Au XIXe siècle, la croissance économique était cyclique, une période de récession suivait l’expansion, crise de surproduction oblige ; les travailleurs étaient exploités, mal payés, alors que la mécanisation et l’utilisation de l’énergie fossile (charbon principalement) augmentait démesurément la production. Après la Grande dépression de 1929, il fallait donc trouver une solution durable. Déjà Henry Ford avait commencé à lier aux USA production de masse et consommation de masse. Le travail à la chaîne faisait en sorte que le prix de la Ford T soit inférieur à celui d’un cheval à cause de l’augmentation de la productivité. Les ouvriers pouvaient espérer l’acheter grâce à une augmentation des salaires (5 dollars par jour). Le capitalisme mettait ainsi les travailleurs dans sa poche ! Le théoricien J.M.Keynes a complété en 1936 en donnant à l’Etat un rôle de soutien à l’activité des entrepreneurs : la politique de relance par soutien de l’offre et de la demande grâce à une politique monétaire et budgétaire laxiste. Il s’agissait de sauver le capitalisme libéral. La période des Trente Glorieuses (1945-1974) en est la résultante. La crise financière actuelle de surendettement des ménages et des Etats aussi. Il faut ajouter l’exploitation forcenée des ressources de la planète, d’où tous les problème écologiques émergents (réchauffement climatique, épuisement des ressources…).
Aujourd’hui le Parti socialiste épouse encore les thèses de la droite, mais les choses évoluent (trop lentement). Dans sa première convention sur un nouveau modèle de développement économique, social et écologique, il faudrait lire : croissance du nécessaire à l’exclusion du superflu qui dilapide les ressources, produit du gaz à effet de serre et décuple les déchets. Ce n’est pas encore la lecture que font tous les militants socialistes. Ainsi dans la convention égalité réelle qui est discutée en ce moment dans les fédérations, le mot « croissance » est encore mis en évidence. Pour que la gauche socialiste ne tienne pas le même discours que la droite croissanciste, il faudrait donc supprimer :
– Dans l’introduction, 2) de nouvelles marges de manœuvre : « La croissance entraînera aussi une hausse des recettes fiscales ».
– Au II, A, 1), à la fin du 3ème paragraphe : « C’est dans cette voie d’une croissance équilibrée…gains de productivité ».
Cette bataille d’amendements est loin d’être gagné, l’idée de croissance intoxique encore les esprits, de droite comme de gauche.
La notion de croissance reste co-substancielle dans nos esprits à celle d’une économie « qui marche ». Un dogme, une « évidence », une certitude même, puisque ça n’a jamais été remis en question par les économistes. Pourtant, il existe d’autres voies; pour les découvrir, recommandons la réflexion formidable menée par Tim Jackson, à la demande de la Commission britannique pour le développement « soutenable ». Son livre « Prospérité sans croissance » est facile à lire et extraordinairement intéressant. A recommander au plus grand nombre, pour commencer à se libérer du dogme de la croissance. Et le remplacer par le projet d’une société du « bien-vivre » !
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