Pascal Canfin : social-libéralisme contre social-écologie

« Quand Manuel Valls dit qu’il n’y a pas d’autre politique possible (cf. « Tina », There is no alternative de Margaret Thatcher), c’est la négation même de la politique, qui est d’avoir à choisir entre plusieurs chemins. Nous sommes partis du gouvernement en avril car nous avions anticipé ce qui allait se passer. Nous sommes donc aujourd’hui bien placés pour incarner une autre politique à gauche…  À force de s’être éloigné des promesses de 2012, la base politique du gouvernement de Manuel Valls est extrêmement étroite et ne représente désormais qu’une seule partie du PS, dont on ne sait même pas si elle est vraiment majoritaire… Nous sommes désormais à gauche dans une bataille entre un modèle social-libéral, et un modèle social-écologique, qui repose les questions fondamentales et refonde le progressisme : quel monde voulons-nous transmettre à nos enfants, le bonheur passe-t-il par une consommation toujours plus grande de biens matériels… Le projet historique de la gauche a consisté à faire grossir le gâteau pour en redistribuer une partie aux plus pauvres. Son logiciel repose sur une croissance forte. Or cette croissance forte est derrière nous et son projet ressemble donc à un canard sans tête… La social-écologie tient au contraire un discours de vérité sur le fait qu’une croissance infinie dans un monde fini n’est pas possible et en tire les conséquences en se donnant comme objectif d’augmenter l’intensité en emplois de l’économie et en développant l’économie du care et la transition écologique, qui revient à remplacer de l’énergie et du capital par du travail humain. Une économie qui privilégie les liens plus que les biens matériels jetables, largement importés et symboles d’un système économique destructeur de notre planète, est une économie créatrice d’emplois locaux, non délocalisables. C’est sur cette base que nous voulons refonder un contrat majoritaire…

Je ne considère pas que l’État représente par essence l’intérêt général. J’ai trop vu des décisions se prendre au nom de l’intérêt des grands corps. Un État dont l’intérêt général est capté par des intérêts de corps est un État qui dysfonctionne. La gauche doit agir là-dessus car, bien plus que la droite, elle a besoin d’un État qui fonctionne au service de la société. Une réforme de gauche de l’État passerait par la suppression des grands corps, pour redonner de la diversité dans le recrutement de la haute fonction publique. Celui-ci ne peut pas dépendre de deux filières uniquement, Sciences-Po puis l’Ena ou Polytechnique. Enrichir l’État par la société civile est un vieux combat de l’écologie politique, et de ce qu’on appelait à l’époque la « deuxième gauche ». Il est plus que jamais d’actualité !…

                Les bons résultats (électoraux) sur un territoire ne dépendent pas de l’existence, ou non, d’un groupe écologiste local. Les mauvaises langues diront même qu’il vaut mieux qu’il n’y en ait pas ! C’est l’adhésion à un système de valeurs qui conduit au vote écologiste. Et c’est la plus belle motivation !… »

 (Morceaux choisis d’un entretien de Pascal Canfin, ancien ministre du développement avec Stéphane Alliès – Mediapart)

1 réflexion sur “Pascal Canfin : social-libéralisme contre social-écologie”

  1. Le canard social écologique de la gauche « progressiste »(sic) me semble aussi étêté que celui du socialisme internationaliste du bon gauchiste de base ! Une croissance infinie de la population dans un monde fini est une impossibilité mais ces socialos n’ ont toujours rien compris et veulent nous imposer le modèle du paysan indien famélique ultrasobre dans un monde de plus de 10 milliards d’ habitants !

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