SOMMAIRE
1) un mouvement anti-croissance, critique de la droite comme de la gauche
2) un mouvement réaliste, considérant la catastrophe comme probable
3) un mouvement qui lutte contre la bureaucratisation de l’écologie politique
4) un mouvement de considération de la nature, refusant l’anthropocentrisme exacerbé
5) un mouvement démocratique élargi dans le temps et dans l’espace
6) un mouvement reconsidérant la division excessive du travail
7) un mouvement qui sait désobéir et pratique la non-violence
8) un mouvement qui repose sur l’exemplarité des militants
9) un mouvement qui s’inscrit dans des réseaux
A) Développement
1/9) un mouvement anti-croissance, critique de la droite comme de la gauche
La croissance permanente dans un monde fini est impossible, pourtant la droite libérale et la social-démocratie restent sur ce schéma de pensée. Après plus de soixante ans de volonté de croissance économique, l’empreinte écologique de l’humanité a dépassé les capacités de la planète de 50 %. La relance keynésienne ou la croissance « verte » ne peuvent qu’accentuer les méfaits de la croissance. Nous dilapidons le capital naturel et les inégalités sociales s’exacerbent. Nous risquons la décroissance subie (crise, récession économique, effondrement de la civilisation thermo-industrielle). L’écologie politique détermine les décisions qui doivent être prises dans ce difficile contexte. Il est vital d’inverser les pratiques actuelles qui cultivent la démesure de la société de consommation et le culte du progrès technique. Nous utiliserons des techniques douces, douces à l’homme et à la nature. Il nous faut maîtriser la nécessaire décroissance des flux de matières et d’énergie et apprendre à partager équitablement la pénurie.
Les efforts à accomplir ne peuvent être acceptés que si les solutions sont discutées, à l’intérieur d’EELV, au niveau national ou international, dans le cadre des familles ou de l’école. Il s’agit de repenser l’échelle de nos besoins, d’analyser les usages de nos consommations et les utilités de nos productions. Il s’agit de mettre en place une démocratie participative qui s’interroge et envisage un avenir durable. Par exemple, de quelles quantité d’électricité avons-nous besoin ? La voiture électrique est-elle une voiture propre ? Faut-il abandonner la voiture individuelle (dévoiturage) ? Quel mode de déplacement doit-il être favorisé ? Comment ? Etc. Il nous faut cultiver le sens des limites dans tous les domaines, y compris au niveau démographique. Il nous faut considérer l’urgence écologique.
2/9) un mouvement réaliste, considérant la catastrophe comme probable
L’écologie scientifique nous indique que tous les indicateurs de la planète sont dégradés (stress hydrique, épuisement des ressources fossiles, des réserves halieutiques, des sols, etc.). Nous sommes entrés dans l’anthropocène : l’homme est devenu une force « géologique ». La raison première de ces dégradations résulte de l’abondance actuelle de l’énergie fossile qui a démultiplié la puissance de l’homme sur la nature. Or le pic du pétrole conventionnel est dépassé, nous allons bientôt entrer dans une période structurelle de descente énergétique. Quand nous n’aurons plus les 150 esclaves énergétiques qui servent chaque Français, la rupture sera douloureuse et il faut nous y préparer. De plus on se rapproche dangereusement du point de basculement climatique de la Terre.
L’avenir est donc à la sobriété énergétique que nous voulons organisée et non subie. Il nous faut montrer que la force de travail des hommes est une valeur précieuse, condition indispensable à toute activité. Le chômage sera moindre car il faudra des bras dans l’agriculture biologique comme dans beaucoup d’autres activités autrefois capitalistiques (utilisant beaucoup de capital technique). Il nous faudra veiller cependant à ce qu’une nouvelle nomenklatura n’aménage pas la pénurie à son profit. Les privilèges ne sont acceptables ni dans la société, ni dans notre parti.
3/9) un mouvement qui lutte contre la bureaucratisation de l’écologie politique
En France, la date symbolique de l’écologisation de la politique est la présidentielle de 1974 avec la candidature de René Dumont, soutenu par le mouvement associatif environnemental. Les Verts naissent en 1984. Après l’ouverture à la société civile aux européennes de juin 2009 sous l’étiquette Europe Ecologie, il y a création d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) à Lyon le 13 novembre 2010. Depuis les dernières élections, il y a maintenant des groupes parlementaires EELV au Sénat et à l’Assemblée nationale.
Or, plus un parti se développe, plus la logique de l’organisation a tendance à primer la logique des idées. Toutes les grandes organisations devant mener à bien des tâches complexes connaissent ce processus de bureaucratisation. Confondue avec le parti, l’organisation permanente, de moyen devient une fin, à laquelle on peut finir par tout subordonner : principes, convictions personnelles, etc. Le parti devient un parti de cadres et non un mouvement de militants. En 2008 on dénombrait déjà 2000 élus pour quelque 6000 adhérents. Les dirigeants du parti risquent d’adopter un comportement de plus en plus autocratique. La formation Cédis (Centre d’écodéveloppement et d’initiative sociale), payante et importante, ne s’adresse qu’aux élus. Par contre la formation du militant de base est bénévole, peu structurée nationalement.
Pour briser la rupture entre élus et militants, la réflexion permanente permet le contre-pouvoir. C’est d’abord aux militants de lutter contre la bureaucratisation de leur parti. Le débat d’idées dans les groupes locaux doit prendre au moins autant de temps que les impératifs de l’organisation (voir « démocratie participative » dans le point 1). Il nous faut aussi reconsidérer notre rapport à la nature.
4/9) un mouvement de considération de la nature, refusant l’anthropocentrisme exacerbé
Beaucoup considèrent aujourd’hui la nature comme « extérieure » à l’humanité. Cette « extériorité » nous déresponsabilise et permet tous les abus : épuisement des énergies fossiles, dérèglement du climat, recul des terres arables, agonie des sols, raréfaction de l’eau douce, dépeuplement des océans, crise des agricultures, destruction de la biodiversité…
Ce dualisme résulte de l’attribution aux seuls êtres humains d’une considération morale exclusive : c’est le fait de l’anthropocentrisme. L’écologie politique adopte un point de vue plus large : l’ensemble des êtres vivants mérite une considération morale directe. Cette approche se nomme le biocentrisme. L’écologie politique porte aussi en elle un écocentrisme, c’est-à-dire la prise en considération des entités supra-individuelles, comme les espèces ou les écosystèmes. C’est un renversement des fondements de la philosophie occidentale, encore centrés sur la séparation entre l’espèce humaine et la nature… Cela ouvre la perspective de droits de la nature. Notre cohérence politique est fonction de notre capacité à internaliser, dans le domaine économique et social, tout ce qui a été externalisé au nom d’une prétendue dualité entre humanité et nature. Il s’agit d’envisager un élargissement de la démocratie.
5/9) un mouvement démocratique élargi dans le temps et dans l’espace
La démocratie actuelle s’intéresse seulement à des groupes restreints dans l’espace et le temps. Les conseils municipaux s’occupent de leur commune, les députés élaborent des lois dans l’intérêt de la nation, etc. Avec ce processus, les générations présentes sont favorisées au détriment des générations futures, la biodiversité sacrifiée, les ressources naturelles dilapidées. L’écologie politique porte un autre regard sur la démocratie en s’intéressant aux acteurs absents : tiers qui ne peut prendre la parole lors d’une négociation, ou qui n’est pas invité à la table des négociations. Par exemple le milieu naturel, les êtres vivants non humains, les générations futures.
Tout le problème est de savoir comment accorder un droit de vote à ceux qui ne peuvent pas s’exprimer. Tout simplement en s’en faisant leur représentant. Un décisionnaire qui ne représente pas dans ses choix une bonne analyse dans l’espace (considération de tous les éléments de la planète) et dans le temps (considération du futur) n’est pas un bon démocrate. L’écologiste, citoyen lambda ou militant, élu ou non, doit apprendre à s’exprimer au nom des acteurs absents. Cela implique la rupture avec le système productif actuel.
6/9) un mouvement reconsidérant la division excessive du travail
Notre civilisation thermo-industrielle a atteint des sommets de complexité, et la division du travail, nationale et internationale, est généralisée. Le salaire et la multiplication des salariés dépendent d’une spécialisation des tâches de plus en plus poussée. Or plus la division du travail est poussée, plus la société est fragile. Nous sommes dépendants d’une suite de travaux parcellaires de plus en plus éloignés de notre lieu de vie et nécessitant des quantités croissantes d’énergie fossile. Quand cette société va commencer à affronter les difficultés socio-économiques et/ou écologiques, toute la structure des interdépendances socioprofessionnelles va s’écrouler par un effet en chaîne : c’est l’effondrement. Notre empreinte écologique actuellement disproportionnée par rapport aux capacités de la nature ne peut se réduire qu’en diminuant la division nationale et internationale du travail.
Parler globalement de création d’emploi sans s’interroger sur leur utilité et leur durabilité n’a aucune signification. Il faut se préparer aux métiers du futur, techniques douces, emplois de proximité, relocalisation. Au-delà de la nécessaire démondialisation, nous avons à revaloriser le travail manuel et les petites entreprises, conseiller aux jeunes l’agriculture ou l’artisanat plutôt que les hautes études, faire preuve de solidarités de proximité au lieu de tout miser sur les caisses déficitaires de la Sécurité sociale. Le travailleur doit avoir le sentiment d’être directement utile à la collectivité. Il nous faut convaincre, cela passe parfois par la désobéissance civile et toujours par la non-violence.
7/9) un mouvement qui sait désobéir et pratique la non-violence
C’est l’obéissance servile aux mécanismes actuels de détérioration des rapports humains et des équilibres de la biosphère qui nous concocte l’arrivée d’un autoritarisme. Dans ce contexte, le rôle d’un parti écologiste est de forger ses militants à résister à cette soumission volontaire. Les faucheurs d’OGM, les objecteurs de croissance, les casseurs de pub et les lanceurs d’alerte sont l’avant-garde du mouvement écologiste.
Notre militantisme choisit la non-violence. Aucune vérité ne peut s’imposer, elle doit être expliquée, comprise et entraîner l’adhésion. L’adage « la fin justifie les moyens » est exclu, la fin est déjà dans les moyens. Cela implique aussi l’objection de conscience, le refus de porter les armes dans des conflits collectifs. La guerre n’a jamais résolu quelque problème que ce soit. L’abandon unilatéral de la dissuasion nucléaire française et la non-intervention armée où que ce soit dans le monde peut être envisagé.
Construire un monde pacifique est un tâche longue et difficile. Il ne suffit pas d’agir par la parole, il nous faut aussi mettre notre pratique en accord avec nos idées.
8/9) un mouvement qui repose sur l’exemplarité des militants
Chacun de nous respecte des codes sociaux, nous jouons un rôle conforme à notre statut, respectant des normes et souvent oublieux des valeurs. Nous agissons comme dans un miroir, par rapport aux autres ; c’est un mécanisme d’interaction spéculaire. Or le système cultive des éléments de langage (croissance, emploi, compétitivité, profit, consumérisme, etc.) qui nous font oublier le sens des limites. Il nous faut aller contre le langage commun, cultiver la simplicité volontaire, montrer l’exemple de la sobriété énergétique, refuser les mécanismes publicitaires et ceux de la mode, proscrire l’achat inutile et le besoin artificiel. Il s’agit de se démarquer de la société de consommation et de la société du spectacle. C’est l’autolimitation qui permettra de construire ensemble une société plus conviviale et plus égalitaire. Cessons d’attendre que le système change, il ne changera pas sans nous. C’est la stratégie du colibri.
Mais acquérir le sens des limites n’est pas réservé aux militants écolos. Nous attendons des autres qu’ils fassent de même. L’exemplarité de notre comportement devrait provoquer un effet boule de neige. Mais les inégalités de revenus empêchent la prise de conscience. Nous sommes dans un cercle vicieux imitation/ostentation (effet Veblen) qui ne peut s’arrêter que si les riches ne peuvent plus détruire la planète. L’écologie exige un partage équitable des ressources. La recherche des limites est un passage obligé pour permettre un équilibre durable entre les possibilités de la planète et l’harmonie sociale. Personne ne devrait s’arroger des privilèges de revenus et de consommation. Il nous faut porter le message de l’écologie politique dans toute la société.
9/9) un mouvement qui s’inscrit dans des réseaux
L’enjeu est de construire un parti réseau : coopérative politique, mouvement associatif, cercles de réflexion, il nous faut montrer notre capacité à créer une forme d’appartenance commune à un « peuple écolo ».
Il est possible de recommander la participation du militant écolo à une association à but environnemental. Savoir à quelle association adhérer relève du choix personnel. Il y a des organisations internationales comme Greenpeace, des fédérations d’association comme FNE, des association crées spécialement pour la protection de tel ou tel lieu de vie. La vie politique et la vie associative sont indissociables.
Le militant écolo peut aussi soutenir le mouvement des « territoires en transition ». Des communautés de résilience peuvent nous préparer aux chocs énergétiques, au changement climatique et à la crise alimentaire. Une action raisonnée de l’écocitoyen est une subtile synthèse, ancrée dans l’espace mondial et dans le long terme tout en s’accompagnant d’une pratique qui s’exerce de préférence dans son milieu d’appartenance. Le terme qui résume le mieux cette disposition d’esprit est glocal, fusion des deux mots « global » et « local » : agir localement tout en pensant globalement.
B) Lexique (explicitation des mots soulignés)
Acteur absent : au sens le plus large, qui ne peut prendre la parole lors d’une négociation, ou qui n’est pas invité à la table des négociations. Exemple : milieu naturel, être vivants non humains, générations futures. Cf. L.Sébastyien et F.Paran, Une négociation un peu plus écologique + une conservation un peu plus humaine = une gouvernance environnementale mesurée ? (communication au 71e congrès de l’Acfas, mai 2003). Il faut remarquer que la génération actuelle peut se permettre d’utiliser autant de ressources non reproductibles uniquement parce que les générations à venir sont exclues du marché actuel pour la simple raison qu’elles ne peuvent y être présentes ; sinon le prix s’élèverait déjà à l’infini. Il y a une dictature du présent sur l’avenir. Le seul moyen de protéger les générations à venir, c’est de se rééduquer de façon à ressentir quelque sympathie pour les êtres humains futurs de la même façon que vous êtes intéressés au bien-être de vos contemporains. Cette sympathique peut aller aussi vers les animaux, les êtres vivants et même les objets naturels.
Anthropocène : Selon la commission de stratigraphie de la Royal Geological Society de Londres, « la réaction du climat aux gaz à effet de serre et l’ampleur du changement de la biosphère rendent vraisemblable l’idée que nous soyons entrés dans une nouvelle époque sans comparaison possible avec aucun autre épisode interglaciaire du Quaternaire…. En d’autres termes, l’évolution elle-même a été orientée vers une nouvelle trajectoire ». En 2000, Stoermer et Crutzen proposèrent dans la newsletter de l’IGPB d’appeler cette nouvelle ère Anthropocène. (Voyage dans l’anthropocène de Claude Lorius et Laurent Carpentier, 2010)
Anthropocentrisme : L’attribution d’une considération morale exclusive aux seuls êtres humains est qualifiée d’anthropocentrisme. Parce que seuls certains êtres humains sont dotés de rationalité morale, les valeurs sont fondamentalement anthropogéniques ; elles sont générées par des êtres humains. (Du bon usage de la nature – pour une philosophie de l’environnement de Catherine et Raphaël Larrère)
Associations environnementales : une association dédié à un problème écologique même très local est notre allié naturel. Le PS s’inscrit aux côtés des syndicats : en effet les membres du Parti socialiste « doivent appartenir à une organisation syndicale de leur profession et au moins à une association » (statuts du Parti socialiste – titre 2, les militants – Article 2.2 : obligations syndicales et associatives des adhérents). EELV pourrait recommander à ses membres l’appartenance à une association environnementale. Le choix d’une association : savoir à quelle association adhérer relève d’une analyse des statuts de cette association. Par exemple Attac a « pour objet de produire et communiquer de l’information, de promouvoir l’éducation populaire, ainsi que de mener des actions de tous ordres en vue de la reconquête, par les citoyens, du pouvoir que la sphère financière exerce sur tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle dans l’ensemble du monde. Parmi ces moyens figure la taxation des transactions sur les marchés financiers. » Il n’y a nulle trace dans ces objectifs de préoccupation explicite à propos des rapports entre l’homme et la nature. Attac s’intéresse aux conséquences économiques et socio-politiques, pas aux déterminants écologiques.
Biocentrisme : Différentes théories morales proposent d’inclure l’ensemble des êtres vivants dans la sphère des individus méritant une considération morale directe. On parle alors de biocentrisme. Paul Taylor considère que tout être vivant est un centre-téléologique-de-vie. Les organismes vivants ont leur finalité, ils possèdent un bien qui leur est propre, l’accomplissement de leurs fonctions biologiques, qu’ils poursuivent par leurs propres moyens. Selon l’égalitarisme biocentrique, tous les êtres vivants ont la même valeur, et cette valeur nous impose le respect. (Du bon usage de la nature – pour une philosophie de l’environnement de Catherine et Raphaël Larrère)
Descente énergétique : « Si subitement nous n’avions plus ni pétrole, ni gaz, ni charbon, ce n’est pas 4 % du PIB que nous perdrions (la place de l’énergie dans le PIB), mais près de 99 %. » (Changer le monde, tout un programme de Jean-Marc Jancovici, 2011)
Capacité à internaliser : « Une autre manière de penser, c’est de transformer l’économie politique en écologie politique ; je veux dire que les flux retracés et mesurés par l’économiste doivent être reconnus comme dérivations entées sur les circuits de la Nature. Parce que la Comptabilité Nationale est fondée sur les transactions financières, elle compte pour rien la Nature à laquelle nous ne devons rien en fait de payement financier, mais à laquelle nous devons tout en fait de moyens d’existence… Le terme d’infrastructure est à présent populaire, il est bon d’avoir donné conscience que nos opérations dépendent d’une infrastructure de moyens de communication, transport, et distribution d’énergie. Mais cette infrastructure construite de main d’homme est elle-même superstructure relativement à l’infrastructure par nous trouvée, celle des ressources et circuits de la Nature. » (Bertrand de Jouvenel in Arcadie, essai sur le mieux vivre,1968)
Colibri (stratégie du) : Pierre Rabhi rappelle l’enseignement de la légende amérindienne du colibri : « Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés et atterrés observaient, impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’active, allant chercher quelques gouttes d’eau dans son bec pour les jeter sur le feu. Au bout d’un moment, le tatou, agacé par ses agissements dérisoires, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Tu crois que c’est avec ces quelques gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ? » « Je le sais, répond le colibri, mais je fais ma part. » Une association Colibris relaye ce message en France.
Dévoiturage, démondialisation, etc : Dans un contexte de pénurie globale des ressources naturelles, l’avenir n’est plus dans l’expansion, mais dans son inverse. A la croissance économique doit donc succéder la DEcroissance conviviale, à l’effet rebond l’effet DEbond, à la mondialisation la DEmondialisation, à la pollution des sols et des esprits la DEpollution, au populationnisme la DEpopulation, à l’urbanisation la DEsurbanisation, à la voiture pour tous le DEvoiturage. N’oublions pas la DEmilitarisation ! (Beaucoup de « DE » contre les « SUR » )
Droite/gauche : « L’écologie politique ne sera jamais neutre vis-à-vis du clivage droite-gauche quand il s’agit de choisir entre des politiques qui favorisent les privilégiés et celles qui se préoccupent des démunis. Pour autant, les écologistes et les gauches ne sont pas des alliés naturels. Ils n’ont pas le même ancrage historique et ne s’inscrivent pas dans le même horizon. Marqués comme la droite au fer rouge du productivisme, fascinés par ses fétiches et ses addictions, la social-démocratie et les courants marxistes restent éloignés de l’essentiel du paradigme écologiste. (manifeste EELV pour une société écologique, novembre 2010) »
Division du travail : « J.B. Say avait raison de noter qu’Adam Smith s’égare lorsqu’il attribue une amélioration du niveau de vie grâce à la division du travail, ou plutôt à la séparation des occupations ; non que cette influence soit nulle, ni même médiocre, mais les plus grandes merveilles en ce genre ne sont pas dues à la nature du travail : on les doit à l’usage qu’on fait des forces de la nature. » (Bertrand de Jouvenel in Arcadie, essai sur le mieux vivre,1968)
Droit de la nature : « l’arbre doit aussi avoir le droit de gagner en justice » (Should Trees Have Standing? de Christopher D.Stone). Le texte de Christopher D.Stone est présenté dans les Grands Textes fondateurs de l’écologie (Flammarion 2013, Champs classiques, 384 pages, 10 euros). Pour l’anecdote, Coluche : « Pour qu’un écolo soit élu président, il faudrait que les arbres puissent voter ».
DUMONT René : L’écologie ou la mort (à vous de choisir) la campagne de René Dumont, les objectifs de l’écologie politique (1974)
Ecocentrisme : Le biocentrisme comme le pathocentrisme (l’antispécisme), s’ils remettent en cause l’anthropocentrisme, restent cependant tributaires d’une approche individualiste de la considérabilité morale. Or la protection de la biodiversité s’intéresse surtout à des entités supra-individuelles, comme les espèces ou les écosystèmes. Les tenants de l’écocentrisme invitent à prendre en compte dans la délibération morale ces entités globales. (Du bon usage de la nature – pour une philosophie de l’environnement de Catherine et Raphaël Larrère)
Effet Veblen : « Nous limiterions notre gaspillage, nous chercherions à changer notre mode de vie, tandis que les gros, là-haut, continueraient à se goberger dans leurs 4×4 climatisés et leurs villas avec piscine ? Non. La seule façon que vous et moi acceptions de consommer moins de matière et d’énergie, c’est que la consommation matérielle, donc le revenu, de l’oligarchie soit sévèrement réduite. En soi pour des raisons d’équité, et plus encore, en suivant la leçon de Veblen, pour changer les standards culturels de la consommation ostentatoire. Puisque la classe de loisir établit le modèle de consommation de la société, si son niveau est abaissé, le niveau général de consommation diminuera. Nous consommerons moins, la planète ira mieux, et nous serons moins frustrés par le manque de ce que nous n’avons pas. » (Comment les riches détruisent la planète d’Hervé Kempf, 2007)
Effondrement : Si quelque chose ne fonctionne pas, c’est que c’est trop grand. Ainsi s’exprimait Léopold Kohr (1909-1994), inspirateur du titre de l’ouvrage de Schumacher (Small is beautiful), auteur en 1957 de The Breakdown of Nations (non traduit en français) et prix Nobel alternatif en 1983. Les petites nations, les petites économies sont les plus paisibles, les plus prospères et les plus créatives. Mais à l’échelle des Etats modernes, toutes les organisations deviennent tyranniques. Car le problème, c’est la démesure. Le gigantisme peut seulement mener à des problèmes d’une proportion ingérable ; il faut encore plus de pouvoir pour gérer le pouvoir en question et cela n’a qu’une fin possible, l’effondrement. Nous connaissons aujourd’hui cette crise du gigantisme, et nous cherchons à y remédier par de fausse solutions : des unions fiscales, une gouvernance mondial, plus de croissance. Cette analyse rejoint d’une certaine façon les analyses de Lewis Mumford à la même époque (Les transformations de l’homme – 1956)
Empreinte écologique, superficie de sol (et d’eau) écologiquement productif de différentes sortes (sol agraire, pâturage, forêts…) qui serait nécessaire avec la technologie courante
a) pour fournir toutes les ressources d’énergie et de matière consommée et
b) pour absorber tous les déchets déversés par cette population.
Notre empreinte écologique de Mathis WACKERNAGEL et William REES (1996 – écosociété, 1999)
Esclaves énergétiques : Un seul litre de pétrole contient l’équivalent de près de 9 kWh d’énergie, alors que le rendement moyen d’un être humain est d’environ 3 kWh au cours d’une semaine de 40 heures de travail ! Des esclaves énergétiques font aujourd’hui notre lessive, cuisinent à notre place, nous transportent à l’autre bout du monde, nous divertissent, et font pour nous la majeure partie des travaux pénibles nécessaires à notre survie ou à notre confort. L’énergie utilisée par personne est équivalente à 15 esclaves énergétiques en Inde, 30 en Amérique du Sud, 150 en Europe et 300 aux Etats-Unis (selon Craig). (Des esclaves énergétiques (réflexions sur le changement climatique) de Jean-François Mouhot – 2011)
Interaction spéculaire : le discours sur l’effondrement ne peut être tenu par les responsables économiques et politiques, qui, à la place qu’ils occupent, sont soumis aux contraintes de l’interaction spéculaire (ndlr : spéculaire, relatif au miroir). Ni par les responsables économiques parce qu’ils n’ont d’autre horizon que la rentabilité, de plus en plus financière, de leur entreprise, et la concurrence féroce pour les parts de marché dans leur secteur. Ni par les responsables politiques parce qu’ils n’ont d’autre horizon que leur prochaine réélection et la concurrence féroce pour les places de pouvoir dans les institutions. (Antimanuel d’écologie d’Yves Cochet, 2009)
KEYNES (relance keynésienne) : Keynes avait écrit après la grande crise de 1929 pour promouvoir une politique de relance économique soutenue par l’Etat. Le système de marché n’était pas capable à son avis de résoudre une telle crise financière et ses impacts sur l’activité réelle. Mais il s’agissait pour lui d’une politique conjoncturelle, de court terme. Les Trente Glorieuses en ont fait une politique structurelle de soutien continu de la demande par l’expansion monétaire, le crédit et les dépenses étatiques. (Keynes a tort)
Non-violence :: « L’un des principaux aspects de nos actions est d’attirer l’attention du public. La condition du succès est alors dépendante de notre capacité à confirmer l’hypothèse suivante : si seulement l’opinion publique savait ce que les écologistes défendent, alors la majorité des gens serait de leur côté. L’expérience accumulée ces dernières années indique que le point de vue écologique avance grâce à une communication politique non-violente qui mobilise à la racine. Historiquement, les voies de la non-violence sont étroitement associées aux philosophies de la totalité et de l’unicité. » (Arne Naess , initiateur de l’écologie profonde in Ecologie, communauté et style de vie, 1976 – traduction française 2008) Arne Naess prenait cet exemple : Un serviteur zélé du peuple, qui avait dit oui à une centrale électrique, admettra à peu près tout ce que tu lui diras en tant que philosophe. Mais il ajoutera « C’est trop tôt, ce n’est pas encore possible politiquement. Vous voulez que je quitte la politique ? » Ce à quoi tu répondras : « Je comprends ce que vous voulez dire. Oui, je comprends. Mais notre objectif à long terme est construit sur la base de prémisses beaucoup plus profondes que celles sur lesquelles repose votre argumentation. Tout ce que nous pouvons vous demander, c’est d’adopter un jour la perspective du long terme ! » ( Arne Naess, Vers l’écologie profonde avec David Rothenberg – 1992, wildproject 2009)
Norme = concrétisation des valeurs dans des règles de conduite susceptibles de sanction (exemples : règles de politesse, normes de consommation, etc.). Les normes évoluent grâce aux mouvements sociaux, mais elles peuvent aussi étouffer le sens des valeurs. . La position sociale d’un individu (rôle et statut) dépend d’un discours social (valeurs et normes). La position sociale d’un individu (rôle et statut) dépend d’un discours social (valeurs et normes).
Rôle : pour un individu, ensemble des comportements que les autres attendent de lui. La position sociale d’un individu (rôle et statut) dépend d’un discours social (valeurs et normes).
Soumission volontaire : « Celui qui vous maîtrise tant n’a que deux yeux, n’a que deux mains, n’a qu’un corps, sinon qu’il a plus que vous tous : c’est l’avantage que vous lui faites pour vous détruire. D’où a-t-il pris tant d’yeux dont il vous épie si vous ne lui donniez ? Combien a-t-il tant de mains pour vous frapper s’il ne les prend de vous ? Les pieds dont il foule vos cités, d’où les a-t-il s’ils ne sont les vôtres ? (…) » (La servitude volontaire d’Etienne de la Boetie, 1576)
Statut : ensemble des comportements d’autrui auquel un individu peut s’attendre. La position sociale d’un individu (rôle et statut) dépend d’un discours social (valeurs et normes).
Territoires en transition : depuis 1972, le rapport du club de Rome a dénoncé la course à la croissance en démontrant les limites de la planète. Depuis 1974 et le premier choc pétrolier, nous savons que notre civilisation dépend du pétrole. Depuis 1990 et le premier rapport du GIEC (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), nous savons que l’humanité va faire face à un réchauffement climatique. Comment agir efficacement ? L’échec des conférences internationales et les inerties gouvernementales montre que cette voie est trop lente. Pratiquer à l’échelle personnelle la simplicité volontaire semble nécessaire mais insuffisant. Ce qui nous semble le plus pragmatique, c’est d’agir directement au sein de sa communauté d’appartenance pour en restaurer la résilience, la capacité de résister aux chocs. Ce paradigme ou modèle de référence porte des noms différents : Communautés intentionnelles ou Ecovillages ou Agenda 21 local ou Towns transition ou Plan climat ou Cités jardins ou communautés de résilience … La profusion des termes montre la richesse de cette alternative à l’ère des combustibles fossiles. Il ne s’agit pas d’une nouvelle théorisation, mais d’une pratique applicable au Nord comme au Sud, par les gens de droite comme par les gens de gauche, par les urbains et les paysans, par les chefs d’entreprise et par les travailleurs. Le projet 2012 d’EELV aborde (un peu) cette problématique : « Tout comme le réchauffement de la planète, la rareté à venir, la décroissance proche et rapide de la ressource en énergie fossile et en pétrole ont été annoncées depuis longtemps par les écologistes (…) Le soutien à des mécanismes d’action publique tels que les projets de gestion communautaire doit devenir prioritaire afin d’intégrer des objectifs comme la préservation de la biodiversité, la souveraineté alimentaire, et des solutions innovantes (ville en transition…).» Un livre à connaître, le manuel de transition de Rob Hopkins
Techniques douces : « Je distingue deux sortes d’outils : ceux qui permettent à tout homme, plus ou moins quand il veut, de satisfaire les besoins qu’il éprouve, et ceux qui créent des besoins qu’eux seuls peuvent satisfaire. Le livre appartient à la première catégorie : qui veut lire le peut, n’importe où, quand il veut. L’automobile, par contre, crée un besoin (se déplacer rapidement) qu’elle seule peut satisfaire : elle appartient à la deuxième catégorie. De plus, pour l’utiliser, il faut une route, de l’essence, de l’argent, il faut une conquête de centaines de mètres d’espaces. Le besoin initial multiplie à l’infini les besoins secondaires. N’importe quel outil (y compris la médecine et l’école institutionnalisées) peut croître en efficacité jusqu’à franchir certains seuils au-delà desquels il détruit inévitablement toute possibilité de survie. Un outil peut croître jusqu’à priver les hommes d’une capacité naturelle. Dans ce cas il exerce un monopole naturel ; Los Angeles est construit autour de la voiture, ce qui rend impraticable la marche à pied ». (présentation par Ivan Illich de son livre, La convivialité, 1973)
Valeurs = discours qui permet à l’enfant ou à l’adulte de faire un classement des choses et des pensées (bien et mal, beau et laid, juste et injuste, bon et mauvais, supérieur et inférieur). La position sociale d’un individu (rôle et statut) dépend d’un discours social (valeurs et normes).