Le projet d’Al Gore, intitulé 24 Heures de vérité, est une réponse aux climatosceptiques, dont le nombre aux Etats-Unis est alimenté par la crise de l’emploi et la campagne des républicains contre les réglementations environnementales. « Il y a quatre lobbyistes antiréchauffement climatique pour chaque membre du Congrès », dénonce Al Gore*. La diffusion de ce documentaire vient de commencer le 14 septembre à Mexico. Nous n’allons pas épiloguer sur quelque chose que nous n’avons pas vu. Nous préférons relater les propos du glaciologue Claude Lorius** dont les travaux ont permis à la fois de révéler les liens entre réchauffement climatique et gaz à effet de serre et de dénoncer l’aveuglement des climatosceptiques :
« Que se passe-t-il quand on aura tout mangé, tout utilisé, tout pollué ? C’est quand, le bord du gouffre ? Le jour où le dernier puits de pétrole percé à grand renfort de dollars et de hautes technologies par 4000 mètres de profondeur dans les fonds marins de l’Arctique, le jour où la dernière veine de charbon aura été saignée, la fin de l’énergie tissera le linceul de ce qu’on appelle la modernité. Nous ne pouvons nous empêcher d’être possédés par un pessimisme profond. Oh ! Non pas que l’homme soit menacé ! Il s’entrégorgera, il se déplacera, il mourra de faim, de soif, de maladies, mais il ne disparaîtra pas. La banquise aura disparu qu’il sera encore là. A s’autodétruire. Nous ne sommes pas pessimistes sur sa survie, nous sommes pessimistes sur sa sagesse, sur sa compréhension qu’il vit une époque charnière sans précédent ; qu’il doit veiller sur la Terre de ses enfants. Nous sommes inquiets sur son sens de la responsabilité.
Il apparaît que ce pisse-froid de Malthus avait raison d’affirmer qu’il y avait une limite à l’expansion humaine, au-delà de laquelle l’humanité serait en crise… mais il est très difficile à l’homme d’admettre ce type de raisonnement. Bientôt nous n’aurons plus à opter ou non pour la décroissance, elle sera inéluctable. La seule question qui se pose dorénavant à nous, c’est : que voulons-nous faire de ce monde dont nous sommes devenus dans le même temps les fossoyeurs et les gardiens ? Les gardiens parce que les fossoyeurs… »
* LE MONDE du 14 septembre 2011, Le come-back d’Al Gore
** Voyage dans l’anthropocène de Claude Lorius et Laurent Carpentier (Actes Sud, 2010)