Selon Stéphane Foucart, « Tout semble en place pour une réinvention du fascisme autour de la question environnementale ».
Stéphane Foucart : Donald Trump a fait campagne avec des vidéos proclamant la venue d’un « Reich unifié », il a promis qu’il conduirait des « déportations de masse », comparé les immigrants à une « vermine » qui « empoisonne le sang des Etats-Unis », déclaré qu’il suffisait qu’il remporte le scrutin pour que les citoyens américains n’aient plus à voter dans l’avenir, etc. Le fascisme est de retour en Occident.Par nature, il est « flou », selon lui, car il n’est pas adossé à une doctrine, mais fait plutôt office de véhicule pour un ensemble d’archétypes : nationalisme et xénophobie, virilisme, irrationalisme et anti-intellectualisme, destruction de la complexité de la langue, instrumentalisation de la frustration des classes moyennes, etc. Un autre marqueur pourrait y être ajouté aujourd’hui : la guerre à outrance à l’environnement et aux défenseurs de l’environnement. Contrairement aux fascismes européens du début du XXe siècle, qui prospéraient sur un Etat fort et valorisaient le terroir, le paysage et la nature comme des éléments précieux de l’identité nationale, les fascismes émergents sont devenus les compagnons d’une idéologie libertarienne qui prône le démantèlement de l’Etat, la dérégulation totale de l’activité industrielle, et la poursuite sans entraves de la destruction de la nature et du climat. C’est, aujourd’hui, ce qui rassemble le plus sûrement toutes les droites extrêmes, de Donald Trump à Javier Milei en passant par Jair Bolsonaro et Marine Le Pen. Les contradictions internes ne sont pas un problème puisque le chef a accès à une forme de vérité supérieure qui surplombe toute logique. On peut « restaurer la domination énergétique des Etats-Unis » (Lee Zeldin, futur ministre américain de l’environnement) – c’est-à-dire pomper tous les hydrocarbures possibles – tout en garantissant « l’air et l’eau les plus propres sur la planète », comme l’a promis Donald Trump.
Le point de vue des écologistes circonspects
Très bonne analyse de l’arrivée au pouvoir de partis populistes dont les dirigeants se réclament les représentants du « peuple ». Un « peuple » adhérant à une seule vision du monde qui exclut tous ceux qui adhèrent à une religion différente, ce qui permet d’en chasser tous ceux qui ne se conforment pas à leur modèle. L’essentiel est là, le chef est tout, il est à la fois le peuple et la direction messianique qu’il peut donner à ses fantasmes. Par la grâce de boucs émissaires (les immigrés, les bobos écolos, les Palestiniens pour les Israéliens, les Ukrainiens pour Poutine, les Américains great again contre le reste du monde, NOUS contre EUX… ), il devient possible de réclamer à des populations qu’elles consentent à affronter un ennemi unilatéralement désigné par un dirigeant. C’est un élément de cohésion et de mobilisation pour aller même jusqu’à mourir pour le leader bien aimé.
Mais il y a aussi une autre interprétation de notre avenir fascisant, un totalitarisme qui prend le pouvoir au nom de l’environnement, un « fascisme vert » ou écofascisme. Avec l’imminence de l’apocalypse climatique et/ou énergétique, une élite politique prendrait toutes les mesures nécessaires pour y faire face : rationnement de l’essence et contrôle de nos déplacements, consommation limitée à ce qu’il est juste nécessaire, réduction drastique de l’inégalité des revenus, limitation de notre hubris technologique, fin du tourisme, modèle d’un seul enfant par femme car la nature est détruite par la surpopulation, etc. Cela peut sembler actuellement inconcevable, mais il peut arriver un moment où une planète en surchauffe nous amène à accepter une restriction totale de nos libertés. Mais là, il ne s’agit plus de « fascisme » au sens des pratiques de l’extrême droite…
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Néo-malthusianisme contre écofascisme (2023)
extraits : Pierre Madelin dans son dernier livre, « la tentation écofasciste (écologie et extrême droite) » fait le tri entre les fachos fréquentables… ou non.Trop souvent aujourd’hui, les recherches ou les articles consacrés à l’éco-fascisme ont tendance à assimiler deux sensibilités qui se sont souvent rencontrées mais qui demeurent pourtant irréductibles l’une à l’autre. Pour le dire simplement, si les éco-fascismes attirent presque toujours l’attention sur la surpopulation, les néo-malthusiens ou les écologistes sensibles à la question démographique ne sont en revanche pas tous, loin s’en faut, disposés à adopter une conception racialisée des populations considérées comme « surnuméraires », ni à prôner des mesures autoritaires pour réduire la population mondiale….
Tout peut changer. Capitalisme & changement climatique (2015)
extraits : Naomi Klein souligne un risque réel, l’émergence d’un fascisme d’Etat : « Il y a une vraie menace de voir la situation se dégrader à un tel degré que cela entraînerait des solutions imposées par l’État de manière autoritaire, sous forme de mesures d’urgence. La fenêtre temporelle est étroite pour traiter le problème du réchauffement de façon démocratique. » Or les dictatures sont très fortes pour éviter de traiter l’urgence écologique : on préfère faire la chasse à des boucs émissaires, la dictature des autres, le terrorisme international, la montée du fondamentalisme religieux, la horde des immigrés, etc….
démocratie et risque d’écofascisme (2011)
extraits : La démocratie est d’autant plus mal partie que les contraintes écologiques croissantes risquent fort de nous faire basculer dans un totalitarisme oligarchique. La puissance industrielle prive l’homme non seulement de nature, mais aussi de liberté. Car plus la puissance grandit, plus l’ordre doit être strict. Comme l’exprimait Bernard Charbonneau en 1980, « L’écofascisme a l’avenir pour lui, et il pourrait être aussi bien le fait d’un régime totalitaire de gauche que de droite sous la pression de la nécessité. En effet, les gouvernements seront de plus en plus contraints d’agir pour gérer des ressources et un espace qui se raréfient. Déjà commence à se tisser ce filet de règlements assortis d’amendes et de prison qui protégera la nature contre son exploitation incontrôlée. » Que faire d’autre ?
La sémantique est toujours la même
1/ Quand des européens vont en Afrique, en Amérique du sud et en Asie, les gauchistes appellent ça des méchants colons, machistes, xénophobes, irrationnels et anti-intellectuels puis
2/ Quand des asiatiques, des africains et des latinos vont en Europe et en Amérique du nord, les gauchistes appellent ça des gentils migrants, féministes, multiculturels, accueillants, rationnels et intellectuels !
Toujours le même parallèle ! Et quelle escroquerie intellectuelle ! Or tous ces pays du sud n’accepteraient jamais autant d’européens sur leur sol que nous n’acceptions des migrants du sud, et ils sont même les premiers à expulser les indésirables de leur sol !