Didier Barthès, un associatif malthusien

Didier Barthès est le porte-parole de l’association Démographie Responsable. Il évoque la question démographique dans des salons écolos, des conférences-débat, auprès de journaux. Voici quelques pensées qu’il a confié au livre collectif « Moins nombreux, plus heureux (l’urgence écologique de repenser la démographie) dans le chapitre « Un droit contre tous les autres » :

« Un sujet tabou, celui du nombre des hommes

Puisque sur une Terre dévastée et devenue incapable de nous accueillir, toute autre préoccupation sera sans objet, c’est par une juste nécessité que la protection de la nature s’impose et s’imposera toujours plus comme notre principal défi. Déjà, nombreux sont les facteurs de pression anthropiques à être examinés à la loupe. En quantité comme en qualité, nos consommations et nos rejets sont mis en cause. Vingt ans seulement après le succès du «jetable», ce sont les produits durables et recyclables qui ont le vent en poupe.

On ne peut que se réjouir d’un tel retournement, même s’il relève essentiellement de l’intention; globalement en effet, l’humanité consomme et jette toujours un peu plus chaque année. A titre d’encouragement, nous pourrions néanmoins applaudir cette déclaration de bonne volonté, si curieusement, elle ne laissait de côté un élément absolument déterminant et sans lequel toute réflexion écologique se voit sapée à la base : celui du nombre des hommes.

Dans la littérature environnementale, l’évocation du facteur démographique est trop rare. Il est le plus souvent ignoré, soit qu’on le considère comme une donnée exogène sur laquelle nous ne saurions avoir de prise, soit qu’on le rejette par la réponse traditionnelle: « ce n’est pas notre nombre qui compte mais notre mode de vie ! » Sur ce point, même des courants de pensée aussi peu suspects de sympathie pour le système en place que ceux dits de la décroissance, adoptent généralement une ligne tout à fait conventionnelle : le nombre des hommes ne fait pas partie des sujets de discussion possibles ! Cette attitude, hélas, ressemble beaucoup à celle d’un ancien président américain qui déclarait que le mode de vie de ses concitoyens n’était pas négociable. En France, pays plus fécond que la plupart de ses voisins, c’est sans une once de questionnement que les médias et l’ensemble du personnel politique se félicitent régulièrement de la bonne tenue de la natalité dont le niveau élevé est par nature considéré comme une excellente nouvelle.

D’où viennent cette censure et ce blocage de la pensée ? Quelles en sont les conséquences ? Comment les dépasser ? Comment montrer surtout, que ce droit implicite à être plus nombreux s’oppose à tant d’autres droits des Hommes ? La question est d’autant plus difficile que dans les années 1960, quand l’humanité comptait pourtant deux fois moins de représentants qu’aujourd’hui, le sujet n’était pas tabou. Des écologistes aussi reconnus que René Dumont ou Jacques-Yves Cousteau abordaient le problème sans détour. Pourquoi sur ce thème, la liberté de penser a-t-elle régressé ?

Pourquoi ce rejet de la question démographique ?

Plusieurs raisons expliquent, à défaut de le justifier, le véritable tabou qui frappe le sujet.

– Un fond philosophique et religieux

La plupart des courants de pensées philosophiques et religieux placent si clairement l’Homme au centre du monde et en dehors de la nature et de ses contraintes qu’ils refusent, consciemment ou non, de poser des bornes à l’humanité comme à ses réalisations en quelque domaine que ce soit. Il y a dans la représentation que notre espèce se fait d’elle-même une telle idéalisation, que nous n’admettons pas de nous soumettre aux règles communes du monde matériel, règles qui incluent toujours le concept de limites. Il n’est d’ailleurs pas innocent que nous ayons choisi le nom de notre propre espèce, les Hommes, pour servir de base au mot humanisme, synonyme de bonté, d’intelligence et de générosité. Au regard de ce que nous faisons subir à la planète, à ses autres habitants comme à nous-mêmes, notre vocabulaire n’est-il pas notre plus bel aveu d’arrogance ?

« Croissez et multipliez » lit-on dans la Genèse. Ces propos ont largement dépassé leur origine religieuse. Beaucoup, même parmi les athées les plus convaincus, ont intériorisé cette injonction. Mais, croyants et non-croyants oublient généralement que cette phrase, datant de quelques siècles avant Jésus-Christ, fut écrite dans un monde qui ne comptait environ que 150 millions d’individus soit le cinquantième de ce qu’il héberge aujourd’hui. Si l’on admet que la nature d’un problème est largement déterminée par son ordre de grandeur, alors, constatons que cet appel au peuplement se trouve désormais bien inadapté aux circonstances. Nous serons bientôt neuf milliards et nous touchons chaque jour un peu plus aux limites de notre biotope. Dans un monde de 150 millions d’habitants tous les problèmes locaux et provisoires de surpopulation pouvaient se régler par l’émigration, c’est d’ailleurs ainsi que la Terre s’est couverte d’hommes. Sur une planète entièrement peuplée, ce mécanisme n’a plus de sens.

– L’économie

Depuis la révolution industrielle, et plus encore depuis la fin de la seconde guerre mondiale, la croissance constitue la référence obligée de nos sociétés. Elle est devenue dans nos esprits et en tous domaines, l’ordre naturel des choses. Une société dont l’économie ne serait plus en expansion serait perçue comme malade. Elle le serait d’ailleurs, car beaucoup de nos équilibres économiques, ceux des retraites ou des comptes publics par exemple, ne trouvent de solution que dans une perpétuelle fuite en avant. Ils sont structurellement déséquilibrés et le règlement de leur dette croissante ne peut s’envisager que dans le cadre d’une progression continue des ressources. La crainte de la stagnation qui terrifie les économistes n’est pas sans fondement; il est simplement regrettable que le caractère vicieux de ce « cercle du toujours plus » ne soit pas plus largement compris et dénoncé.

Ce besoin et ce respect de la croissance concerne aussi nos effectifs qui constituent l’un des supports de l’économie. Si nous étions dans le domaine de la finance nous parlerions de cavalerie, et il s’agit bien d’ailleurs de cavalerie démographique. En effet, si pour se maintenir, l’équilibre de la société nécessite que chaque génération soit plus nombreuse que la précédente, nous entrons dans un processus pervers et la catastrophe est inéluctable. Cette addiction à la croissance s’apparente au mécanisme désormais connu sous le terme de pyramide de Ponzi dont on sait combien il se termine mal. James Lovelock exprime au mieux notre dépendance à la progression matérielle et cette impasse que représente le couple infernal nécessité (de court terme) – impossibilité (de long terme) d’une croissance permanente quand il écrit à son propos dans la Revanche de Gaïa : « Notre civilisation se trouve dans la situation de celui que la drogue tuera, qu’il continue ou cesse brusquement d’en consommer ».

– La pauvreté

Les questions de pauvreté et la culpabilité sous-jacente de l’Occident participent également de la difficulté du débat. Les pays les plus démunis regroupent aujourd’hui la majeure partie de l’humanité. Ce sont eux qui ont connu la plus forte croissance démographique lors des cinquante dernières années et le phénomène se poursuivra au cours des cinquante suivantes. Dotées de populations jeunes dont une fraction importante se trouve en âge d’avoir à son tour des enfants, ces nations concentrent l’essentiel du potentiel démographique de demain. L’Afrique a ainsi multiplié sa population par cinq depuis 1950 et devrait encore la doubler d’ici 2050 pour atteindre deux milliards d’habitants. En cent ans, ce continent aura vu ses effectifs multipliés par dix ! L’Asie du Sud-Est a connu également de très fortes progressions, et l’Inde elle-même, devrait devenir le pays le plus peuplé du monde vers 2030 avec 1,4 ou 1,5 milliards d’habitants.

Il résulte de cette structure de peuplement, que vouloir lutter contre notre expansion démographique revient certes à la dénoncer dans les pays les plus développés du fait de densités souvent déjà très élevées – notamment eu Europe ou au Japon – ainsi que de niveaux de consommations individuelles trop importants, mais suppose aussi de vouloir la limiter dans les pays aujourd’hui les moins riches ainsi que dans les pays dits émergents, faute de quoi, tous les efforts seront réduits à néant. Bien sûr, cela expose tout défenseur d’une certaine modération démographique à se voir soupçonner de « racisme anti-pauvres » et à se faire accuser de défendre les privilèges des plus riches.

Ce reproche, dont usent et abusent les natalistes, est l’un des plus injustes qui soient. En se proclamant défenseurs des pauvres, les natalistes se font en réalité les défenseurs de la pauvreté. C’est bien différent ! Sur une planète aux ressources finies, nous ne serons jamais à la fois riches et nombreux. Si nous voulons que chacun dispose d’un minimum de ressources, d’espace et de liberté, la contrainte démographique est incontournable. Michel Tarrier résume la question en une phrase: « Vivre moins nombreux pour que tout le monde puisse tout simplement vivre ».

Beaucoup rappellent que les américains ou les européens consomment et polluent chacun 30 ou 40 fois plus qu’un habitant de tel ou tel pays défavorisé. C’est exact, mais quel est le souhait de ceux qui sont aujourd’hui les plus défavorisés ? N’aspirent-ils pas, eux aussi, à un meilleur niveau de vie ? Et nous-mêmes ? Sommes-nous prêts à nous priver largement ? Souhaitons-nous aligner le niveau de vie des plus riches sur celui des plus pauvres ?

Il ne s’agit pas là de faire l’apologie du gaspillage ou d’un matérialisme extrême, mais de faire preuve d’un peu de réalisme. Compte tenu, hélas, du niveau de pauvreté d’une fraction encore importante de la population du globe, nous devons être conscients que l’élévation souhaitable du niveau de vie du plus grand nombre se traduira de fait par une augmentation de l’impact écologique individuel moyen. Si nous sommes trop nombreux, cette augmentation sera en pratique insupportable, et cela, même si les intentions affichées de frugalité d’une partie de l’Occident venaient à connaître quelque concrétisation.

– L’inertie démographique

L’inertie des mécanismes démographiques est parfois mise en avant pour nier l’urgence d’une action en la matière. Il est vrai que si, aujourd’hui en 2013, nous réussissions à infléchir sensiblement la courbe de la fécondité, ce n’est que vers 2040 que nous toucherions les premiers dividendes d’une tendance à la stabilisation et profiterions, à défaut d’une moindre pression sur l’environnement, au moins d’une pression moins croissante.

Cependant, comme de graves problèmes écologiques et énergétiques menacent la planète bien avant ce terme, certains arguent de cette inertie pour ne pas donner la priorité à la démographie et pour centrer tous nos efforts sur des volets plus classiques : réduction de la consommation matérielle, dépollution, traitement et réduction des déchets… C’est là un étrange raisonnement, car c’est justement quand un phénomène présente une forte inertie qu’il faut agir le plus tôt possible. Plus un véhicule est lourd et peu maniable, plus le freinage doit être anticipé.

Ne l’oublions pas, quels que soient les tourments de l’Histoire, le temps s’écoule et l’année 2050 qui est moins éloignée de nous que ne l’est 1970, finira par se présenter. Les hommes devront, comme l’ont fait toutes les générations précédentes, supporter les conditions de ce qui sera leur présent. Nous avons une grande responsabilité sur ce point. Tirons les leçons du passé. Si dans les décennies 1950, 60 et 70, les programmes de réduction de la natalité avaient connu un plus large succès, nous bénéficierions aujourd’hui d’une démographie plus légère et serions mieux armés pour les défis de demain. Il y aurait moins d’hommes à nourrir et nous pourrions laisser plus d’espace à la nature. De par le monde, de nombreux programmes de planning familial avaient été mis en place, en Inde en particulier. Hélas, beaucoup ont été abandonnés et seule la Chine, notamment après la fin des années 1970 a fermement poursuivi le cap, un peu autoritairement il est vrai. A juste titre, cet autoritarisme fait peur. Prenons donc bien conscience que plus nous repoussons aujourd’hui des mesures douces en faveur de la baisse de la fécondité, plus nous serons demain menacés par des règles liberticides qui finiront inévitablement par s’imposer dans un monde surpeuplé et contraint de facto à stopper son expansion.

– La croissance de la population mondiale serait sur le point de s’arrêter

Le ralentissement attendu de la croissance démographique constitue l’un des arguments les plus usités pour décrédibiliser les inquiétudes sur la surpopulation. Martelé par nombre d’analystes et répété à l’envi par les médias cette certitude doit être regardée de plus près. Ayant atteint parfois jusqu’à + 2,1 % par an au cours de la décennie 1960-1970 et oscillant aujourd’hui entre + 1,1 et + 1,2 % le taux de croissance démographique mondial est effectivement en diminution. Il serait pour autant bien imprudent d’y voir une question résolue.

Remarquons tout d’abord que ce taux de + 2,1 % constitue le maximum jamais rencontré, c’est une véritable exception dans l’Histoire. Il n’est pas sain en statistiques de prendre l’exceptionnel comme référence, cela induit un biais particulièrement trompeur. Aujourd’hui encore, notre taux de croissance, considéré comme raisonnable, reste très supérieur à ce qu’il fut au cours de toute l’aventure de l’humanité, même récente. En 1900, la population mondiale augmentait au rythme d’environ + 0,4 % par an. En ce début des années 2010, notre taux de croissance est presque trois fois plus élevé !

Mais surtout, ces mesures en termes d’évolution relative sont insuffisantes, car c’est bien le nombre absolu des hommes qui pèse sur l’écologie planétaire. Or, il n’est nul besoin d’être grand mathématicien pour comprendre qu’un taux plus faible, s’il s’applique à une base plus large peut conduire à évolution absolue plus importante. Ainsi, entre 1960 et 1970, décennie symbole de l’explosion démographique, les effectifs de l’humanité sont passés de 3 à 3,7 milliards ce qui suppose une croissance annuelle moyenne de 70 millions de personnes. Aujourd’hui, alors que l’on nous répète régulièrement que le problème est derrière nous, ce sont pourtant 80 millions d’habitants de plus que la Terre doit héberger tous les ans ! Etrange diminution ! Oui, nous découvrons que + 2,1 % appliqués à 3 milliards font moins que + 1,2 % appliqués à 7 milliards ; cela ne mérite pas la médaille Fields ! Ajoutons que ces 80 millions s’additionnent à une population plus nombreuse, sur un monde plus abîmé, aux surfaces disponibles toujours plus restreintes et que ces humains supplémentaires ont toutes les chances de connaître un mode de vie plus exigeant en termes de ressources. Joyeuse perspective !

Bien entendu, à ces contre-arguments certains opposent que le taux de croissance est quand même déterminant à long terme, et qu’il va continuer à diminuer jusqu’à se rapprocher de zéro, seuil synonyme de stabilisation. Sans doute, et il s’agit même d’une certitude sur un monde fini. Mais quand ? Et à quel niveau ?

Quelques éléments viennent troubler ce trop bel optimisme car les exceptions à cette tendance commencent à être nombreuses. La fécondité est remontée ces dernières années dans plusieurs pays européens. Ainsi, selon les études de Gilles Pison « Tous les pays du monde », publiées tous les deux ans par la revue « Population et Sociétés » de l’INED, l’indice synthétique de fécondité, c’est-à-dire le nombre d’enfants par femme, est passé entre 2005 et 2011 de 1,6 à 1,7 en Europe Occidentale, de 1,3 à 1,5 en Europe Orientale et de 1,7 à 1,9 en Europe Septentrionale. Au Maghreb également, région souvent citée en exemple, le taux de fécondité a presque cessé de baisser (il est même légèrement remonté entre 2009 et 2011 en Tunisie) sans que ces pays aient encore atteint le niveau de vie européen considéré comme gage de stabilité démographique. Bref, tant que la Terre ne sera pas insupportablement surpeuplée, la tentation d’aller jusqu’à cet insupportable ne semble pas devoir être écartée. Rappelons aussi que le monde connaît encore dans plusieurs régions des taux de fécondité absolument inimaginables. L’indice synthétique fécondité était en 2011 de 7,0 au Niger, de 6,4 au Mali, et de 5,7 au Nigéria, pays déjà très fortement peuplé. Il était aussi de 6,3 en Afghanistan.

Le développement comme seule solution ?

La constatation d’une forte corrélation entre le niveau de développement économique et la faiblesse des taux de natalité, ou vu autrement, entre le sous-développement et la surnatalité, laisse de nombreux économistes et démographes faire du développement la clef unique de la baisse nécessaire de la fécondité.

Bien que corrélation statistique ne soit pas stricto sensu synonyme de lien de causalité, il semble que l’accès à une certaine aisance économique incite les couples à faire le choix d’une fécondité plus basse. La baisse de la mortalité infantile qui accompagne ces nouvelles conditions de vie justifie d’ailleurs ce choix, puisqu’avec moins de naissances, il subsiste néanmoins suffisamment d’enfants pour assurer la descendance. Cela a été largement constaté dans les pays occidentaux et semble s’étendre à une bonne partie du monde. Le temps de passage d’un régime à forte natalité et forte mortalité infantile vers un régime où ces deux éléments s’établissent à un plus bas niveau s’appelle période de transition démographique.

Le mécanisme paraît merveilleux puisqu’il conjugue à la fois, meilleur niveau de vie et baisse de la fécondité sans coercition aucune. On conçoit qu’il soit séduisant. Peut-on toutefois s’en contenter et parier sur son universalisme ? Deux écueils sont hélas trop souvent passés sous silence :

Tout d’abord, cette transition démographique exige un certain temps. Pendant quelques décennies, les familles continuent à avoir un nombre d’enfants supérieur au seuil de renouvellement des générations. Comme ces enfants survivent et arrivent à leur tour à l’âge de la reproduction, beaucoup de pays se retrouvent avec des populations jeunes dont la pyramide des âges se voit démesurément élargie vers le bas, promesse d’une forte augmentation des effectifs. L’Afrique subsaharienne en constitue l’exemple type. Quand ce phénomène porte sur de petites populations, il est sans importance, mais appliqué à un vaste continent, il en va tout autrement. Ainsi, l’Asie où la transition démographique est pourtant déjà terminée dans plusieurs pays, a néanmoins atteint plus de 4,2 milliards d’habitants. Même si, comme le soulignent les démographes, le processus est parfois plus rapide qu’il ne l’a été dans les nations européennes, sa durée incompressible a conduit ce continent à atteindre des effectifs gigantesques. L’Asie est ainsi aujourd’hui plus peuplée que ne l’était toute la planète en 1975 ! L’Inde seule, qui représente 2,2 % de la surface des terres émergées devrait accueillir 1,7 milliard d’habitants en 2050, soit plus que l’ensemble du monde en 1900 ! Pour l’Afrique, certaines projections donnent une population de 3,6 à 4 milliards d’ici la fin du siècle, c’est à dire d’un ordre de grandeur comparable à celle de l’Asie d’aujourd’hui. Or, l’Afrique est sensiblement plus petite, et une très large proportion de sa partie Nord est constituée d’un vaste désert.

Le second écueil résulte de l’opposition partiellement incontournable entre développement et sauvegarde écologique. Globalement, les pays les plus développés sont les plus agressifs pour l’environnement. En faisant la promotion du développement nous appelons comme remède ce que par ailleurs nous dénonçons comme poison. Est-il raisonnable ? Est-il honnête, pour régler un problème, de compter sur un mécanisme dont on ne cesse de blâmer les méfaits ?

Il faut alors imaginer un développement de nature différente qui aurait la bonté d’avoir les mêmes heureuses conséquences : abaisser la natalité et enrichir les plus pauvres, car cela reste bien sûr, une nécessité, mais sans en avoir les mêmes malheureux effets : la dégradation dramatique de l’environnement. C’est le pari du fameux développement durable, concept dont on peut toutefois se demander s’il n’est pas par nature un oxymore dans un monde de surface finie.

Ne nous faisons pas d’illusions. Même en faisant attention, le développement des pays les plus pauvres entraînera mécaniquement une hausse de la pollution et des quantités d’énergies fossiles consommées. La compensation de cette hausse par une éventuelle réduction des gaspillages des plus riches ne pourra être que partielle compte tenu des effectifs en cause. Les cris et les protestations que provoquent par exemple dans nos sociétés la moindre perspective de hausse du prix des carburants ne peuvent sur ce point, qu’alimenter le pessimisme.

Il est donc essentiel d’accompagner toute politique de développement d’une politique antinataliste pour limiter ses effets néfastes sur l’environnement ; « Tout pacte écologique devrait sous-tendre l’idée d’un pacte antinataliste » affirme Michel Tarrier.

De nombreux droits sacrifiés

La poursuite de cette course vers des effectifs toujours plus importants imposera aux hommes de nombreuses et lourdes contraintes. Elle imposera bien sûr le renoncement à toute forme de confort, mais plus fondamentalement encore, elle exigera l’abandon de la plupart de nos droits à choisir notre style de vie et à profiter d’une planète préservée.

– L’habitat individuel

L’habitat individuel constitue aujourd’hui l’une des cibles privilégiées de la pensée écologiste. Depuis quelques années, l’appel à la re-densification des villes aussi bien que la valorisation de l’habitat collectif sont devenus des classiques de l’argumentaire environnementaliste.

Ce point de vue apparaît justifié au regard du véritable « mitage » des paysages qu’entraîne l’extension des lotissements. Vus du ciel, nos villages sont désormais noyés dans une mer de petites villas presque toutes identiques. Il en est de même autour des grandes agglomérations où seules des voies rapides et de hideuses zones commerciales leur font encore concurrence. L’espace est consommé et la quantité d’énergie nécessaire pour approvisionner cet habitat et permettre à chacun de se rendre quotidiennement sur son lieu de travail pose un véritable problème. Pourtant, l’habitat dispersé possède aussi ses propres vertus, pourvu qu’il ne s’applique pas à des populations trop nombreuses.

D’abord, reconnaissons-le, il correspond à une aspiration d’une partie d’entre nous à posséder son chez soi, sa maison et son jardin grâce auxquels, il devient loisible de disposer d’un peu d’espace, d’un peu d’autonomie et d’un contact plus direct avec la nature. Dîner dans son jardin les soirs d’été, voir croître ses plantes au rythme des saisons, s’occuper de son potager ou de ses plantes d’ornement sont des besoins et des plaisirs simples. Ils ne sont peut-être pas aussi méprisables que certains écologistes veulent nous le faire croire.

L’habitat individuel, souvent associé à la propriété favorise aussi la responsabilisation. Quand chacun est en charge directe de son logement, cela conduit à des comportements plus favorables à l’équilibre de nos sociétés. Chacun voit et profite du fruit de ses efforts; l’allocation des ressources est plus librement décidée. Ajoutons aussi qu’une part des travaux peut être réalisée directement par le propriétaire et que cela entraîne de substantielles économies. De plus, les très lourdes charges liées aux ascenseurs nécessaires à une large partie des immeubles collectifs deviennent évidemment sans objet.

Un élément très important va dans le même sens. Devant les risques de pénurie énergétique, et/ou de collapsus environnemental mettant à bas tous les équilibres, nombreux sont les analystes qui n’excluent pas que nos sociétés soient menacées demain, peut-être avant la fin du siècle, par un véritable et très rapide effondrement. Cet effondrement conduirait à une probable paralysie des réseaux qui irriguent nos villes. Or, notre dépendance aux réseaux est telle que nos sociétés sont d’une extrême fragilité. L’indisponibilité du seul réseau électrique rendrait tous les autres inopérants. Sans électricité, plus d’eau, plus de communications, plus de transports, plus de services, plus d’emplois (à quoi servirait d’aller dans des bureaux équipés d’ordinateurs aux écrans noirs), et bien sûr, plus d’approvisionnement alimentaire. A chacun d’imaginer ce que deviendrait une agglomération comme la Région parisienne placée quelques jours seulement dans une telle situation. Pensez aux toilettes (pardon), au manque de nourriture, au noir presque total… Par nature, l’habitat collectif et concentré suppose une dépendance extrême. L’habitat individuel, au contraire, offre une résilience beaucoup plus importante. Face à un choc, les habitants des campagnes, et même dans une certaine mesure, ceux des lotissements, auront les moyens de réagir et pourront passer quelques temps, en relative autonomie. Un jardin, même petit, favorise cette autonomie, l’eau de pluie peut être récupérée, un peu de bois permet de se chauffer à minima. Enfin, et ce n’est pas le moindre en période de crise face à un désarroi général, chacun dans ses conditions aurait le sentiment de pouvoir faire quelque chose pour lui-même et de voir ses efforts récompensés, ce qui n’a guère de sens dans une grande ville où, quelles que soient la compétence et la bonne volonté, un individu ou une famille ne pourront en rien s’assurer du minimum vital.

Ces raisons n’effacent pas les méfaits de la consommation d’espace que suppose l’habitat dispersé, mais dans le cadre d’une population moins nombreuse, l’habitat individuel présente des vertus incontestables et constitue sans doute une bien meilleure solution pour demain. D’ailleurs les mégalopoles font-elles vraiment rêver ? Dans leur majorité, les hommes, s’y entassent-ils par plaisir ou par obligation ?

– L’alimentation : la viande

La nourriture carnée constitue une autre cible privilégiée du discours écologiste traditionnel, au prétexte qu’à surfaces cultivées égales, la quantité de protéines récupérables est plus importante par une consommation directe des végétaux que par la consommation des animaux d’élevage les ayant eux-mêmes préalablement ingérées. Certes, mais… Quels sont les non-dits de cette préférence ?

Entendons-nous bien, il ne s’agit en rien de critiquer le choix du végétarisme si celui-ci est dicté par la compassion envers les animaux. Il est certain que les conditions d’élevage et d’abattage sont aujourd’hui si souvent insupportables qu’elles nous déshonorent. Selon la célèbre et, hélas, si juste formule d’Isaac Singer, «Pour les animaux c’est tous les jours Treblinka». Quelles que soient leurs coutumes en matière d’alimentation, les hommes ont le devoir d’améliorer sensiblement le traitement des animaux d’élevage.

Il est également tout à fait respectable d’être végétarien par choix diététique. La consommation excessive de viande, et en particulier de viande rouge, est d’ailleurs régulièrement déconseillée par nombre de nutritionnistes. De toute évidence, dans les pays occidentaux, le manque de protéines animales ne constitue pas la principale source de déséquilibre alimentaire et nous pourrions, au moins pour la plupart d’entre nous, manger moins de viande sans difficulté.

Par contre, être végétarien pour permettre à toute force de nourrir et donc de générer des effectifs toujours plus imposants est un choix qui nous fait entrer dans un cercle infernal dont le credo pourrait être : « Privons-nous de tout dans le seul but de nous permettre à toute force d’être plus nombreux ». Serons-nous plus heureux sur la planète à être dix milliards en nous obligeant à ne consommer que des légumes et des fruits ou en étant seulement un ou deux milliards et en nous autorisant à manger un peu de viande et de poisson ? Certains déjà envisagent de généraliser la consommation d’insectes pour faire face aux pénuries à venir. Comment mieux illustrer le concept de fuite en avant ? Devrons-nous demain manger directement des bactéries ?

– Les Voyages

On dit parfois que toute l’activité des hommes consiste à transporter des objets d’un point à un autre. On pourrait ajouter « et à se transporter eux-mêmes ». C’est le plus souvent pour des trajets quotidiens et pour des raisons professionnelles, c’est parfois pour leurs loisirs et leur soif de découvertes. Là aussi, les voyageurs, surtout s’ils utilisent l’avion, ce qui est presque toujours le cas pour les longues distances, sont fréquemment ostracisés et cela d’autant plus qu’une partie de ces voyages les emmènent dans des pays plus pauvres où le contraste entre leurs dépenses et le niveau de vie des populations environnantes est plus flagrant. Doit-on les condamner ? Doit-on interdire les voyages ?

Une fois de plus, tout est question d’ordre de grandeur. S’il est aberrant d’aller régulièrement d’un coup d’aile passer un weekend à 2 000 kilomètres comme le font quelques-uns des plus fortunés d’entre nous, est-il absurde, quelquefois dans sa vie, de faire un beau voyage et de découvrir d’autres terres ? Non, c’est même une vraie richesse. Or, pour économiser l’énergie, ce droit-là aussi sera sacrifié dans un monde surpeuplé. De même, il sera refusé en sens inverse, aux habitants des pays aujourd’hui les plus pauvres de venir visiter en touristes les pays occidentaux, puisque qu’avec ses sept et demain dix milliards d’humains la planète n’offrira pas suffisamment d’énergie pour permettre à tous de voyager.

Là encore, nous faisons face à l’impossibilité de concilier le nombre et certaines de nos activités. Le droit au nombre s’oppose aux autres droits des hommes et les plus pauvres en feront également les frais. Leur développement et leur accès à un mode de consommation plus confortable sera tout simplement interdit par la démographie. Nos effectifs feront passer la découverte du monde par pertes et profits. Par pertes en l’occurrence.

– La démocratie, la liberté

La liberté et la démocratie seront les premières victimes de l’effondrement résultant de la confrontation de l’humanité aux limites de la planète. Souvent, les dictatures naissent des crises. L’autoritarisme et la surveillance ont toutes les chances d’être les réponses les plus évidentes que les sociétés trouveront pour tenter d’endiguer les désordres grandissants. Dans nombre de pays, le développement de la vidéo surveillance, mais aussi l’implication des citoyens dans des arcanes administratifs de plus en plus complexes et contraignants qui sous-tendent un fichage généralisé en constituent les premiers signes. Si, pour l’instant, la liberté de pensée reste effective dans les pays développés, notre mode de vie rend de plus en plus illusoire la possibilité d’échapper à la norme.

Dans les sociétés villageoises, le contrôle social relevait de la participation et de l’implication de chacun. Dans nos sociétés modernes qui rassemblent des millions d’individus apparemment autonomes mais en réalité tout à fait dépendants d’un ensemble de réseaux, le contrôle dépend de ce fichage. Les individus n’ont plus d’autonomie et par là, plus de résilience.

La violence et l’insécurité qui règnent dans les mégalopoles illustrent ce risque pour la démocratie. L’insécurité est évidement en soi une première atteinte à la liberté, celle de vivre sans crainte, mais elle l’est doublement puisque qu’elle génère en retour une demande de police et plus généralement de surveillance toujours plus importante. Demande qui, si elle est satisfaite, sera synonyme de contrôles et de contraintes potentiellement liberticides. Dans un monde surpeuplé, il sera toujours plus difficile de sortir de ce cercle vicieux. Une solution consisterait justement à étaler l’habitat pour éviter la généralisation des concentrations urbaines. Cependant, comme nous l’évoquions plus haut, cet étalement est mis en cause par la pensée écologiste. Il n’y a donc pas d’autre façon de résoudre la contradiction que de nous orienter vers des effectifs plus raisonnables.

– Le droit à une nature préservée

Ce droit constitue également une exigence. C’est un droit pour nous-mêmes et nos descendants, mais c’est aussi une exigence morale pour l’humanité qui ne peut s’arroger le triste privilège d’éliminer une grande part des autres formes de vie à son seul profit ou à ce qu’elle croit l’être. Aujourd’hui, les forêts se trouvent menacées au niveau mondial et il en est de même de la quasi-totalité des grands animaux, la mégafaune sera bientôt un souvenir.

Sur ce plan, l’attitude de nombre d’écologistes est doublement ambiguë. Tout d’abord parce que la défense de la nature est très souvent teintée d’utilitarisme. Combien de fois a-t-on lu qu’il fallait préserver la forêt amazonienne, soit parce qu’elle était « le poumon de la Terre », soit parce qu’on y découvrirait certainement quelques principes actifs susceptibles de servir à l’élaboration de nouveaux médicaments ? Un tel argumentaire laisse penser que si demain, la science relativisait la part de l’Amazonie dans l’équilibre atmosphérique ou que si l’on n’y trouvait finalement aucune substance intéressante pour la pharmacopée, alors la disparition de la forêt et de ses animaux, serait acceptable.

La nature n’aurait-elle donc aucune valeur en soi ? On voit là que, sans en être toujours conscients, nombre de défenseurs de l’environnement, croyant mettre en avant un argument de premier ordre, ne font que véhiculer une pensée sous-jacente selon laquelle la nature n’est qu’un outil et sa préservation, une habile stratégie. « La beauté sauvera le monde » aime à l’inverse répéter Nicolas Hulot. Cet état d’esprit me semble plus proche de ce qui devrait animer la pensée écologiste. Cette pensée connaît une seconde dérive d’ordre idéologique. Globalement opposés au système capitaliste ou libéral, je laisse le choix des mots, beaucoup d’écologistes aiment à clouer au pilori quelques boucs émissaires éternellement condamnés, les Etats-Unis en constituent le parangon. Surconsommateur, gaspilleur, pollueur, ce pays serait par excellence le théâtre du crime contre la nature. Or curieusement, parmi les pays développés ce dernier abrite encore une grande faune sauvage : des ours, des pumas, des élans, des serpents…

Pourquoi ? Tout simplement parce que la densité de peuplement aux Etats-Unis, et plus encore au Canada, pays comparable en terme de niveau de vie, est sensiblement inférieure à celle que nous connaissons au Japon ou dans nos contrées européennes. En 2011, il y avait 32 habitants par kilomètre carré aux USA et 3 au Canada, quand il y en avait 114 en France métropolitaine, 202 en Italie, 229 en Allemagne, 258 au Royaume Uni, 339 au Japon, 355 en Belgique et 398 aux Pays-Bas. La préservation de la grande faune est impossible dans un pays densément peuplé. Cette règle n’offre pas d’échappatoire. Peut-on sérieusement imaginer des grizzlis en liberté en Belgique ? Peut-on envisager un vaste couvert forestier aux Pays-Bas ? Non, il n’y a plus de place, et cette réalité simple surpasse toutes les idéologies, fussent-elles d’inspiration généreuse.

La défense de ce droit à une nature préservée a été particulièrement bien exprimée par l’actrice Jane Fonda qui déclarait en janvier 2013 à la revue Néoplanète :

« Ensuite il y a un problème de conscience : à quoi ressemblera le monde sans animaux sauvages, sans vie marine ? Tout ça parce qu’une seule espèce animale, la plus dangereuse, l’homo sapiens, aura occupé tout l’espace et accaparé toutes les ressources ? Ne risquons-nous pas enfin des tensions, des guerres, si notre monde est encore plus surpeuplé, entassé ? Où va-t-on trouver la paix et le calme ? Le dépaysement ? Le recul ? Ou trouvera-t-on des terrains libres et non urbanisés pour avoir un contact avec la Nature ? Étant enfant, je me suis construite en explorant les plaines, les bois, et en jouant dans des endroits libres et envahis par la végétation. D’où va venir l’éveil de la jeunesse en 2045 ? »

– Un droit contre tous les autres

Nous pourrions ainsi multiplier les exemples. Ils relèvent tous de la même philosophie : L’humanité est en voie de se priver de tous les éléments de confort et très probablement de liberté au profit d’un seul et même droit, d’une seule et même morale supposés supérieurs : être plus nombreux sur la planète et la peupler jusqu’à ses limites ultimes.

Pourquoi ? Sur quelles Tables de la Loi de telles règles ont-elles été gravées ? Pourquoi au contraire, ne pas être moins afin de pouvoir donner durablement plus à chacun et vivre comme nous l’entendons ? Serait-ce là un crime ? Se poser la question n’est pas une invitation au luxe indécent et au gaspillage inconsidéré. Ce n’est pas une mise en cause des vertus incontestables d’une certaine frugalité. Cela revient simplement à reconnaître que nous aspirons presque tous à un certain confort, à une certaine sécurité matérielle et à une marge d’action supposant inévitablement une consommation minimale. C’est aussi réaffirmer que la misère n’est en rien souhaitable. Sachant que nous ne serons pas à la fois riches et nombreux, faut-il pour cela faire le choix d’être tous pauvres afin de préserver à tout prix le niveau de notre démographie ?

Ne soyons pas naïfs, pour la plupart d’entre nous, nous ne serons jamais frugaux par vertu, nous serons pauvres par obligation, et cette obligation-là, imposée par nos effectifs, s’accompagnera de l’impardonnable massacre de la nature. Quand cesserons-nous de nous prosterner devant cette idole aussi exigeante que menaçante que constitue le nombre ?

La modestie démographique : Un nouvel humanisme

La gravité et l’urgence des problèmes écologiques se conjuguent pour rendre nécessaire une véritable révolution des comportements individuels et collectifs. Cette révolution est profonde parce qu’elle vise à un retournement complet de l’attitude de l’Homme envers le monde. La lutte contre la nature, la conquête incessante de nouveaux espaces, le concept de progression matérielle et quantitative permanente doivent définitivement appartenir au passé. Nos effectifs, nos modes de vie, mais aussi le mal déjà fait, nous obligent. Pour l’humanité désormais, le choix ne se situe plus entre croissance et décroissance mais entre décroissance décidée et peu ou prou organisée, perspective certes difficile mais préférable, et décroissance subie, promesse de déséquilibres et de souffrances.

Ne sacrifions pas tous les droits des Hommes au profit d’un seul, celui d’être trop nombreux. Si nous persistions dans cette voie, cela nous condamnerait triplement.

Cela nous condamnerait sur le plan moral puisque cela signifierait que notre espèce accepte de sacrifier toutes les autres formes de vie évoluées à son seul profit.

Cela nous condamnerait sur le plan écologique et sur le plan de la durabilité de nos sociétés. Il est illusoire de penser que l’Homme avec sa lourde technologie se substituera durablement aux équilibres naturels, fruits de millions d’années d’évolution ; équilibres qui ont fait leurs preuves pour assurer la pérennité de la vie sur Terre et indirectement celle de notre propre espèce.

Cela condamnerait enfin les Hommes à une promiscuité permanente, à un mode de vie artificiel non pas choisi, mais imposé à tous par le déroulement implacable d’une logique historique que nous n’aurions pas su briser.

Malgré la claire conscience de cette menace, certains, croyants ou non, ont le sentiment que l’injonction à procréer sans limite s’impose à l’Homme comme un commandement suprême et transcendant et qu’elle constitue une composante obligée de toute forme d’humanisme. Rappelons donc que l’obéissance à cette injonction est par nature condamnée. Sur un monde fini, viendra inéluctablement le temps où la croissance de nos effectifs devra cesser. A ce moment-là alors, les hommes seront absolument et universellement contraints à limiter leur nombre.

Aussi, les mesures de prudence démographique dont nous ne voulons pas aujourd’hui se trouveront simplement repoussées. Elles devront s’appliquer demain à des effectifs encore supérieurs. Alors plus impératives, elles auront de ce fait, toutes les chances d’être plus contraignantes et moins démocratiques. Nous forcerons ainsi nos descendants à une sagesse obligée dont nous n’aurons pas su faire preuve ou dont nous n’aurons pas eu le courage.

A tous ceux enfin qui, considérant que l’enfant est au-dessus de tout et que l’on ne saurait donc prôner la modération en la matière, rappelons qu’aimer les enfants, c’est non seulement leur accorder le droit à une planète vivable et agréable, mais également le droit de devenir à leur tour parents. Sur une planète surpeuplée, ce droit leur sera refusé par les lois comme par les faits. Ainsi, in fine, ce « droit contre tous les autres » s’appliquera bientôt contre lui-même.

A cet argument moral visant à préserver le droit des générations futures s’en ajoute un autre très simple et presque mathématique. Si, encore sourd à toutes ces considérations on définit, de façon très restrictive d’ailleurs, l’humanisme comme la volonté de permettre, quelles que soient les circonstances, au plus grand nombre d’hommes d’habiter la Terre, alors remarquons qu’une condition sine qua non s’impose : Pour que beaucoup d’hommes profitent de la planète, il faut que l’humanité dure. Aussi nombreux que nous puissions être à un instant donné, si nous devons disparaitre dans le siècle qui suit, du fait de la dégradation des équilibres écologiques, alors l’objectif sera manqué. Pour que beaucoup d’entre nous puissent profiter de notre Terre, de grâce, n’y soyons pas tous en même temps. Tentons au contraire de donner à l’humanité le plaisir et la sagesse de la durée.

Partageons doublement le monde. Partageons-le entre notre espèce et le reste du vivant, et partageons-le aussi entre les Hommes d’aujourd’hui et ceux de demain. C’est là la forme la plus achevée de l’humanisme : respecter l’autre et respecter l’avenir. Ces deux respects supposent de la part de l’humanité de s’engager sur la voie de la modestie démographique.« 

10 réflexions sur “Didier Barthès, un associatif malthusien”

  1. Rappelons à Michel C. qu’une discussion n’est possible qu’entre personnes disposées à débattre en écoutant aussi ce que veut dire l’autre. Or on ne peut pas discuter avec les dogmatiques du décroissancisme qui ne veulent pas entendre ce qu’ajoutent les malthusiens à la bonne idée de décroissance économique. Ces dogmatiques ont agressé des membres du stand de Démographie Responsable lors de salons écolos, des directeurs de publication on nié toute possibilité pour les antinatalistes de s’exprimer, les médias regorgent d’annotation comme quoi il faut continuer à procréer même à 8 milliards d’être humains, etc.
    Aussi, quand Didier Barthès fait un long exposé sur le pourquoi de l’insouciance généralisée vis-à-vis de notre surnombre, il n’est pas étonnant que Michel C. conteste pour contester sans jamais donner aucun élément de raisonnement.

    1. Nul besoin de me le rappeler, je suis tout à fait d’accord avec vous.
      Le dogmatisme, qui n’est qu’une forme parmi d’autres de la Bêtise (de la connerie humaine), ne concerne évidemment pas que les malthusiens. Maintenant, libre à vous de me mettre dans le même panier que ces abrutis qui ont agressé des membres du stand de Démographie Responsable. Libre à vous de croire que je conteste juste pour le plaisir (ou je ne sais quoi) de contester. Et ceci sans jamais donner aucun élément de raisonnement (sic).
      Votre réponse, en forme de rappel, ne fait donc que me conforter dans ma position. Ou dans mon dogmatisme, si ça vous chante.

    2. Enième rappel : Ce genre de «débats» (faux débats, débats minés, pipés etc.) ne peuvent mener à rien. Rien de bon en tous cas, il suffit de voir ce que peuvent faire certains abrutis.
      Ces «débats» ne sont que des occasions de réfuter les arguments (avec ou sans « ») de l’autre. Et le plus souvent en employant toutes sortes de stratagèmes (L’art d’avoir toujours raison-Schopenhauer). C’est ce que j’appelle jouer au ping-pong, ou se renvoyer la baballe, ou encore tourner en rond etc. (en attendant). Et bien évidemment ce petit jeu (à la con) peut durer indéfiniment. Mais généralement il arrive toujours un moment (un point, qui peut être celui de Godwin, mais pas que) où la partie sombre dans le ridicule, le grand n’importe quoi. Du genre :
      – Le menteur, le vilain, le pas beau, le dogmatique etc. c’est Toi !
      – Non, ce n’est pas Moi, c’est Toi !
      – Non c’est Toi !

    3. Pour passer du temps à faire semblant (ici de débattre), il faut soit :
      – aimer ça (ici la bagarre)
      – soit n’avoir rien d’autre de plus important à faire.
      On peut donc comprendre POURQUOI certains refusent de ce prêter à cette mascarade, quitte à passer pour des natalistes, des insouciants (“l’insouciance généralisée vis-à-vis de notre surnombre“), des affreux etc. etc.

      1. Conclusion (enfin cette fois la VRAIE conclusion, sic !) = Michel n’a aucun argument, il n’a JAMAIS d’argument, il ne passe que son temps à polluer les commentaires intelligibles d’autrui en raillant ! Michel se veut toxique car il veut avoir raison par procuration, car pour lui les preuves, les mathématiques, les arguments, les démonstrations, tout ça lui échappe, car il s’agit pour lui de né défendre pas seulement le dogme mais surtout ses idéologies ! Pour Michel même les idéologies les plus absurdes (et idéologies où elles se sont avérées vraiment absurdes par les faits historiques qui le démontrent), bref les idéologies absurdes se doivent d’être défendues.

      2. Alors que les faits le prouvent, sur 8 milliards il y en a déjà 7 milliards qui vivent dans la misère, et qu’on s’aperçoit qu’on est de plus en plus nombreux pour se partager des ressources en déplétion, en plus de la pollution qui explose, ben l’idéologue Michel trouverait judicieux de multiplier la natalité en Afrique par x4 (minimum, je suis à peu près certain par x4 il me trouve encore trop malthusien). En l’occurrence à quoi cela sert il de discuter et débattre avec Michel ? Même un, autisme serait plus attentif, et même un sourd nous entendrait mieux et même un aveugle parviendrait mieux que Michel à comprendre les enjeux qu’on décrit. C’est peut-être pour ça que les politiciens préfèrent agiter les bras pour brasser de l’air, ils n’ont pas envie de se fatiguer pour rien à convaincre des légions de Michel qu’il y a en France ? Du moins la question se pose ? A moins que les politiciens ont parmi leurs différents prénoms, celui de Michel ?

      3. – «Michel n’a aucun argument, il n’a JAMAIS d’argument [et patati et patata]»
        Merci oh grand BGA d’apporter de l’eau à mon moulin. C’est comme ça que je nommerais désormais ce moment dont je parlais plus haut : Le Point BGA ! Le point du Bougre de Grand Andouille, c’est le moment où le «débat» sombre dans le grand n’importe quoi !
        Tes «arguments» sont comme TOUJOURS imparables ! Pour enfoncer le clou, et pour que tu sois encore plus «crédible», je pense qu’il serait judicieux que tu précises où et quand je dis qu’il serait judicieux de multiplier la natalité en Afrique par 4 (au MINIMUM !) Misère misère !

  2. Et tout ça pourquoi ? Tout ça pour nous raconter le pourquoi de ce fameux tabou.
    (« Pourquoi ce rejet de la question démographique ?[…] D’où viennent cette censure et ce blocage de la pensée ? [etc. etc.] »)
    Et puisque ce (soi-disant) tabou nous empêche d’agir (comment, ça c’est une autre histoire) on peut dire c’est lui qui nous mène directement à notre perte. Ce qui en fait donc le pire des tabous. Voilà donc là un des principaux couplets de la Chanson : Le Tabou !

    Pour dire à quel point le sujet est tabou, on ne compte plus les heures et les pages qui lui sont consacrées. Mais ça ne fait rien, pour les malthusiens et autres anti(ou dé)natalistes le Surnombre est un sujet tabou. Et sur ce point il n’y a pas à discuter !
    Bref, tout ça pour nous bourrer le mou avec cette histoire de Tabou. Et comme le monde est binaire (choisis ton camp camarade !) il n’y a bien sûr que des natalistes (comme moi) pour démonter ce premier postulat.

    1. Esprit critique

      Rappelons qu’une discussion n’est possible qu’entre personnes disposées à discuter (débattre). C’est à dire échanger. J’ai la naïveté de croire en la vertu des dialogues socratiques. Le but étant seulement d’avancer. Faut-il déjà être d’accord sur ce qu’est l’avant (l’arrière etc. ) L’échange passe par l’écoute des autres, par des questions auxquelles chacun répond en toute loyauté, sans se défausser.
      Or, de même qu’il est impossible de chanter, festoyer, rigoler etc. avec des gens qui n’ont aucune envie de chanter, festoyer, rigoler etc. il est impossible d’avancer avec des gens qui ne veulent pas avancer. (à suivre)

      1. Esprit critique

        Ni avec des gens qui n’ont aucune intention (ou envie) de changer de voie (d’opinion, de parti, de religion) et qui considèrent certaines de leurs idées comme indiscutables et/ou non négociables. Tout simplement parce que ces idées sont les bases (les postulats) de leur idéologie, sur laquelle repose toute leur vision du monde… et donc leur propre équilibre, vital. Poussée à l’extrême, cette posture, c’est le dogmatisme.
        On ne peut pas discuter avec des dogmatiques, c’est comme ça. C’est comme vouloir faire entendre quelque chose à un sourd, c’est tout simplement impossible. Finalement ces gens-là (les dogmatiques) ne cherchent pas à discuter, mais seulement à faire des émules, à recruter etc.

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