelle etc. Jusque là l’idée de propriété se limitait à ce que chacun pouvait porter, une peau de bête, une belle plume, un collier, une lance, un gourdin.
Et puis un beau jour un petit malin a eu l’idée géniale de construire une clôture et de décréter : « Là c’est CHEZ MOI ! Et tout ça est à MOI ! »
Et c’est à partir de là qu’on a pris l’habitude de dire et de penser : «MON champ, MA terre, MON pays, MON arbre, MON eau, MA chèvre, MA femme, MON gros gourdin » etc. etc.