carte carbone

James Hansen le climatologue, célèbre pour avoir le premier alerté en 1988 de la réalité des périls du réchauffement, demande à « Michelle et Barack » de bannir le charbon. Mais dans l’article juste à côté (LeMonde du 4-5 janvier), les organisations islamistes font distribuer gratuitement du charbon aux familles modestes turques depuis les années 1990, pratique concrétisée officiellement par l’AKP au pouvoir depuis 2003. La fumée épaisse dans les villes de Turquie contient des niveaux de pollution jusqu’à dix ou quinze fois supérieurs au seuil acceptable défini par l’OMS. Le taux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère s’envole. Comme l’exprime James, «  il y a une « profonde déconnexion entre les actions envisagées dans les cercles dirigeants et ce qui est exigé par la science pour la préservation de la planète. Que faire ?            

L’idée de James d’instaurer une taxe carbone sur tous les produits, proportionnelle à leur contribution au changement climatique, est réaliste. Le reversement de cette taxe aux personnes réduisant plus que la moyenne son empreinte carbone apparaît séduisante. Mais que vont faire de cette somme d’argent supplémentaire les ménages, si ce n’est acheter ! Et acheter quoi quand on veut se priver de carbone, et donc mépriser la plupart des biens durables ? Nous sommes face à l’effet  rebond, chaque fois que nos techniques réussissent à économiser telle ou telle matière première, l’effet de ce gain sur l’efficacité énergétique (ou la dématérialisation) est plus que compensé par une volonté des ménages d’accroître encore plus les consommations, donc les quantités produites. Ainsi une voiture qui consomme moins de pétrole incite à rouler davantage… Mieux vaudrait à première vue verser ces recettes budgétaires supplémentaires dans l’élimination totale de la dette publique, mais alors le mécanisme de bonus-malus induit par la taxe carbone s’efface : on perd de vue la liaison entre ceux qui perdent et ceux qui gagnent.            

Puisqu’une action par les prix (la taxe carbone agit sur les prix, donc sur les comportements), il reste l’autre solution, l’action sur les quantités. Les moyens d’un rationnement de l’énergie sont déjà à l’étude en Angleterre. Un système de carte carbone par personne a été proposé fin juin 2005 par le ministre de l’environnement E. Morley qui espérait voir son projet aboutir d’ici cinq à dix ans. Les points carbone de la carte seraient débités chaque fois que son détenteur achèterait des combustibles fossiles, que ce soit pour se chauffer, pour cuisiner, pour se déplacer, pour acheter des engrais…. Il est en effet malheureusement évident qu’un rationnement du type « simplicité volontaire » est illusoire collectivement, il faudra une dose de coercition. Etant donné les limites de la Biosphère et la contrainte des gaz à effet de serre, les énergies renouvelables doivent le plus rapidement possible satisfaire 100 % du total des besoins humains. Cela ne pourra se faire que si nous choisissons ensemble une société qui cultive la sobriété énergétique grâce au rationnement de l’énergie et à l’extension des rapports de proximité. J’attends avec impatience le premier politique qui présentera un tel programme : il est sûr d’être élu !

2 réflexions sur “carte carbone”

  1. Intéressant, mais… Que va-t-il se passer pour les agriculteurs et ruraux qui vivent en périphérie et qui dépendent de la voiture pour vivre? Est-ce qu’il vont devoir payer pour ceux qui vivent en ville (dont moi) et qui n’ont pas besoin de voiture? J’ai peur que cette carte induise une discrimination entre les gens et forcent la population à « fuir » les campagnes qui deviendraient trop chères pour les plus pauvres.

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