L’équilibre agricole est rompu ; la terre se rebelle ; les maladies de toutes sortes se multiplient ; dans bien des contrées du globe, l’érosion emporte le sol épuisé. Dans son Testament agricole, pour une agriculture naturelle, Albert Howard (1873-1947) en avait conscience. Les thèses de l’agriculture biologique d’aujourd’hui se situent dans la droite ligne de son « Testament ». La réflexion sur l’humus des praticiens contemporains de l’«AB» est déterminante dans la gestion des matières organiques fertilisantes. Pourtant la mentalité NPK (azote, phosphore, potassium) prédomine encore. Un gouvernement devrait soutenir une agriculture biologique contre les monocultures et l’agriculture intensive.
Le maintien de la fécondité de la terre est la condition essentielle d’un système d’agriculture durable. Le cycle de la vie consiste en deux processus, croissance et décomposition., l’une étant la contrepartie de l’autre. Au cours du processus normal des récoltes, la fertilité diminue constamment : sa reconstitution continuelle est donc absolument indispensable. Dans le règne végétal, il ne se produit jamais de tentative de monoculture. La règle est : productions mixtes. Une grande variété de plantes et d’animaux coexistent. La terre est toujours protégée contre l’action directe du soleil, de la pluie et du vent. Rien qui ressemble à de l’érosion. La forêt se fertilise elle-même, elle fabrique son propre humus. Il s’établit une division naturelle entre le minéral et l’organique. L’humus fournit l’engrais organique ; le sol, la substance minérale. Rien de nocif, pas d’incinérateurs, pas d’épuration artificielle, pas d’épidémie due à l’eau, pas de conseillers municipaux et pas d’impôts.
« La population humaine, concentrée principalement dans les villes, est entretenue presque exclusivement par la terre. Il en résulte qu’une grande quantité des déchets agricoles est concentrée dans les villes, loin des champs qui les produisent. La plupart des déchets municipaux sont enterrés ou bien brûlés dans des incinérateurs. Pratiquement, aucun déchet ne revient à la terre. Il faut donc considérer les villes comme des parasites de l’agriculture. Elles n’existeront avec le système actuel seulement autant que la fertilité de la terre le permettra. Ensuite, tout l’échafaudage de notre civilisation devra s’écrouler.
Notre mère, la terre, n’a eu que peu ou aucun représentant pour plaider sa cause dans les conseils municipaux. Une catastrophe quelconque, telle qu’une pénurie mondiale d’aliments puis une famine, ou bien la nécessité de disséminer la population urbaine dans la campagne, peuvent seules être l’occasion de discuter une pareille question. Il s’agit d’amener le plus possible de communautés disposant d’une terre suffisante à produire elles-mêmes leurs propres légumes, leurs fruits, le blé et la viande. Il serait nécessaire de prendre des mesures pour protéger le pays des transactions du monde financier. » (1ère édition 1940, Dangles 2010)
(extraits d’ un livre à lire absolument pendant les grandes vacances, à paraître début juillet :
« L’écologie à l’épreuve du pouvoir » (Michel Sourrouille aux éditions Sang de la Terre)
Encore un exemple qui, comme sur d’autres sujets, montre que l’on avait tout compris il y a déjà bien longtemps et que cette compréhension n’a en rien évité que l’on continue dans la mauvaise direction. Tout cela n’est pas rassurant pour l’avenir car les fausses routes s’accumulent. L’écologiste René Dumont était bien plus compétent en 1974 que ne le sont les principaux leaders écologistes français en 2016, l’écologie est un domaine qui semble échapper au progrès. Une manifestation involontaire (et pour une fois malvenue) d’une volonté de décroissance ?