Covid-19, une pédagogie de la catastrophe ?

Je croyais à la pédagogie de la catastrophe dès le début des années 2000 avec le pic pétrolier. Désabusé par l’inertie sociale, j’ai alors pensé grâce au réchauffement climatique que la catastrophe servirait de pédagogie. Aujourd’hui je suis désespéré, la sensibilité écologique a progressé mais les politiques économiques restent suicidaires. Les avertissements multiples des différentes branches de la science sur l’imminence des catastrophes écologiques et démographiques n’ont entraîné que quelques brèves dans quelques médias sans rien changer au modèle croissanciste soutenu par les politiciens de tous bords. La crise profonde liée à la maladie Covid-19 montre encore une fois que l’histoire n’est qu’une lanterne accrochée derrière notre dos et qui n’éclaire que notre passé. Voici l’opinion de Stéphane Foucart qui confirme notre analyse :

« Le « monde d’après » la pandémie de Covid-19 s’annonce la copie conforme de celui d’avant. En Europe, aux échelons communautaires comme nationaux, tout concourt à relancer les économies sans considération pour la question écologique. Le Green Deal est remis en cause par une majorité d’Etats membres. L’industrie de la plasturgie réussit la prouesse d’un retour en grâce du plastique à usage unique. L’agro-industrie demande des assouplissements de normes sur l’usage des pesticides. En France, aucune contrepartie climatique n’a été demandée aux grands groupes qui se verront soutenus à hauteur de 20 milliards d’euros d’argent public.  La gestion de la pandémie de Covid-19 et les mesures nécessaires à la sortie de crise conspirent à faire de l’environnement une question subsidiaire. Pourtant, la mise à l’arrêt de l’économie était une opportunité de refaire de la politique au sens premier du terme, c’est-à-dire de définir et de poursuivre des objectifs communs désirables, de choisir les secteurs d’activités à relancer et à soutenir. La catastrophe en cours nous ouvre à la fragilité du système que forme l’interconnexion des structures sociales, du système productif et de la biosphère. Si le réarrangement de quelques nucléotides sur l’ARN d’un virus transporté par un petit mammifère est capable du désastre en cours, qui peut imaginer ce que produira sur le long terme l’élévation de plus d’un mètre des océans, comme le promettent les experts du climat pour les prochaines décennies ? Il y a, en somme, une pédagogie de cette crise. Que de la catastrophe il puisse naître quelque chose. »

Voici maintenant quelques extraits de nos articles antérieurs sur la pédagogie de la catastrophe :

16 décembre 2018, Serge Latouche et la pédagogie des catastrophes

« Lorsque j’ai commencé à prêcher la décroissance, j’espérais que l’on puisse bâtir une société alternative pour éviter la catastrophe. Maintenant que nous y sommes, il convient de réfléchir à la façon de limiter les dégâts. En tout cas, la transition douce, je n’y crois plus. Seul un choc peut nous permettre de nous ressaisir…

7 septembre 2014, La récupération de la catastrophe par les technocrates

Nombreux sont les écologistes qui attendent un sursaut : au pied du mur, peut-être ferions-nous demi-tour ? Non, les catastrophes n’ont pas conduit à un « on arrête tout, on réfléchit ». Non, le chaos n’entraîne pas de lui-même une prise de conscience salvatrice. Nous sommes toujours aveuglés par la religion de la croissance destructive, nous considérons toujours l’homme comme supérieur à son milieu, la Terre comme un réservoir inépuisable…

14 juin 2014, Pédagogie de la catastrophe n’est pas catastrophisme

Comme je suis un adepte de la pédagogie de la catastrophe (pour que ce ne soit pas la catastrophe qui serve de pédagogie), je me permets de vous envoyer les statistiques suivantes à utiliser sans modération…

4 août 2009, pédagogie de la catastrophe

Malgré les avertissements du GIEC, il ne faut rien attendre de Copenhague en décembre prochain : des conciliabules entre diplomates ne peuvent pas faire ressentir l’urgence de la lutte contre le changement climatique…

1er septembre 2007, pédagogie de la catastrophe

Un centre d’expertise anglais, l’Institute for Public Policy Research (IPPR), a récemment publié les résultats d’une recherche qui analyse la manière dont les médias britanniques traitent du changement climatique…

9 octobre 2006, On pêche trop de poissons !!!

Chaque année, la New Economics Foundation (NEF),  calcule la date à laquelle la consommation de ressources par l’humanité dépasse la capacité de renouvellement de la planète. Cette date anniversaire a été baptisée « Jour de la dette écologique » (« Overshoot day »). Cette année, on vient juste de tourner la page, c’était le 9 octobre… La Biosphère  te dit : « Si la pédagogie de la catastrophe ne sert à rien, alors ce sera la catastrophe qui servira de pédagogie. »

Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere, Covid-19, une pédagogie de la catastrophe ?

5 réflexions sur “Covid-19, une pédagogie de la catastrophe ?”

  1. Et ben oui, croissance et retour comme avant…. Mais pour moi c’était déjà évident à l’avance, j’en étais certain à 100% sans le moindre microscopique doute. Pourquoi ? Parce tout le système économique actuel de croissance est lié aux crédits ! Et un crédit c’est quoi ? Et ben tu empruntes 100 mais tu dois rendre 101/102/103/104 ou plus, selon le taux d’intérêt, autrement dit tu dois toujours produire plus de richesses et de revenus la fois d’après pour pouvoir rembourser tes crédits, donc tu as besoin de croissance. Bref, le crédit c’est comme une drogue, tu as toujours besoin d’une dose plus forte la fois d’après….. T’es enfermé dans une cage à écureuil, une fois que tu as lancé la roue de la croissance, il ne faut plus que ça s’arrête sinon tous tes crédits de rattrape de vitesse et t’es dans la merde….

    En plus le confinement à été révélateur sur le fait que le tissu économique est beaucoup plus fragile encore que de ce que l’on se doutait déjà…. Tous les maillons de la chaîne économique n’ont aucune base solide pour espérer avoir de la pérennité sur la longueur du temps. En effet, tous les maillons tournent à flux tendus, et tous vivent à crédit !! Regardez comme à Rungis ou même tous les commerces en général, aucun quasiment n’a d’économie pour pouvoir vivre à l’arrêt pendant plus d’un mois !!! Aucune cagnotte pour assurer des salaires pendant 2 ou 3 mois (ce qui est déjà peu mais bon), non tous dépendent de crédits pour payer les salaires ! Et l’activité est à flux tendus pour espérer rembourser les crédits à temps… C’est pour cette raison d’ailleurs, ou les entreprises, entre clients et fournisseurs, enregistrent des retards pour se payer entre elles, les clients demandent à leurs fournisseurs toujours des délais supplémentaires pour rembourser les factures, voir des défaillances où des entreprises ne parviennent pas à payer leurs fournisseurs… et elles aussi sont de plus en plus nombreuses…

    Alors pour moi c’est évident, pour réussir une transition écologique, alors mécaniquement il faut remettre en question ce système de crédits pour faire tourner le système économique, système de crédits qui ne profitent qu’aux rentiers, mais pour tous ceux qui vivent à crédits, pour tous les entrepreneurs qui font tourner leur boutique à crédit c’est le cauchemar, puisqu’ils sont contraints de vivre de manière de plus en plus accélérée à cause de ces flux tendus, la densité de travail pour eux ne fait qu’augmenter pour pouvoir rembourser les crédits, et les rentiers en haut de la pyramide de ponzaï pressent tous les agents économiques et les agents de l’économie réelle pour vivre, nous pressent comme des citrons pour assurer leurs rentes à travers ces taux d’intérêts….

    D’ailleurs, on le voit très bien, tous les agents de l’économie réelle braillent auprès du gouvernement pour avoir de l’argent, parce qu’ils ne peuvent pas se permettre plus d’un mois à l’arrêt, pour ne pas dire plus d’une semaine à l’arrêt….. Puis le gouvernement pour relancer la croissance, fait crédit sur le dos des générations futures, pour pouvoir lancer l’armada d’hélicoptères de monnaie…. Bref, le système économique n’est absolument pas pérennisé…. On est arrivé au stade idiot où l’on doit faire des crédits pour rembourser d’anciens crédits, et un système où l’on greffe des taxes sur des taxes ou des taxes sur d’autres impôts ou cotisation, démultipliant ainsi les frais de gestion payés eux aussi à crédits croissants…. Puis on perd en efficacité…. et quand le système s’enraye c’est la catastrophe… le gouvernement pris dans l’urgence d’une situation non anticipée va répondre dans l’immédiateté par une croissance de sottises juste pour calmer ceux qui braillent dans l’instant…. Panique générale, aucune remise en question, on répond dans l’urgence par de nouveaux crédits avec de l’argent distribué sans condition ! (et de vérification pour voir s’il n’y en a pas qui profite de la situation pour soutirer de l’argent au passage, et donc pas certain qu’en plus l’argent soit bien distribue auprès des bons agents économiques)

    Aucun projet écologique ne sera crédible tant qu’il cautionnera le créditisme.

  2. Et depuis disons le début des années 70, avec le Club de Rome, les précurseurs de l’écologie politique etc. combien de mises en garde, d’avertissements, de rapports, de grandes conférences et de blablabla ? Et de bouquins et d’articles et de commentaires et de films et de «luttes», de marches festives, de pétitions (en ligne c’est le top), et d’appels (maintenant «ultimes») etc. etc. ? Et tout ça finalement pour quoi à l’arrivée ? Tout ça pour en arriver là.
    Tout ça pour continuer à produire, à consommer, à polluer, toujours plus. Et à générer toujours plus de misères, d’inégalités, d’injustices etc. Et aussi pour en être arrivé à ne plus croire en rien, ou alors à croire en n’importe quoi ce qui revient au même. Bref, tout ça pour tout bousiller, toujours plus. Au mieux pour en être encore à croire à la poupée qui tousse, au Grand Soir, aux «combats» de cinéma, au mieux pour alimenter toujours plus le Grand Show politico-merdiatique.
    – «Aujourd’hui on n’a plus le droit, ni d’avoir faim ni d’avoir froid. Dépassé le chacun pour soi, quand je pense à toi je pense à moi. Je te promets pas le grand soir, mais juste à manger et à boire. [etc.]» La chanson a 35 ans, aujourd’hui ce sont de véritables enfoirés qui la chantent. Ceux qui et en même temps chantent que les générations futures on droit à de l’air pur, une planète propre etc. ne valent guère mieux. Hypocrites !
    C’est facile à comprendre, il ne faut surtout pas déranger le sacro-saint Ordre Etabli, le Business as usual, nos sacro-saintes «libertés» (de faire des affaires, de produire, de consommer, de jouir sans entrave, de penser et de dire n’importe quoi, etc.) Et tout le monde ou presque respecte les règles de ce jeu pipé. Résultat, depuis trop longtemps maintenant, les chiens aboient et la caravane passe. C’est comme ça. Mais ça ne fait rien, n’oublions pas que l’union fait la force et que l’oignon fait la soupe. Que les générations futures se rassurent, en matière de droits elles vont être servies. Elles doivent juste attendre un peu que le Système en finisse des derniers chiens galeux, de ceux qui aujourd’hui ont du mal à marcher dans les clous, de ceux qui refusent de faire semblant, de ceux qui ont un peu trop de gueule, etc. etc. Yapluca attendre que tout soit nickel, bien droit, bien vert kaki, bref bien comme il faut.

  3. Je repose la question : Combien sont-ils à avoir cru, et à croire encore, que cette crise serait l’occasion de tout remettre à plat, de repenser notre système, de retrouver «l’essentiel» etc. ? Sans compter bien sûr tous les hypocrites qui n’y ont jamais cru une seconde, mais qui se sont servi et se servent encore de cette crise pour faire passer le reste.
    Cette épisode me fait penser à la Trêve de Noël, dans les tranchées pendant la première guerre mondiale. Bien sûr il y en a eu d’autres des moments comme ça, je me souviens d’un soir de mai 1981, les gens dansaient dans les rues, pas moi. La naïveté, à la limite passe encore, et puis je préfère de loin voir les gens danser, se serrer la main, jouer gentiment au ballon, que les voir se battre. Le pire, le plus dégueulasse reste pour moi l’hypocrisie. Je sais, des goûts et des couleurs on ne discute pas, et pourtant on ne fait que ça. En attendant donc, je trouve ce cocktail de naïveté et d’hypocrisie particulièrement désespérant.

    1. @ Biosphère : Vous avez eu raison de tronquer. L’essentiel de mon commentaire est finalement dans cette question. 😉

  4. Didier BARTHES

    Le problème vient souvent de l’opposition fondamentale entre le court et le long terme, ce que nous devrions faire pour sauver le long terme est insupportable dans le court terme : mettre au chômage presque tout le secteur aérien et 90 % du secteur automobile, raser tous les hypermarchés…
    Nos sociétés présentent tant d’inertie, supportent tant de contraintes que nous hésitons à agir, anticipons les drames de demain au détriment de ceux d’après demain. La croissance nous est comme une drogue qui nous tuera que nous continuions ou que nous cessions d’en consommer (Lovelock).

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