En Europe, les rituels liés à l’approche de l’hiver sont ancestraux. Fixer la naissance de Jésus près du jour le plus court de l’année, ce fut d’abord la tentative de l’Eglise catholique de nier un paganisme proche de la Nature.
La liturgie de la Messe de l’Aurore rappelle que la nuit est passée, le jour est avancé. L’invention du père Noël résulte d’un détournement historique complémentaire. L’Église catholique avait décidé de remplacer les figures païennes par des saints. Saint Nicolas de Lycie désignait le saint protecteur des tout-petits car, selon la légende, il aurait ressuscité trois enfants trucidés par un horrible boucher. Mais il était fêté le 6 décembre : un personnage, habillé comme on imaginait que saint Nicolas l’était (grande barbe, crosse d’évêque, grand vêtement à capuche), va alors de maison en maison pour offrir des cadeaux aux enfants sages.
C’est seulement en 1809 que l’Américain Washington Irving a créé le personnage du Père Noël. La mondialisation du Père Noël peut commencer, y compris avec sa couleur rouge, utilisée dès 1866. De nombreuses firmes avaient déjà utilisé cette symbolique dans des publicités, mais Coca-Cola a largement contribué à fixer l’image actuelle : à partir de 1930, une série de publicités pour la marque Coca-Cola utilise le costume rouge et blanc. En France les catholiques, qui depuis longtemps s’échangeaient des petits cadeaux à Noël le 25 décembre en l’honneur de la naissance du Christ, ont résisté un temps au « père Noël ». Mais entre le XIX et le XXe siècle, des chrétiens associent cette « fête des enfants » à celle de l’Enfant Jésus : Saint Nicolas fera désormais sa tournée la nuit du 24 décembre.
Le père Noël n’est qu’un hérétique dont la hotte va être garnie par les marchands du Temple. Aujourd’hui l’enfant Jésus est bien oublié, Noël est devenu la fête des marchands. Même des pays n’ayant pas de tradition chrétienne comme la Chine utilisent désormais le 25 décembre comme outil de vente. Rien n’est plus emblématique de l’esprit de notre temps que cette fête de Noël (censée représenter la naissance du fondateur d’une religion à l’origine ascétique) qui a dégénéré en un rite purement commercial et mène à son paroxysme la fièvre consumériste. Il nous faut supprimer le père Noël.
Les Trente raisonnables
« Trois heures de courses de Noël dans les grands magasins. La guirlande pour décorer le sapin ? Made in China. La veste en laine polaire du neveu ? Made in China. Les baskets pour la nièce ? Made in China. L’iPhone. Made in China. Même la canne à pêche auto-offerte, made in China. Nous dépensons trop, individuellement et collectivement, par rapport à ce que nous produisons, individuellement et collectivement, comme richesses. » C’est ainsi que s’exprime Pierre-Antoine Delhommais dans LeMonde du 19-20 décembre, qui nous souhaite de rentrer dans les « Trente raisonnables » (après les Trente glorieuses, puis les Trente dépensières).
Deux méthodes complémentaires pour arriver à ce résultat : la démondialisation et la suppression du père Noël !