Parfois un article médiatisé* pose le doigt là où ça fait mal : « Force est de constater combien il est difficile aux autorités politiques d’un pays consommateur de pétrole d’édicter des règlements contraignants puis de les faire respecter, de fixer de sévères limites d’émission aux entreprises participant à un marché du CO2 ou de lever un impôt CO2 d’un montant significatif… Comment dans ces conditions empêcher un réchauffement climatique désastreux… Souvenons-nous de certains articles parus lorsque le pétrole était à 150 dollars le baril, qui se félicitaient que cette hausse diminuerait les émissions de CO2. Le grand avantage en effet serait de dispenser les autorités politiques des pays consommateurs de l’obligation de prendre des mesures impopulaires. »
Le problème, c’est que l’auteur de l’article, Henri Prévot, espère une entente entre pays exportateurs de pétrole pour limiter leur production et faire ainsi augmenter les prix. Or ces pays n’ont pas les mêmes conceptions stratégiques, l’OPEP reste sous l’influence des demandes américaines et des diktats de Riyad. Le marché est myope, soumis à la rencontre entre une offre et une demande au jour le jour ; il n’indique rien sur l’avenir d’une ressource fossile en voie de disparition et se fout complètement du réchauffement climatique. L’idéologie dominante a toujours considéré que la nature nous fournissait gratuitement les choses et qu’il ne fallait se soucier que de l’activité économique du moment.
Alors puisque nous ne pouvons agir sur l’offre de pétrole, il nous faut agir sur la demande, c’est-à-dire sur nos propres besoins. Je ne peux que relayer auprès de mes lecteurs l’analyse de Jean-Marc Jancovici** : « Agir sur la demande est d’une simplicité biblique : d’abord réduire, ensuite réduire, enfin réduire. Les vrais besoins ne sont pas négociables, mais ils ne sont à l’origine que de 10 % de la consommation humaine. On peut manger des lentilles, dormir sur un simple matelas dans une chambre non chauffée, se laver avec un litre d’eau, remplacer les vacances au Maroc par un séjour à la campagne sous la tente, supprimer du jour au lendemain sa consommation de bœuf. Un pan majeur du plan de sortie de crise concerne donc nos propres comportements. On va devoir se faire à l’idée d’être plus heureux avec moins, et le pouvoir politique doit avoir le courage de le faire comprendre. »
Le pétrole, que la Biosphère a mis plusieurs centaines de millions d’années à constituer, aurait du rester sous terre ; la planète aurait été bien plus paisible que ce que nous subissons, bombardiers, tanks, porte-avions, guerres locales et mondiales…, tous bons consommateurs de pétrole. Mais les conducteurs d’automobiles peuvent-ils comprendre que pour se passer de conflits militaires… et enrayer le réchauffement climatique, il faut aussi se passer de voitures individuelles ?
* LE MONDE éco&entreprise du 12 novembre 2015, Et si la solution était une hausse massive du prix du pétrole ?
** C’est maintenant ! Trois ans pour sauver le monde (Seuil, 2009)
Dormir dans une chambre sans chauffage, pourquoi pas dans l’absolu, mais il faudrait dans ce cas une isolation d’une qualité meilleur que dans les logements les mieux isolés qui existent actuellement.
Et il faudrait expliquer les méthodes que vous préconiser pour se laver sans plus d’un litre d’eau, car aucune n’est connue du grand public.