Les 300 journalistes membres de l’Association des journalistes de l’environnement (AJE), de l’Association des journalistes-écrivains pour la nature et l’écologie (JNE) et de l’association des journalistes de l’énergie (AJDE) aimeraient interroger Delphine Batho sur son programme. Sans succès depuis trois mois ! Malgré de très nombreuses demandes formulées à son cabinet, Delphine Batho ne daigne répondre à la presse spécialisée. L’agenda surchargé ? Delphine Batho est probablement la seule ministre du gouvernement Ayrault à ne pas publier le sien ! Cela ne présage rien de bon pour l’organisation du prochain débat national sur l’énergie. Passons en revue les 6 personnalités* qui constituent le comité de pilotage du débat sur l’énergie:
C’est Delphine Batho elle-même qui a choisi les cinq « sages ». Deux personnalités sont ouvertement pro-nucléaires : Anne Lauvergeon, ex-patronne d’Areva et Pascal Colombani, administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) de 2000 à 2002 ! Une troisième est sympathisante avérée : Laurence Tubiana, directrice de la chaire de développement durable à Sciences Po, est adepte d’une politique de croissance (qui nécessite plus d’énergie !), veut contenir le changement climatique dans des limites supportables (le nucléaire sans émission de gaz à effet de serre ?) et prône une sûreté et sécurité plus grande… des centrales nucléaires. Il s’agit donc de nucléariser davantage. Alors Bruno Rebelle, ex-responsable de Greenpeace, anti-nucléaire ? Interrogé sur la position des ONG françaises face au nucléaire, il faisait preuve d’une ambiguïté totale : « La plupart des ONG se sont enfermées dans une logique de dénonciation… Les ONG ne mettent pas en perspective l’emploi, les stratégies pour contrer la dépendance énergétique… » Derrière l’emploi et l’indépendance énergétique de la France, chacun sait que se cache aussi le nucléaire. Le climatologue Jean Jouzel se laissera-t-il lui aussi tenté par un nucléaire « sans émissions de carbone » ?
Delphine Batho va présider ce comité, a-t-elle la fibre écolo ? Elle a été porte-parole de François Hollande pendant sa campagne. Elle a été de 2003 à 2008 secrétaire nationale chargée des questions de sécurité au PS. Elle n’avait pas demandé à devenir ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Si son passé ne fait pas de Delphine Batho une écolo, que dit son présent ? Delphine Batho laisse perdurer sans réagir les grands projets inutiles. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) vient d’approuver le projet de décret autorisant la création d’ITER, réacteur expérimental international à fusion nucléaire. Ce projet très centralisé, productiviste, n’a fait l’objet d’aucune évaluation scientifique contradictoire : c’est un projet non maîtrisable critiqué par les physiciens du plasma et même Masatoshi Koshiba (prix Nobel japonais de physique). On n’a pas entendu Delphine Batho s’exprimer sur le projet ASTRID (Advanced Sodium Technological Reactor for Industrial Demonstration) qui pourtant se précise. Par contre la ministre de l’écologie Delphine Batho s’est déjà positionne POUR l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (le joujou d’Ayrault) et POUR « le nucléaire, filière d’avenir » (phrase culte de Montebourg).
La conférence sur l’énergie aura un composante pro-nucléaire très prononcée avec un tel « comité de pilotage »…
* LE MONDE du 11-12 novembre 2012, Six personnalités pour incarner le débat national sur l’énergie
Carton rouge pour les 6 mois de la présidence Hollande
La préparation du débat national sur la transition énergétique part sur de mauvaises bases. Depuis la conférence environnementale qui en a donné les contours, rien ne semble avoir avancé, hormis la nomination d’un comité de pilotage qui ne respecte pas la pluralité des points vue. Aucune instance n’est en place, pas même la Commission Nationale qui doit être l’organe démocratique du débat. Aucune précision n’est donnée sur le rôle et les missions des différentes commissions. Pas d’information sur les documents qui seront soumis au débat, le déroulement du débat public, l’implication des citoyens et des différents acteurs, la mobilisation des collectivités territoriales, les règles de communication pendant le débat, en particulier pour les grandes entreprises de l’énergie, ni sur la plume qui rédigera la synthèse ou encore sur la méthode employée pour sa validation.
CLER – Réseau pour la transition énergétique –
Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme –
Les Amis de la Terre –
Réseau Sortir du nucléaire –
actualisation :
Nous ne participerons pas au débat national sur l’énergie car nous n’avons plus confiance dans ce débat et dans la réelle volonté du gouvernement de réussir la transition énergétique, a déclaré à l’AFP le responsable de Greenpeace, à l’issue d’un entretien avec la ministre de l’Ecologie Delphine Batho.
La composition du comité de pilotage (NDLR, qui doit animer le débat au niveau national) a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, a expliqué Jean-François Julliard.
Nous sommes amers, frustrés et en colère car on attendait mieux de ce gouvernement, a commenté Jean-François Julliard, mais on ne veut pas servir de caution verte à ce débat. Le responsable de l’ONG a indiqué avoir demandé sans succès à la ministre une ouverture du comité à d’autres acteurs.
(©AFP / 12 novembre 2012 21h13)