Certains révolutionnaires n’entrevoient que la seule lutte des classes comme moteur de l’histoire, ignorant superbement les contraintes de la biosphère dont l’homme ne pourra jamais s’affranchir. Parce que si l’histoire de l’humanité est effectivement liée à la lutte des classes, cette histoire est aussi son adaptation permanente au milieu naturel, elle est liée aux grands équilibres biochimiques qui ont précédé l’apparition de l’homme et qui, de toute évidence, lui survivront. Seule une société fédéraliste et autogestionnaire peut assurer conjointement l’égalité économique, la justice sociale et la conservation des richesses naturelles. Par exemple, il serait beaucoup plus facile de réaliser une adaptation précise de la production agricole aux besoins réels si cette production était essentiellement locale. Mais cette société égalitaire ne pourra assurer sa propre pérennité qu’à la condition que progresse rapidement la conscience de l’extrême fragilité de la biosphère. Il faut donc agir vite parce que la durée de l’espoir d’une révolution féconde ne dépassera pas le franchissement de non-retour de la dégradation de la biosphère.
En d’autres termes, parce que la dépendance qui nous lie à la nature est aussi fondamentale que le contrat social, une vraie conscience révolutionnaire est nécessairement la convergence entre une conscience politique et une conscience écologique. Il s’agit d’accomplir une double révolution. Ce projet ne se réalisera pas sans un changement profond des mentalités. S’il ne veut pas laisser le premier rôle aux insectes, l’homme n’a d’autre issue que de sortir d’une médiocrité généralisée, pas d’autre choix que celui de l’intelligence. (Jean Pierre Tertrais, Du Développement à la Décroissance, éditions du monde libertaire)
Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles !
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