« Et en même temps », locution adverbiale préférée d’Emmanuel Macron, est bien plus qu’un slogan, c’est une nouvelle façon de penser la politique. Une volonté de concilier dans un même mouvement des positions contradictoires. Le président nouvellement élu se présentait comme à la fois de gauche et de droite, social et libéral, adepte du roman national et lecteur de l’histoire globale. Encore candidat, il déclarait en meeting à Bercy le 17 avril qu’il continuerait à utiliser « en même temps » dans ses phrases mais aussi dans sa pensée. Parce que, « en même temps », ça signifie que l’on prend en compte des impératifs qui paraissaient opposés mais dont la conciliation est indispensable au bon fonctionnement d’une société.*
Il est vrai que l’éthique de responsabilité empêche l’éthique de conviction de virer à l’utopie idéaliste du tout ou rien alors que l’éthique de conviction empêche l’éthique de responsabilité de chuter dans le cynisme de la realpolitik. L’éthique est inhérente au politique et, « en même temps », l’éthique exerce un regard critique sur les abus du pouvoir. Mais il y a loin entre l’idée théorique d’une synthèse des contraires et la réalité. La mode est aux oxymores, rapprochement des contraires : développement durable, croissance verte, voiture propre, agriculture raisonnée, moralisation du capitalisme, etc. Plus ils produiront des oxymores, plus les politiques seront inaptes à penser et à accepter les mesures radicales qui s’imposeraient. Il faut rappeler l’étymologie grecque d’oxymore, qui signifie « folie aiguë ». Prenons l’exemple de la vision d’un code du travail qui reposerait sur l’idée de flexisécurité, vouloir en même temps la libération du travail et la protection des plus précaires. Flexisécurité, dans l’idéal les deux termes se corrigent mutuellement. Mais si c’est la flexibilité qui l’emporte, on continuera d’aller vers une paupérisation des travailleurs, emportés par la concurrence mondialisée vers conditions de travail épouvantables. Si c’est la protection qui domine, nous irons vers une rigidité défavorable aux entreprises. Que fera Macron, quelle dose de yin et de yang ? Il faut attendre le résultat final, on ne peut préjuger par avance des modifications du marché du travail qui seront faites par ordonnances.
Par contre l’idée macroniste de considérer « en même temps » la sortie du nucléaire et sa relance pose un problème de fond, une politique énergétique est un exercice de longue haleine. Le candidat président disait qu’il fallait « réduire notre dépendance » à l’atome et en même temps que « le nucléaire en France a un avenir ». Il se plaçait « dans la trajectoire » définie par François Hollande – une baisse de 75 % à 50 % de la part de l’électricité issue de la fission « à l’horizon 2025 » –, et en même temps qu’il « ne sait pas dire aujourd’hui » si cet objectif est « atteignable ». Son ministre de l’écologie fait aujourd’hui de même. Au lendemain de sa nomination, Nicolas Hulot a déclaré que « la part du nucléaire en 2025 doit être de 50 % » et en même temps que « la démonstration se fera peut-être, chemin faisant, qu’on peut aller au-delà de 50 %, ou au contraire (…) que le développement des énergies renouvelables est plus lent que prévu ».** Or la plupart des cinquante-huit réacteurs du parc hexagonal ont été mis en service entre la fin des années 1970 et celle des années 1980. Ils approchent donc du seuil de quarante ans d’exploitation, la durée de vie pour laquelle ils ont été conçus. D’ici à la fin du quinquennat en cours, vingt-trois d’entre eux auront atteint cet âge. Il faut donc de toute urgence savoir décider. Sachant que le nucléaire n’est pas une énergie renouvelable, que la gestion de ses déchets ne trouve pas de solution acceptable, que le poids financier du démantèlement des réacteurs deviendra insupportable, décider la sortie de l’atome devrait être indiscutable. Encore faut-il orienter politiquement notre société vers la seule solution pérenne, économiser l’électricité et réduire nos besoins en énergie jusqu’à consommer seulement ce que les énergies renouvelables permettent. L’écologie, c’est la gestion du long terme, et on ne peut pas durablement faire une chose et son contraire. Il faut savoir décider.
* LE MONDE idées du 27 mai 2017, Emmanuel Macron, une philosophie du pouvoir
** LE MONDE du 31 mai 2017, Exercice d’équilibrisme sur l’avenir du nucléaire
Je crois tout simplement que Macron est avant tout ce qu’on appelle un « communicant » , ce que j’entends comme « marchand de salades ».Macron s’est d’abord présenté (très habilement) comme «ni de droite ni de gauche», ce qui ne pouvait que séduire ces millions de français qui ne peuvent plus supporter ces deux mots (idées) de «droite» et de «gauche», et qui malheureusement ne savent même plus ce qu’ils veulent dire.Ensuite il se déclare «de droite et de gauche» … ce qui déjà, n’est plus la même chose.
Déjà-là, il faudrait savoir où il habite. Personnellement, j’en ai une idée. Et d’autre part, je ne peux pas croire que Macron ne sache pas où il habite.
Son fameux «et en même temps» est une formule employée par tous les manipulateurs (communicants = marchands de salades) formés aux «bonnes» écoles de com’. C’est un TRUC couramment employé pour faire passer la pilule, ou le suppositoire, un peu comme la vaseline. Chez lui c’est même devenu un TIC … dont il aimerait d’ailleurs se débarrasser. Hélas, vous avez beau chasser le naturel, il revient au galop.