Peu de personnes méritent d’être mondialement connu et écouté, voici ce qu’apporte Paul Robin à l’intelligence collective.
– Paul Robin naît en 1837 dans une famille bourgeoise, catholique et patriote. Élève de l’École normale supérieure de Paris, il passe ses licences de sciences mathématiques et de sciences physiques ; il devient surtout darwiniste et athée. Il est brièvement professeur de lycée (1861-1865), mais entre en conflit avec son administration sur des questions pédagogiques. En 1865, il part en Belgique où il noue des contacts avec des militants de l’Association internationale des travailleurs (AIT), concourt à la création de la section belge de l’AIT et il est expulsé pour avoir participé au mouvement de soutien à une grève. À Londres, où il fréquente les militants de l’Internationale, il est un temps membre du Conseil général de l’Internationale, mais ses liens intellectuels et son amitié personnelle avec l’anarchiste Bakounine provoquèrent son expulsion de l’AIT par Marx dès 1871. Les Justes sont souvent mis au ban, et parfois même assassiné !
– Robin avait collaboré au Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson, devenu directeur de l’enseignement primaire. Grâce à lui, Paul Robin est placé à la tête en 1880 d’un orphelinat à Cempuis (Oise). Il met en pratique, auprès d’un nombre important d’enfants, les théories sur l’éducation intégrale qu’il a formulées dès 1869-1870 : « Laissez l’enfant faire lui-même ses découvertes, attendez ses questions, répondez-y sobrement pour que son esprit continue ses propres efforts, gardez-vous par-dessus tout de lui imposer des idées toutes faites, transmises par une routine abrutissante. » Cette éducation, qui veut donner aux enfants des classes défavorisées le moyen d’accéder à la culture, se caractérise, outre son athéisme et son internationalisme, par le souci de développer harmonieusement l’individu dans sa globalité, tant sur le plan physique qu’intellectuel ou moral : « Tout enfant a le droit de devenir en même temps un travailleur des bras et un travailleur de la tête ». Il veut développer un esprit rationnel chez l’enfant, loin des « fantômes » de « l’imposture religieuse ». Donc une éducation sans Dieu et sans Patrie.
– Un autre aspect très novateur de l’œuvre que Robin accomplit à l’orphelinat est la « coéducation des sexes », filles et garçons sont dans la même classe, ce qui est révolutionnaire pour l’époque; les filles ne sont plus instruites dans l’optique d’une fonction sociale dominée. L’éducation physique représente un tiers du temps d’activité sans jamais faire de compétition ni de sport élitiste. Il faisait chanter aux enfants « La Marseillaise de la Paix ». Les méthodes éducatives de Paul Robin, trop avancées pour son époque, lui vaudront des ennuis, On prit prétexte de son « antipatriotisme » pour le révoquer en 1894 à la suite d’une campagne de presse très très virulente menée contre lui.
– Paul Robin crée à Paris en 1889 le premier centre d’information et de vente de produits anticonceptionnels. En 1896, il fonde la Ligue pour la régénération humaine. Il introduit en France les principes néo-malthusiens qu’il a découverts en Angleterre et milite inlassablement pour diffuser dans la classe ouvrière les moyens du contrôle des naissances. A ne pas confondre avec une morale qui fait obstacle au plaisir et à l’amour, comme le malthusianisme de Malthus. Il voit dans « la prudence parentale » vis-à-vis de la fécondité un moyen d’émancipation des plus pauvres et particulièrement des femmes. Il publie de très nombreuses brochures de propagande ; le néo-malthusianisme est une arme au service de l’émancipation des femmes. Il fait des conférences, distribue des tracts pour faire connaître « les moyens efficaces et non douloureux [que fournit la science] pour ne mettre d’enfants au monde que quand elles le veulent ». Il crée entre autres une « ligue anti-esclavagiste pour l’affranchissement des filles » et même un syndicat de prostituées.
– Sentant ses forces et ses facultés décliner, Paul Robin met fin volontairement à ses jours en 1912 ; positiviste jusqu’au bout, il étudie les progrès de l’effet du poison sur lui-même. Par ailleurs membre de la Société d’autopsie, il souhaitait qu’après son décès son corps fût utilisé comme engrais ; mais il est finalement incinéré au cimetière du Père-Lachaise.
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extraits : En s’inquiétant d’une faiblesse de la démographie, Emmanuel Macron fait écho à une longue tradition historique. Les discours natalistes naissent au lendemain de la défaite face à la Prusse, en 1870. l’Alliance nationale pour l’accroissement de la population française est créée en 1896 par le statisticien Jacques Bertillon. En 1896, la même année que Bertillon, le néo-malthusien Paul Robin avait fondé la Ligue de la régénération humaine dont la devise sera « bonne naissance-éducation intégrale ». Mais une loi en 1920 qui assimile la contraception à l’avortement. Toute propagande anticonceptionnelle est interdite. Le crime d’avortement est passible de la cour d’Assises. Le néo-malthusianisme de Paul Robin devient hors la loi….
extraits : Un texte de 1896 de Paul Robin : Femmes, sœurs bien-aimées ! « Si vous jugez que votre santé, votre situation matérielle ou les circonstances ne vous permettent pas d’avoir un enfant dans de bonnes conditions, de lui donner les soins de toute nature et l’éducation attentive dont il aurait besoin, vous avez le droit et le devoir de vous abstenir d’être mères. Si vous avez déjà des enfants, vous pourrez mieux les nourrir et les élever qu’en ajoutant imprudemment à leur nombre. Si vous n’en avez pas encore, choisissez sagement le temps où vous et votre conjoint, vous vous trouverez dans des conditions favorables de santé, de bien-être et de sécurité. Cela dépend de vous, vous êtes absolument maîtresses de votre destinée. Il ne faut pas que vous ignoriez, ni vous ni vos compagnes de souffrance, que la science vous a émancipées de l’épouvantable fatalité d’être mères contre votre volonté. »
Le néo-malthusianisme prépare donc l’émergence du féminisme. Le Planning familial, le Mouvement de libération des femmes (MLF) et le Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception (MLAC) doivent beaucoup à Paul Robin. La Biosphère aussi !….
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Entraves aux théories et aux activités du mouvement pour le contrôle des naissances en France et aux États-Unis (1873-1940)
exemples de pente glissante :
« L’écologie » est un prétexte pour justifier un totalitarisme rampant…
Ou bien, la « liberté d’avorter » ouvre la voie aux dérives eugénistes… La preuve, le nombre de femmes qui avortent quand un diagnostic prénatal montre qu’il y a un chromosome surnuméraire !
La Ligue de la régénération humaine, fondée en 1896 par Paul Robin, fait l’apologie du pessaire comme moyen d’éviter les grandes familles. Évitons de confondre « régénération humaine » et eugénisme. Évitons le sophisme de la pente glissante, une spécialité sur ce blog de Michel C. : « Paul Robin est le précurseur de l’EUGÉNISME en France ».
Le sophisme de la pente glissante est un élément de langage souvent utilisé par les réactionnaires, ceux qui ne veulent pas reconnaître la validité d’une bonne idée en accusant l’autre d’avoir de bien vilaines pensées. Paul Robin a été un précurseur de la contraception et de la libération de la femme, pas de l’eugénisme de Galton, d’éradication de caractères jugés handicapants… ou d’amélioration de la qualité du cheptel humain.
Si ma spécialité sur ce blog est le sophisme de la pente glissante… que dire alors de celles (spécialités) de Monsieur Biosphère ? Quoi qu’il en soit, je ne pense pas que ce soit comme ça qu’ON puisse faire progresser l’intelligence collective.
Que Paul Robin ait été un précurseur de la contraception et de la libération de la femme, je n’ai jamais dit le contraire. D’ailleurs À 13:29 j’ai dit ce que nous devenons retenir de lui.
Cependant j’estime qu’il faut, aussi, faire preuve d’honnêteté (intellectuelle) en ne négligeant pas cette composante, l’eugénisme… qui reste un vaste sujet.
Et je pense avoir donné suffisamment d’éléments (et de sources) pour que chacun puisse juger par lui-même.
Cher Michel C., nous sommes toujours sensibles à tous vos commentaires, souvent très pertinents.
Mais nous avons constaté un autre prisme à votre tendance à la pente glissante (ici pour faire peur des vilains eugénistes), celui de vouloir toujours avoir le dernier mot. Si cela peut vous faire plaisir, faites-vous plaisir. A vous d’en rajouter maintenant…
On ne sait jamais qui a raison ou qui a tort. C’est difficile de juger.
Moi, j’ai longtemps donné raison à tout le monde. Jusqu’au jour où je me suis aperçu que la plupart des gens à qui je donnais raison avaient tort ! Donc, j’avais raison ! Par conséquent, j’avais tort ! Tort de donner raison à des gens qui avaient le tort de croire qu’ils avaient raison. C’est-à-dire que moi qui n’avais pas tort, je n’avais aucune raison de ne pas donner tort à des gens qui prétendaient avoir raison, alors qu’ils avaient tort ! J’ai raison, non ? Puisqu’ils avaient tort ! Et sans raison, encore !
Là, j’insiste, parce que … moi aussi, il arrive que j’aie tort. Mais quand j’ai tort, j’ai mes raisons, que je ne donne pas. Ce serait reconnaître mes torts !!! J’ai raison, non ?
Remarquez … il m’arrive aussi de donner raison à des gens qui ont raison aussi. Mais, là encore, c’est un tort. C’est comme si je donnais tort à des gens qui ont tort. Il n’y a pas de raison !
En résumé, je crois qu’on a toujours tort d’essayer d’avoir raison devant des gens qui ont toutes les bonnes raisons de croire qu’ils n’ont pas tort !
🙂 🙂 🙂 !!!
L’autre grand figure du malthusianisme et du droit des femmes en France au cours du 20ème siècle est Jeanne Humbert, résistante et féministe.
J’ai eu la chance avec Francis Ronsin de rencontrer sa fille, à 96 ans elle poursuivait le combat.
– « Que les néo-malthusiens aient été des pionniers ou des précurseurs par leur combat en faveur de la contraception et de la limitation des naissances est un fait généralement bien établi dans les travaux qui leur sont consacrés, mais ceux-ci négligent la composante eugénique du mouvement. » (P.437 : Aux origines de l’eugénisme en France : le néo-malthusianisme – persee.fr)
=> Pas question donc de le négliger !
– « L’anarchisme et le féminisme sont deux mouvements qui se côtoient depuis la seconde moitié du XIXe siècle. » (Anarchisme et féminisme – Wikipedia)
=> Et je ne trouve rien d’étonnant à ça.
Reste à voir comment, et pourquoi, les anarchistes (certains anarchistes) ont pu se faire les apôtres du (néo)malthusianisme. Et donc de l’eugénisme. ( à suivre )
(suite) Je pense que cet article peut nous aider à répondre à cette question :
– Mouvement ouvrier et néo-malthusianisme au début du XXe siècle (persee.fr)
En juin 1965… à la Société Démographique historique… André Armengaud (historien français, spécialiste de l’histoire des populations) commence ainsi son discours :
– « La misère de la classe ouvrière vient-elle du trop grand nombre des hommes ou de la mauvaise organisation de la société ? Sera-t-elle supprimée par la révolution ou par la limitation des naissances ? C’est ainsi, je crois, qu’on peut très grossièrement schématiser le long débat qui, dès la première moitié du XIXe siècle, a opposé socialistes et malthusiens. […]
Curieux personnage que Paul Robin ! [etc. etc.] »
=> Bonne lecture. Petite question pour finir : 60 ans plus tard… où en est-ON avec ça ?
Comme derrière chaque mot il y a une idée, voire une idéologie (système d’idées)… et que c’est la même chose de chaque nom connu… ON peut donc dire aussi que Paul Robin est le précurseur de l’EUGÉNISME en France. D’ailleurs Paul Robin est notamment connu pour ça.
Les liens entre malthusianisme (néo-malthusianisme) et eugénisme, et tout le reste, sont établis depuis longtemps.
– Aux origines de l’eugénisme en France : le néo-malthusianisme (1896-1914) (persee.fr)
Comme beaucoup d’idéologies, l’eugénisme part d’une bonne intention. Seulement l’enfer est pavé de bonnes intentions. L’eugénisme part de l’idée que l’Homme peut, et doit, être amélioré, «régénéré» (voir la Ligue de la Régénération humaine de Paul Robin).
La méthode n’est rien d’autre que la sélection génétique. (à suivre)
(suite) Sélection bien entendu artificielle, ou scientifique (avec ou sans « »), en tous cas arbitraire. Ce n’est que sur une certaine idée de l’homme «idéal», «parfait», que cette sélection peut-être opérée.
Comment déjà ne pas faire le lien avec cet homme «amélioré», «augmenté» voire «prolongé», que nous promet le transhumanisme ? Comment peut-ON alors être contre le fait ou l’idée de vouloir dépasser les Lois de la Nature, de les bafouer, et en même temps être pour ce genre de méthodes, contre-nature ?
Bref, comme quoi le sujet est quelque peu compliqué.
Rappelons qu’à l’époque de Paul Robin les connaissances en génétique n’étaient pas très avancées. Et que la génétique était alors une sorte de mode… comme la radioactivité à la même époque. Et qu’ON se plaisait à croire qu’avec ça l’avenir serait radieux.
Toujours l’idée du Progrès qui progresse, pour des siècles et des siècles amen.
(à suivre)
(et fin) Je crois donc que Paul Robin faisait tout simplement fausse route avec ça.
Qu’il aurait mieux fait de s’occuper d’éducation, d’émancipation et d’organisation sociale, sans avoir besoin d’imaginer une quelconque sélection. Retenons que ce qu’il souhaitait avant tout n’était rien d’autre que l’égalité et la liberté des individus, et des sexes.