Les principales places boursières européennes se sont effondrées jeudi, peu convaincues par les annonces de la Banque centrale européenne. Wall Street a également connu sa pire séance depuis 1987. Rappelons notre article, Avertissement aux boursicoteurs du 7 juillet 2019 :
Avertissement aux boursicoteurs, la fin de leur monde approche. Ces dernières années, le PIB mondial progresse de près de 3 % l’an, un doublement tous les 23 ans environ, une impossibilité majeure alors qu’on puise déjà dans notre capital naturel (cf. calcul de l’empreinte écologique). Rappelons que la bourse n’a presque plus rien à voir avec la valeur réelle des entreprises, c’est un jeu d’argent comme cela se pratique dans un casino. Rappelons-nous l’amoncellement des dettes avant le krach boursier de 1929 dont on n’est sorti que « grâce » à une guerre mondiale. Le boursicoteur pense à très court terme, la planète nous attend au tournant, elle a le temps ! Voici quelques précisons.
Aujourd’hui (juillet 2019) c’est l’euphorie, Wall Street vit le plus long cycle de hausse de son histoire, les banques centrales ont réduit artificiellement les charges d’intérêt de la dette avec les taux bas, on est en plein « paradoxe de la tranquillité ». Ce moment théorisé par Hyman Minsky, où il suffirait d’un choc sur la croissance ou sur les taux pour que tous les problèmes se révèlent. Depuis la crise des subprimes de 2008, les entreprises et des Etats ont largement profité des très bas leurs taux directeurs et multiplié les liquidités comme les petits pains.Les bulles spéculatives gonflent, l’écart entre l’économie réelle et la valorisation des actifs s’approfondit. Le succès des prêts à effet de levier (accordés à des entreprises très endettées) depuis cinq ans aux Etats-Unis illustre l’évolution vers les actifs plus risqués. Résultat : l’endettement mondial a augmenté d’environ 50 % depuis dix ans. La dette totale (publique et privée) mondiale représente aujourd’hui 234 % du PIB, contre 208 % en 2008. Qui pourra rembourser cette dette, personne. La mathématisation extrême de la finance, bardée d’instruments informatiques de trading à haute fréquence (des centaines d’ordres passés par un unique opérateur en l’espace d’une fraction de seconde), a rendu les marchés fondamentalement instables et volatils. Ils ont perdu toute faculté à délivrer la moindre information sur l’état du monde réel. Le battement des ailes d’un papillon à l’autre bout du monde peut alors entraîner un affolement général. Ce sera le krach boursier qui remettra les pendules à l’heure, mais l’activité des entreprises s’en ressentira durement, le chômage explosera…
Après le choc boursier provoqué aujourd’hui par le Covid-19, les réactions sur lemonde.fr* confirment notre analyse passée :
Mister Z : Pire journée de l’histoire ? Peut être simplement parce que ce krach a été précédé de la pire période de spéculation effrénée, et la plus longue, non ?
Jacofee : Les mouvements de la bourse ne font pas peur aux traders. Ces derniers ne détiennent aucun titre ni aucun produit financier plus d’une journée. Ils démarrent à zéro le matin et finissent de même le soir. Les opérations réalisées en journée se soldent en bénéfice ou perte indépendamment du sens de l’évolution des prix. Plus il y a de mouvement à la hausse ou la baisse et plus ils font d’affaires. Une bonne journée est donc une journée mouvementée, dans un sens ou dans l’autre. Quant aux fonds spéculatifs, ils ont tous les outils pour tirer parti de la situation et ne s’en privent pas. La baisse des cours est un marché aux bonnes affaires. Par contre, les entreprises qui voient leurs réserves fondre comme neige au soleil risquent de ne pas terminer le mois. Cette situation peut être très rapidement source d’un chômage massif. Les travailleurs craignent pour leur emploi.
J.Dupont69 :
Les subprimes par ici, le coronavirus par là. Je suis étonné que
le dernier prout de Trump n’est pas provoqué un « séisme »
économique. Le système (délocalisation à outrance, économie
virtuelle) dans lequel nous vivons est à bout de souffle, c’est un
cadavre que l’on maintient en vie. Il a permis à quelques roublards
bien placés de s’enrichir grassement sur le dos de populations
exploitées (Chine, Inde, Bangladesh etc…), mais il faut revenir à
la réalité : les ressources ne sont pas infinies et on ne peut tout
déplacer d’un point à l’autre du globe sans prise de risque. Il
faut revenir à une consommation locale (idéalement régionale),
rapatrier les industries délocalisées pour les réinstaller en
région, recalculer les prix quant à la valeurs réelles (non, on ne
peut pas avoir deux bagnoles, trois smartphones, deux tablettes et
trois ordi dans un même foyer).
Il faut changer dès maintenant.
Ou la prochaine tarte à la crème en 2030 sera violente.
Une flâneuse : Quand je pense qu’il y quelques semaines on s’efforçait de convaincre les Français de placer leurs économies en bourse pour capitaliser pour leur retraite… Plouf, la tasse.
Sapiens :
C’est stupéfiant la perception qu’on les gens de ce qui est en train
de se passer sur les marchés financiers dont les conséquences
seront infiniment plus regrettables que celle du coronavirus. En
voulant lutter contre un virus qui ne fait que peu de morts, on va
sacrifier l’économie avec des conséquences incalculables .
Peu
importe que vous ayez des actions ou non…quand les taux remonteront
et ils vont remonter, quand l’économie va se figer…que pensez-vous
qu’il va arriver aux recettes de l’état et sur le coût budgétaire
d’un endettement qui représente plus de 100% du PIB.
JFA : Un virus vient semer la panique dans le monde des affaires. C’est triste, mais ça m’amuse. Je vois la situation climatique se dégrader à une vitesse folle, et rien ne se passe, même les gens qui ont voté écolo continuent à prendre leur voiture pour aller acheter leur pain à 100 m de chez eux. J’imagine la panique quand, dans une décennie tout au plus, il deviendra indispensable de tout arrêter dans l’urgence parce que notre incurie aura atteint la catastrophe et qu’il n’y aura plus aucun moyen d’y échapper.
As1 : Je me fais la même réflexion. Mais le problème semble insoluble. On voit bien que la moindre baisse d’activité a des conséquences économiques désastreuses et immédiatement bien trop douloureuse pour les populations, alors même que quand tout va bien, on fonce vers le désastre écologique. Je crois que tout le monde le sait, mais que le déni est le seul moyen de continuer à vivre, sans avoir à se reprocher chaque jour de ne pas se contenter d’élever des chèvres et de se laver à l’eau froide.
* LE MONDE du 13 mars 2020, Coronavirus : krach boursier en Europe et à Wall Street, pire journée de l’histoire pour la Bourse de Paris
selon l’économiste Joel Kurtzman en 1994 : « L’économie financière est 20 à 50 fois plus développée que l’économie réelle. Ce n’est pas une économie de commerce, mais une
économie de spéculation. Les instrument financiers sont sans spécialité… Peu de personnes se rendent compte que l’argent au sens classique du terme est mort. Moins encore ont pris le temps de réfléchir à ce que cela implique… » Selon l’Institut autrichien de recherches en économie : Le volume des transactions financières dans l’économie mondiale était, en 2007, 73,5 fois plus important que le PIB mondial nominal. En 1990 ce ratio était « seulement » de 15,3. Son augmentation sur cette période est due au boom spectaculaire des marchés dérivés. Le volume des transactions de change est presque 70 fois plus important que le commerce mondial des biens et services. En Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis, LE VOLUME DES ECHANGES D’ACTIONS EST PRESQUE 100 FOIS PLUS IMPORTANT QUE L’INVESTISSEMENT.
=> C’est un risque potentiel énorme, et la crise de 2008 n’avait pas changé les pratiques des banques en la matière… Le covid-19 va-t-il changer les pratiques ?
« L’effondrement ». L’expression est sur toutes les lèvres des commentateurs et experts qui défilent sur nos écrans quand ils parlent du prix du pétrole, de l’économie, du produit intérieur brut (PIB), des places boursières, des systèmes de santé… Mais aucun n’ose encore dire que nous sommes, peut-être, en train de vivre une sorte de répétition générale avant l’effondrement majeur d’un modèle qui a trouvé ses limites. C’est la fin d’un monde, celui de l’hyper-mondialisation, au niveau si élevé d’interdépendance des infrastructures et des systèmes de production que des « perturbations », comme le coronavirus aujourd’hui ou des événements inédits liés au dérèglement climatique, demain, pourraient lui être fatals.Le coronavirus prouve s’il le fallait que nous sommes comme les pions d’un jeu de dominos : il suffit d’en faire tomber un pour que les autres suivent… (LE MONDE du 14 mars 2020, Noël Mamère : le coronavirus nous fait « vivre une sorte de répétition générale avant l’effondrement majeur d’un modèle qui a trouvé ses limites »)
Pas facile non plus de déclarer que nous sommes en train de vivre la fin d’un monde, surtout quand on n’en est pas soi même convaincu.
On peut dire que Macron hier soir a été bon, maintenant imaginons qu’il nous ait déclaré cela, qu’il nous ait parlé des dominos, du mur ou de l’iceberg, de l’effondrement imminent… Comment aurait réagi la Bourse aujourd’hui ?
Depuis le début de l’épidémie, les émissions de CO2 et la pollution ont chuté. Mais l’accalmie pourrait n’être que temporaire si les gouvernements relancent massivement leur économie. En 2008-2009, la crise financière avait ainsi été suivie d’un fort rebond des émissions de CO2 (+ 6 % en 2010, après une baisse de 3 % en 2009). « La réponse des gouvernements à la crise sanitaire est rapide, bien coordonnée et basée sur des évidences scientifiques. Pourquoi ne répondent-ils pas de la même manière à la crise climatique, alors qu’ils ont également déclaré une situation d’urgence ? », s’interroge la climatologue Corinne Le Quéré. (LE MONDE du 14 mars 2020, Le coronavirus, un répit pour la planète)
Oui, pourquoi ? Peut-être parce qu’il n’y a qu’une chose qui prime, le Business ?
Tout est dit dans ces commentaires. Mais pour moi c’est As1 qui a le plus raison.