Editorial du MONDE* sur la recherche scientifique : « Dans un secteur régi par une concurrence mondialisée sans équivalent, la pression peut conduire à quelques libertés avec la rigueur scientifique… Cette pression vient aussi de l’injonction fait à la recherche de contribuer à la croissance économique future… Les chercheurs doivent répondre aux priorités de leurs financiers… » Tout est dit, concurrence, mondialisation, croissance, finance. Tous les maux qui rongent l’activité économique détériorent aussi la probité des scientifiques ! Nous conseillons à nos lecteurs de (re)lire Oblomoff** dont voici quelques extraits :
« L’argumentation de la pétition « Sauvons la recherche » soutient que la baisse des crédits alloués à la recherche pénalise la compétitivité de la France… La conception d’une science neutre, motivée par la saine curiosité intellectuelle et la passion de la découverte, a dorénavant cédé le pas à une argumentation qui, malgré son cynisme, a le mérite de refléter le vrai visage de la science moderne, rattaché par des liens organiques à la société industrielle qu’elle alimente en progrès… Les applications industrielles de la recherche scientifique ont permis un développement considérable des forces productives, entraînant désastres écologiques et décomposition sociale. C’est pour cette raison que nous condamnons la recherche, pour toutes ces découvertes qui font dorénavant partie de notre vie quotidienne : centrales nucléaires et téléphones portables, industries agroalimentaires et pesticides, voitures et TGV, tapis roulants, etc… En pratique l’activité du chercheur est ultra-spécialisée ; elle consiste, dans une large part, à piller les résultats de ses confrères, à chercher des crédits, à produire du résultat et de la publication. Tout ceci relève davantage de l’absurdité bureaucratique que de la passion pour le bien-être de l’humanité…
Au regard de ce que la science industrielle a réussi à faire de la planète en quelques décennies seulement, des processus incontrôlables qu’elle a déclenché dans la nature, nous pensons qu’il est pour le moins raisonnable de s’opposer à ces recherches. Et ce, avant qu’un comité de sages présidé par « les mêmes » ne vienne dûment encadrer le fait accompli et le certifier éthiquable. »
* LE MONDE du 13 mai 2015, Recherche scientifique : publier moins, mais mieux
** Un futur sans avenir (Pourquoi il ne faut pas sauver la recherche scientifique) aux éditions l’Echappée (130 pages, 9 euros)
Oblomoff comme nom d’auteur renvoie au personnage d’Oblomov qui passe le plus clair de son temps au lit. Cette frénésie obsessionnelle de crédits, de programmes et de grands chantiers n’est pas la seule manière d’être au monde.