D’un côté un parti écolo qui ne compte que 18 000 adhérents1. De l’autre des ONG puissantes, comme Greenpeace France (165 000 adhérents) ou WWF France (160 000 adhérents) qui n’ont guère de rapports avec la direction du mouvement, et vice versa2. Il semblerait pourtant logique que les membres d’EELV soient dans une symbiose avec les associations environnementalistes. Ce genre d’obligation est inscrite dans les statuts du PS3. Pourquoi pas le même type d’obligation à EELV ?
Il nous faut créer un sentiment d’appartenance au peuple écolo4. L’écologie est pour l’instant un sentiment diffus dans la population, elle est très peu représentée institutionnellement. Ce n’est pas le cas des mouvements qui ont accompagné la lutte de classes, les mutuelles, les coopératives ouvrières, les caisses de grève, le mouvement d’éducation populaire… Or l’histoire du XXIe siècle ne va plus être centrée sur le travail (le prolétariat) et le capital technique (les capitalistes), mais sur le facteur nature. L’écologie politique ou art de bien gérer notre maison commune (la planète) va rassembler normalement au-delà des sensibilités partisanes. Car tout le monde est concerné par la pérennité des rapport entre l’homme et la nature. Encore faut-il en prendre conscience5. Si les militants EELV montraient leur affinité avec les associations environnementales, nous serions sur la voie de la constitution du peuple écolo.
Certains pourraient penser qu’une adhésion du militant écolo à n’importe quelle association ferait l’affaire (Syndicats, Parents d’élèves, Aide à la personne…). Cela serait valable si nous étions militant socialo. Nous, nous devons montrer que l’écologie est au fondement de toute chose, sociales ou économiques6. Nos associations de référence sont aussi bien les AMAP que les MAB, FNE ou WWF, Greenpeace ou les faucheurs d’OGM, les SELS ou même le mouvement NIMBY, etc.
Nous sommes bien un parti politique généraliste. Mais nous ne sommes pas un parti socialiste. Le socialisme s’est historiquement appuyé sur les syndicats et réciproquement, C’était dans leur objectif de changement du rapport de force économique. Mais le socialisme connaît le même échec que le capitalisme7. EELV doit s’appuyer sur ce qui dans la société civile permet d’instaurer un autre rapport entre l’homme et la nature : les associations environnementalistes.
N’oublions pas que si ces association découlent des inquiétudes de l’écologie scientifique, l’écologie politique découle de l’action associative8. Ce sont des associations9 qui ont motivé et soutenu la candidature de René Dumont aux présidentielles de 1974. Savoir aujourd’hui à quelle association adhérer pour soutenir notre combat politique relève d’une analyse des statuts de cette association10.
Précisions :
1. En 2008 on dénombrait environ 2000 élus pour quelque 6000 adhérents. Après le succès d’Europe Ecologie aux élections européennes de 2009, leur nombre est évalués à 20 000. Lors de la primaire d’Europe Ecologie-Les Verts lundi 6 juin 2011, il y avait plus de 30 000 votants. EELV compterait 35 357 membres dont 16 452 adhérents au parti et 18 905 coopérateurs.
2. LE MONDE du 31 décembre 2011.
3. Les membres du Parti doivent appartenir à une organisation syndicale de leur profession et au moins à une association, notamment de défense des droits de l’homme, de solidarité, de consommateurs, d’éducation populaire, de parents d’élèves ou d’animateurs de la vie locale. (statuts du Parti socialiste – titre 2, les militants – Article 2.2 : obligations syndicales et associatives des adhérents)
4. « L’enjeu est dorénavant de construire un parti réseau, un parti social multiforme. Coopérative, ou mouvement, réseaux ou cercles, l’important est moins dans l’appellation que dans la capacité à créer une forme d’appartenance commune à ce qu’on pourrait appeler un « peuple écolo » : une identité sociale qui serait devenue légitime et revendiquée. » (Des écologistes en politique d’Erwan Lecoeur)
5. L’antagonisme entre patrons et travailleurs n’est pas une évidence. Un travailleur peut trouver tout à fait normal qu’il y ait des patrons tout puissants et très bien payés. Karl Marx faisait la distinction entre la classe en soi (existence de l’exploitation de l’homme par l’homme sans en avoir conscience) et la classe pour soi (qui entraîne un engagement politique).
6. « Si demain nous n’avions plus de pétrole, ni gaz, ni charbon, ce n’est pas 4 % du PIB que nous perdrions (la place de l’énergie dans le PIB), mais près de 99 %. Rappelons qu’il ne saurait y avoir d’humanité prospère et le moindre PIB bien gras et bien dodu sur une planète dévastée. Quiconque réalise ce que signifie, pour le mode de vie occidental, de limiter la hausse de la moyenne des températures à 2°C comprend que ça ne va pas être simple d’y arriver. Une grande partie des évolutions économiques et sociales vont s’inverser. Le prix de la biosphère est infini ; sans elle, l’espèce humaine deviendrait immédiatement un vestige du passé. » (Changer le monde, tout un programme de Jean-Marc Jancovici)
7. « (p.42) : Avec qui engager des partenariats ? (p.44) : Marqués comme la droite au fer rouge du productivisme, fasciné par ses fétiches et ses aditions, la social-démocratie et les courants marxistes restent éloignés de l’essentiel du paradigme écologiste. Les écologistes n’ont pas vocation à épouser une doctrine qui n’est pas la leur en y introduisant un peu de vitamine verte.» (Manifeste pour une société écologique – 13 novembre 2010)
8. « Tout a commencé en France au début du mois de décembre 1973, au cours d’une réunion de l’Association des Journalistes et Ecrivains pour la protection de la nature et de l’environnement. Et si on présentait un candidat aux présidentielles de 1974 ? Idée adoptée, puis oubliée. Après la mort de Pompidou, l’idée renaît au sein des « Amis de la Terre » qui choisit le 6 avril 1974 comme candidat, sans qu’il le sache, René Dumont. Tout le long de la campagne, Dumont sera le représentant des associations écologiques qui le soutiennent. » (La campagne de René Dumont et ses prolongements, Pauvert 1974)
9. Associations pour la candidature de René Dumont : Les Amis de la Terre ; Action zoophile ; Comité antinucléaire de Paris ; Combat pour l’homme ; Droits du piéton ; Ecologie et Survie ; Fédération des usagers des transports ; Association pour la protection contre les rayonnements ionisants ; Comité de sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin ; Nature et Vie ; Maisons paysannes de France ; Défense et protection des animaux ; La Gueule Ouverte ; Front occitan ; Etc.
10. Par exemple Attac a « pour objet de produire et communiquer de l’information, de promouvoir l’éducation populaire, ainsi que de mener des actions de tous ordres en vue de la reconquête, par les citoyens, du pouvoir que la sphère financière exerce sur tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle dans l’ensemble du monde. Parmi ces moyens figure la taxation des transactions sur les marchés financiers. » Il n’y a nulle trace dans ces objectifs de préoccupation à propos des rapports entre l’homme et la nature.