Sylvie Kauffmann récidive. Dans sa lettre d’Asie (LeMonde, 15.01.2008), elle mettait sur un piédestal Ford pour avoir été le premier à avoir la vision d’une voiture populaire. Dans son post-scriptum à Lettre d’Asie (LeMonde, 22.01.2008), Sylvie disait avoir reçu des courriers alarmistes de lecteurs sur les effets environnementaux de la Tata Nano. Mais elle consacrait beaucoup plus de lignes à tous ceux qui pensent au confort de la voiture individuelle mis à la portée des habitants des pays émergents. Aujourd’hui dans sa lettre d’Asie (LeMonde, 9.09.2008), Sylvie valorise le « génie » de Ratan Tata, fondateur du groupe Tata qui veut construire la voiture la moins chère du monde dans un Bengale qui a « pris le virage de la modernisation, construit un réseau routier… ». Elle pleure sur le retard pris dans l’implantation de l’usine de fabrication à cause de certains paysans en colère, « attachés à un mode de vie misérable ». Elle prend parti de la reconversion industrielle des paysans embauchés par la future usine dont la « fermeture signifiait zéro revenu pour la famille ». Sylvie Kauffmann en vient même à regretter la voie démocratique suivie en Inde, « tortueuse », alors que la Chine peut s’industrialiser « sans manifestations, ni recours en justice, ni négociations » !!!
Commentons sa phrase-clé : « C’est d’une certaine manière l’avenir de l’Inde qui se joue ici ». Mais quel avenir ? Celui d’une imitation du modèle fordiste (production de masse pour une consommation de masse) qui est en train de faire faillite ! Dans le même numéro le groupe Renault, pris à contre-pied par la crise, supprime 4000 emplois. Ou celui d’une Inde paysanne qui voudrait conserver des terres fertiles pour ses enfants et les arrière-petits-enfants de ses enfants ? Le choix est vite fait dans un système démocratique…
Les mots « gerber » et « conne » ne sont pas faits pour améliorer le point de vue de Sylvie Kaufmann. L’essentiel dans une démocratie véritable est la possibilité du débat contructif, même avec nos pires ennemis.