effet rebond,effet débond

Il faudrait que tous les citoyens connaissent l’effet rebond. Cette conséquence négative de nos efforts technologiques est connue depuis Stanley Jevons (the coal question, 1865) : « Sans volonté de réduire la consommation à la source, le fait d’utiliser des machines moins consommatrices d’énergie n’entraîne pas une baisse de consommation. » Cela amène à utiliser plus de machines, ce qui annule les économies d’énergie réalisées grâce aux gains d’efficacité des machines. En termes modernes, on parle d’effet rebond. LeMonde du 13 août s’inquiète de cet effet pervers : « les progrès en efficacité énergétique ont été annulés par la croissance de la production et de la consommation, la France ne rejette pas moins de CO2 qu’en 1990. » Voici quelques autres exemples d’effet rebond :

Le rebond de l’efficacité technique concerne par exemple une voiture plus efficace énergétiquement, mais qui voyage sur une plus longue distance. Le rebond lié à la frugalité : un billet d’action pour Dakar sera acheté avec les économies sur les frais de chauffage réalisés en réduisant la température d’une maison l’hiver. Le rebond lié à la baisse de la natalité :  moins d’enfants dans une famille peut libérer des revenus pour augmenter la consommation matérielle ou d’énergie par personne. Il y a rebond macro quand par exemple une plus grande efficacité énergétique entraîne une réduction de prix et l’augmentation de la demande d’énergie. L’achat d’une voiture soutient le réseau routier, ce qui engendre une réorganisation de la société et encourage les supermarchés aux dépens du petit commerce. (La décroissance économique – pour la soutenabilité écologique et l’équité sociale de François Schneider)

– Même la révolution numérique, dont on pourrait a priori penser qu’elle nous éloigne de ce modèle, parce qu’elle « dématérialise » bon nombre d’échanges, consomme de la nature. De plus ce que nous gagnons en qualité, avec des produits moins consommateurs de nature, nous le perdons souvent en quantité, car la croissance exponentielle des nouvelles technologies entraîne dans son sillage une forte hausse des quantités d’énergie consommées. C’est l’effet rebond, chaque fois que nous économisons de l’énergie à un endroit, nous ne manquons pas d’en consommer un peu plus ailleurs. La seule manière de conjuguer efficacité énergétique et effet rebond est très probablement de faire croître le prix de l’énergie plus vite que le pouvoir d’achat. (Les Etats et le carbone de Patrick Criqui, Benoit Faraco et Alain Grandjean)

– Une limite à la puissance de nos techniques est ce qu’on appelle l’effet rebond, ce que l’on gagne grâce au progrès technologique à l’unité est perdu, en termes de consommation de ressources, par la multiplication de ces mêmes unités. Un ordinateur aujourd’hui consomme moins d’énergie, mais la puissance requise, les types d’usage et le nombre d’utilisateurs n’ont cessé d’augmenter, si bien que la consommation globale d’énergie due à l’informatique s’accroît. (Crise écologique, crise des valeurs de Dominique Bourg)

– Avec l’effet rebond, l’argent épargné grâce à l’efficacité énergétique est dépensé pour d’autres biens et services, ce qui annule parfois entièrement l’économie réalisée. Dépenser par exemple l’argent économisé grâce à des ampoules écologiques dans un billet d’avion courte distance à bas prix est le plus sûr moyen d’obtenir un retour de flamme (backfire). En bref le découplage relatif (faire plus avec moins) possède le potentiel pervers de diminuer les chances d’atteindre le découplage absolu (la production économique s’affranchit de sa dépendance au flux de matières). Les loisirs devraient être un candidat tout trouvé à la dématérialisation. Mais en pratique, notre façon d’occuper notre temps de loisir est responsable d’environ 25 % de notre empreinte carbone. Et la commercialisation accrue des aspects les plus simples et les plus créatifs de nos vies ne change-t-elle pas la nature de ces activités pour le pire ? (Prospérité sans croissance de Tim Jackson)