Aux européennes du 26 mai 2019, le candidat d’Europe Ecologie-Les Verts Yannick Jadot a recueilli 13,47 % des suffrages exprimés sur un positionnement ni gauche ni droite : « Le mandat que nous avons reçu, c’est de sauver l’avenir, pas le passé. » Depuis, il proclame sa volonté aux municipales de « gagner Paris, Nantes, Rennes, Toulouse »…. Il veut exercer le pouvoir, avec la présidentielle de 2022 en ligne de mire. Pourtant le parti était devenu ces derniers temps une coquille vide, dévitalisé par ses luttes internes et son alliance avec le PS de François Hollande. Une résurrection est-elle possible ? L’écologie politique peut-elle incarner un parti de gouvernement ? Le contexte s’y prête. L’écologie est devenue la principale préoccupation des électeurs et la grande cause de mobilisation des jeunes. Et si EELV se mettait comme les Verts allemands à s’unir tantôt avec la gauche, tantôt avec le centre droit pour exercer des responsabilités de premier plan, une page politique serait bel et bien tournée. C’en serait fini de « la social-écologie » à laquelle s’accrochent les socialistes pour tenter de refaire surface.*
Ce qui peut permettre le succès de ceux qui posent l’écologie comme pierre angulaire de toute politique, ce sont les urgences environnementales. Une prise de conscience réelle qui n’a qu’un an à peine. On votait Vert depuis la présidentielle de 1974 comme aiguillon pour faire avancer la cause écologique, aujourd’hui cela devient un vote de conviction. Voter Écolo, un vote utile, c’est nouveau et mobilisateur. L’attachement des populations à leur pays et à leur territoire sera une force considérable pour protéger ce qui peut encore l’être des désastres qui s’annoncent. Mais l’ampleur des mesures à prendre, qui doivent témoigner d’une rupture radicale avec la société de croissance, seront difficiles à prendre. Il suffit de se rappeler que les manifestations des Gilets jaunes pendant des mois et des mois avaient pour point de départ un refus de la taxe carbone, mesure pourtant indispensable pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Toutes les mesures jugées punitives et technocratiques visant à une transition autoritaire seraient largement rejetées. Il était facile d’agréger les votes sur « je suis le parti du climat et de l’avenir, on doit agir pour nos enfants ». Il sera beaucoup plus difficile de rassembler sur « on doit sortir du système productiviste, de la croissance économique, de la société de consommation, de la défense du pouvoir d’achat, et lourdement taxer les produits polluants du panier de la ménagère et du budget du conducteur ». D’autre part l’électeur peut rattacher un certain nombre de domaines à l’écologie, santé, Agriculture, Politique de l’énergie et du logement etc… Mais comment l’écologie politique peut-elle aborder d’autres facettes du pouvoir, la politique éducative, la Défense nationale, les Affaires Étrangères, les flux migratoires ?
Qui peut imaginer que le défi écologique pourra se relever seulement à la marge ? Chaque ministère traditionnel devrait avoir une optique écologique explicite dans son périmètre d’action. Par exemple, le ministère de la Jeunesse, qui actuellement ne s’intéresse qu’aux jeunes d’aujourd’hui, sera également celui des Générations futures. Nous voulons un gouvernement qui considère que l’écologie est un problème transversal, qui doit être traité en synergie par tous les ministres sans exception :
- ministre de l’Économie biophysique et des Flux financiers
- ministre de l’Énergie durable en adéquation avec les besoins
- ministre de l’Équilibre entre population et alimentation
- ministre du Travail et du Temps partagé
- ministre de la Protection civile des populations
- ministre de la Relocalisation et de la mobilité
- ministre des techniques douces et appropriées
- ministre de l’Espérance de vie en bonne santé
- ministre de la Sobriété partagée et de la Lutte contre les inégalités
- ministre de la Jeunesse et des Générations futures
- ministre de la Nature et de la Biodiversité
- ministre de la Subsidiarité entre territoires
NB : Dans son livre « L’écologie à l’épreuve du pouvoir » (2016), Michel Sourrouille détaille le programme de chacun de ces ministères en montrant que l’écologie est la matrice dans laquelle doit se former tous les autres paramètres : un politique performant est d’abord un bon écologiste.