« Il y a cinq ans, jour pour jour, après des années d’efforts collectifs auxquels je rends hommage, j’avais l’honneur et l’émotion de frapper ce petit marteau sur la tribune de la COP21 en décembre 2015 : « l’Accord de Paris est accepté ! ». Quand je repense à ces moments, trois mots : le travail intense qui l’a précédé, comme il devra précéder la COP26, l’écoute car c’est une co-construction où, selon l’esprit des Nations Unies, chacun doit être écouté, et l’ambition, car il en fallait, 29 articles, 140 paragraphes de décisions, pour définir l’objectif et les moyens de lutter contre ce tueur qu’est le réchauffement du climat. Depuis, l’Accord de Paris est devenu la référence climatique mondiale. Mais on est encore loin du compte. Les températures augmentent, des catastrophes climatiques multiples se produisent, frappant en particulier les régions et les populations précaires. Il faut donc continuer et amplifier notre action.
Depuis 2015, pas mal de choses ont changé qui rendent le chemin vers Glasgow 2021 à la fois voisin et différent de Paris. A l’époque, nous avons réussi la conjonction de plusieurs planètes : la planète scientifique et technologique, qui continue d’avancer. La planète société civile (villes, régions, entreprises, associations, tous les acteurs non-étatiques) : elle aussi est au rendez-vous, avec en particulier les mobilisations de la jeunesse. En revanche, ce qui avait fait la force de la COP21, l’union de tous les Etats du monde s’est affaiblie. Le retrait, en particulier, de la présidence américaine, a favorisé un relâchement d’autres Etats, pourtant signataires de l’Accord de Paris.
Mais depuis quelques semaines, un vent plus favorable semble souffler. La Chine, le Japon, la Corée du Sud, l’Union européenne, d’autres, riches ou pauvres, rehaussent leurs ambitions, bien qu’ils ne soient pas encore assez nombreux. La nouvelle présidence américaine va apporter toute sa détermination. L’espoir renaît. Ce sera la feuille de route de Glasgow de ne pas décevoir cet espoir, en honorant concrètement les engagements de Paris (financements publics et privés accrus, en direction notamment de l’Afrique, innovations technologiques, mesures pour l’adaptation et pas seulement pour l’atténuation, article 6, transition juste, …). Il faudra étendre notre action à tous les secteurs et être clairs sur les trois horizons à respecter : le long terme, 2050, la neutralité carbone ; le moyen terme, 2030, des engagements nationaux rehaussés ; le court terme, l’immédiat, des plans de relance « verts » et non pas « bruns », à la fois contre les conséquences de la pandémie Covid-19 et pour une société décarbonée. Et il faudra vérifier tout cela, en ligne avec nos engagements de Paris, 2 degrés d’augmentation maximale, et si possible 1,5 degré à la fin du siècle.
Chers amis, contre le réchauffement du climat, il n’y a pas de vaccin mais il y a un antidote : l’application intégrale, concrète et mondiale de l’Accord de Paris. Les clés, maintenant, ce sont l’ambition et l’action. »
Laurent Fabius, 12/12/2020 : ‘Climate Ambition Summit 2020 – Road to COP 26)