bio-fuel et bourrage de crâne

On nous trompe. Les médias font des effets d’annonce qui laissent encore croire à des lendemains qui chantent. Ainsi LeMonde * nous promet du biocarburant à base d’algues et à « un faible prix de revient du baril ». Le corps de l’article est beaucoup moins optimiste. La fabrication industrielle de BFS (Bio Fuel Systems) doit démarrer seulement courant février. Et plutôt que de pétrole, les responsables de BFS préfèrent parler de « dépollution » et de « valorisation du CO2 ». Y’a plus que des nuances ! Quatre cinquièmes de page pour une simple start up, il faut lire attentivement la notice sur les générations de biocarburant pour déchanter. La première génération, bioéthanol ou biodiesel, entre en concurrence avec les cultures vivrières et de plus ont un bilan environnemental mitigé. La deuxième génération ne sera pas sur le marché avant 2020, pour ainsi dire jamais. La troisième génération dont s’occupe BFS sort à peine des laboratoires et attend encore sa validation à l’échelle industrielle.

                Le journaliste Pierre le Hir ne sait pas encore que les biocarburants doivent être appelés agrocarburants car ils ne contribuent pas à la vie biologique mais dépendent d’un système agricole industrialisé qui détériore l’environnement. Pierre le Hir se vend au système commercial ; il vante la filière algues pour les trois raisons habituelles avancées par l’oligarchie techno-scientifique :

          Faisons vite avant que d’autres effectuent le saut technologique. Or la compétitivité internationale ne veut plus rien dire quand les Chinois deviennent au moins aussi performants que les anciens pays industrialisés dans tous les domaines.

          Protégeons nos équipes de recherche, influencées par des lobbies comme Adebiotech (valorisation des biotechnologies), une structure invisible sur Internet, mais influente auprès des journalistes. On sait jamais, nos chercheurs peuvent s’expatrier !

          Demain, tout sera pour le mieux demain dans le meilleur des mondes, projet Salinalgue, projet Safeoil…Et dans notre poche aujourd’hui que sautent les subventions !

* LeMonde du 29 janvier 2011, la révolution du « pétrole bleu »

2 réflexions sur “bio-fuel et bourrage de crâne”

  1. Je me rappelle lire un article l’annee derniere sur un salon de l’aviation en Allemagne: EADS montrait leur prototype d’helicoptere carburant aux biocarburants obtenus a base d’algues. Il y etait dit que pour la faire voler 20 minutes, il avait fallu acheter l’integralite du stock mondial de ces biocarburants… Je n’ai pas verifie cette information, mais cela m’avait fait sourire…

    Deuxieme remarque: le bilan environnemental des biofuels premiere gen est bien souvent deplorable. La quantite de CO2 liberee par la coupe ou l’incendie de foret primaire pour faire de la place aux palmiers est suffisamment importante pour rendre le debat sur l’EROEI (0,7 ou 1.2 ? ) completement inutile. Le bilan carbone est tres largement negatif. Et bien sur, il faut y ajouter les consequences catastrophiques (social, biodiversite…)

  2. D’une manière générale, je suis souvent frustré par les chiffres donnés dans ce type d’article. Quel est le potentiel envisagé à long terme? Marché de niche ou de masse? Quelles sont les ressources nécessaires pour l’atteindre (la surface par exemple)? Dans divers articles ou reportages, on entend souvent dire, à propos de tel ou tel projet, que l’on économise des tonnes (fichtre!), voire même des milliers de tonnes de CO2 (diantre!), sans avoir vraiment une idée de ce que ça représente (souvent une goutte d’eau).

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